Continental Gold a récemment recruté le professeur Marcello Veiga de l'université de la Colombie-Britannique (UBC) pour élaborer une stratégie à l'intention des mineurs artisanaux travaillant sur sa propriété Buriticá en Colombie. Avec l'aimable autorisation de Continental Gold

Alors que les Colombiens ont rejeté en octobre un accord de paix historique entre le gouvernement et le plus grand groupe rebelle de la nation, les sociétés minières canadiennes devront encore attendre une certaine stabilité avant de libérer le potentiel minier de la Colombie.

La ratification de l'accord de cessez-le-feu passé en septembre avec les forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) aurait marqué la fin de 52 années de conflit armé et d'instabilité politique, qui ont notamment empêché les sociétés pétrolières et minières d'accéder aux terres riches en ressources du pays et ont donné libre cours à l'exploitation minière artisanale illégale de terres détenues par des sociétés étrangères.

Par voie de plébiscite national, 50,2 % des Colombiens ont cependant voté contre cet accord, négocié par le président Juan Manuel Santos avec le dirigeant des FARC Timoleon Jimenez. Certains pensent que le président a été trop indulgent avec le groupe de guérilla marxiste. En vertu de cette négociation, les FARC étaient censés abandonner les armes ; en échange, les membres du groupe se seraient assurés 10 sièges au congrès et auraient reçu des condamnations plus clémentes ou auraient évité de purger des peines de prison pour des crimes comprenant meurtres, enlèvements et trafic de drogue.

Si la négociation a échoué, les dirigeants des FARC ont cependant déclaré être en faveur de la paix et n'avoir aucunement l'intention de reprendre le combat. Le président Santos, qui a reçu le prix Nobel de la paix en 2016 pour avoir conclu cette négociation, continue de chercher des solutions.

La plupart des exploitations minières existantes ne se trouvent pas dans des zones contrôlées par les FARC, déclarait Ari Sussman, président et directeur général de Continental Gold, qui dirige des projets en Colombie. Cependant, le cessez-le-feu aurait ouvert les zones de conflit à l'exploration.

« Elles finiront par [s'ouvrir], ce n'est qu'une question de temps », indiquait M. Sussman. « De nombreuses questions se posent en ce moment, et le plus judicieux est de simplement attendre et voir ce qu'il va se passer jusqu'à ce que l'on obtienne plus d'informations. »

Le projet d'exploration Berlin de Continental Gold se trouve dans une zone détenue par les FARC dans le département d'Antioquia et l'accès y est impossible, indiquait M. Sussman. La société a mené des travaux d'exploration sur ce projet de 38 000 hectares en 2008 et 2009, mais en 2010, la présence des FARC dans le département d'Antioquia s'était renforcée, posant des problèmes de sécurité pour les touristes comme pour les entreprises. Un cessez-le-feu aurait permis à Continental de redoubler d'efforts à la mine, mais « il faudra maintenant prendre patience », déclarait M. Sussman.

« Nous devons tout d'abord mieux comprendre la façon dont les choses vont se dérouler. »

D'après M. Sussman, les résultats du plébiscite ont été « très positifs » car ils inciteront le gouvernement à recueillir davantage d'informations auprès d'un éventail plus large en vue de trouver une solution.

« Le public va se faire entendre », déclarait-il. « Il n'a pas voté contre la paix, mais contre certains aspects de cet accord. »

Il faut bien convenir que ce mouvement en faveur de la paix rend la Colombie plus attrayante depuis plusieurs années pour les sociétés minières étrangères, indiquait Marcello Veiga, professeur de génie minier à l'université de la Colombie-Britannique (UBC), qui a mené des consultations auprès de sociétés minières et d'organisations non gouvernementales (ONG) sur les enjeux relatifs au développement minier dans ce pays.

Si le crime suscite des craintes en matière de sécurité depuis des décennies (citons notamment un incident qui s'est produit en 2010 lorsqu'un dirigeant canadien de Braeval Mining Corp. a été enlevé et détenu pendant sept mois par un autre groupe rebelle), M. Veiga indiquait que le nombre d'incidents est en baisse.

« En ce moment, la Colombie est le meilleur endroit au monde où investir dans l'exploitation minière. Le secteur est calme, peu connu, le gouvernement investit beaucoup dans l'infrastructure. […] On observe un dynamisme intéressant dans le pays », indiquait-il.

Alors que les sociétés canadiennes attendent de voir, M. Veiga les prévient que la plus grande menace aux projets étrangers dans le pays reste l'exploitation minière artisanale (ou traditionnelle). Si de nombreux mineurs artisanaux pratiquent en toute légalité et sont en possession de permis, une grande partie travaillent dans l'illégalité sur des terres appartenant à des sociétés. Ils envoient le minerai extrait dans des centres de traitement, souvent exploités par des organisations criminelles et des groupes rebelles (dont les FARC) qui polluent l'environnement à très grande échelle en déversant du mercure et du cyanure dans les eaux environnantes.

M. Veiga précisait que les sociétés canadiennes souhaitant investir en Colombie doivent bien comprendre comment engager le dialogue avec le réseau existant de mineurs artisanaux.

« C'est l'occasion idéale pour les sociétés minières canadiennes de parvenir à une sorte d'accord ou de négociation avec les mineurs artisanaux afin d'établir une exploitation dans le pays », indiquait-il. « Je ne recommande à aucune société canadienne de se rendre en Colombie et d'entamer la même procédure qu'elle suivrait au Canada, car la plupart des régions renfermant de l'or sont occupées par des mineurs artisanaux. »

Il faut aussi tenir compte du contexte social des populations locales qui restent prudentes face aux étrangers. M. Veiga évoquait l'ironie des locaux se plaignant « de la grosse société canadienne » qui pollue leurs terres, alors que leurs propres mineurs artisanaux déversent des résidus toxiques dans leurs eaux.

« Le problème n'est pas environnemental, mais bien social », déclarait-il. « Pour les communautés locales, les mineurs artisanaux profitent davantage à la population locale qu'une grande société canadienne. Nous devons collaborer avec eux et leur montrer les avantages potentiels que peut leur offrir une société canadienne. »

C'est un problème contre lequel Continental Gold se bat depuis un certain temps dans le cadre de son projet Buriticá, où des mineurs illégaux s'emparent depuis un certain temps de filons déjà définis par la société. Comme l'expliquait M. Sussman, ces derniers répandent également des impressions négatives sur le projet de Continental alors que leurs propres méthodes d'exploitation minière polluent les sources d'eau et les communautés environnantes.

Le gouvernement s'est interposé, obligeant les mineurs illégaux et leurs familles à faire marche arrière avec l'aide d'une ONG tierce qui s'assurait que ces derniers aient de quoi se nourrir, aient accès à l'eau potable et reçoivent un soutien psychologique, ajoutait M. Sussman.

Continental Gold a ensuite fait appel à M. Veiga et à l'UBC pour que les mineurs traditionnels travaillant dans la région depuis des années reçoivent une formation officielle afin de pouvoir être embauchés par des sociétés autorisées à travailler sur les terres appartenant à Continental.

D'après la Global Initiative Against Organized Crime (l'initiative mondiale de lutte contre le crime organisé), environ 80 % de l'or extrait en Colombie l'est de manière illégale, et cette pratique s'avère être plus lucrative que le trafic de cocaïne. Les FARC sont l'un des plus grands partisans de l'exploitation minière artisanale en Colombie, et le gouvernement estime que 20 % du financement du groupe provient de l'exploitation aurifère illégale.

Un règlement de paix entre le groupe rebelle et le gouvernement pourrait contribuer à mettre un frein aux activités minières illégales, précisait M. Sussman.

« Ces pratiques ne disparaîtront pas entièrement, mais elles deviendront moins fréquentes. »

Traduit par Karen Rolland