Comment éviter les erreurs les plus fréquentes quant à l'entretien d'actifs de plusieurs millions de dollars . Peter Braul
Dans l'environnement austère d'un site minier, il peut paraître très difficile de maintenir l'équipement en bon état de marche. Pour couronner le tout, beaucoup pensent qu'un bon entretien repose sur de vieilles habitudes ou des rumeurs, et non sur des faits. Pour vous aider à rester performants, nous avons élaboré pour vous une liste d'experts dans le domaine afin de lever le voile sur 10 mythes omniprésents concernant l'entretien.
1) Si l'équipement ne tombe jamais en panne, nul besoin de le vérifier aussi souvent.
Brandon Hendrix, principal chargé de compte chez Joy Global, indiquait que ses clients mettent souvent en place une routine de contrôles mensuels sur le nouvel équipement, pensant que cela constitue une maintenance préventive suffisante. « Ils devraient pourtant inspecter l'intégralité de l'équipement plusieurs fois par mois », expliquait-il. « Ceci permet de disposer de suffisamment de temps pour commander les pièces défectueuses et les livrer au site minier. » Particulièrement critique sur l'équipement lourd, les coûts engendrés par une machine défectueuse peuvent s'élever à plusieurs millions de dollars si le site est contraint de se procurer rapidement une pièce spécifique, aussi petite soit-elle. « L'équipement de certains de nos clients qui est soumis à des contrôles plus fréquents dure globalement plus longtemps ; certaines pelles dépassent même parfois les 160 000 heures », indiquait M. Hendrix.
2) La disponibilité de l'équipement diminue avec son ancienneté.
« Selon moi, la performance des machines anciennes diminue uniquement car on les traite comme un équipement vétuste », indiquait Nathan Flesher, directeur des opérations chez le prestataire de base de données sur la performance MineLens. Les opérateurs et les mécaniciens prennent selon lui moins de précautions avec l'équipement ancien et ils ont tendance à ne pas réparer aussi souvent les petits problèmes, qui se transforment au fil du temps en des problèmes de plus grande envergure.
« J'ai déjà vu des conducteurs entretenir avec soin leurs camions F250 de 10 ans et les maintenir en parfait état de marche, au point que l'on pourrait croire que ces machines sont neuves », indiquait-il. « En contraste, on retrouve souvent des " camions de travail " communs dans un état déplorable en trois ou quatre ans parce que personne ne les nettoie ou ne s'en occupe. » L'équipement plus ancien est bien entendu davantage enclin à tomber en panne, mais les mécaniciens connaissent bien ces pannes et disposent des pièces nécessaires à portée de la main, aussi les machines sont remises en service rapidement.
3) Nous n'avons ni le temps ni les moyens de nous occuper de rassembler tout le matériel.
Chaque fois qu'un technicien est chargé de travailler sur une exploitation qui assure la collecte de tout le matériel nécessaire, il doit tout d'abord réunir l'équipement préassemblé qui comprend tous les outils et les pièces requis pour le travail. D'après M. Flesher, même si les exploitations ne procèdent pas officiellement ainsi, « force est de constater qu'elles s'occupent déjà de réunir tout le matériel nécessaire. Mais elles le font de manière totalement inefficace, et le mécanicien, le superviseur et les personnes travaillant à l'entrepôt font des allers et retours inutiles pour obtenir toutes les pièces dont ils auront besoin pour un travail spécifique. En procédant par ordre dès le début, vous gagnez non seulement du temps pour exécuter votre projet, mais également pour obtenir toutes les pièces dont vous aurez besoin. »
4) Les coûts liés aux pannes des systèmes hydrauliques sont inévitables.
Comme indiquait Roger Marchand, président et directeur général du fabricant de filtres magnétiques Bay6 Solutions Inc., les dommages et les coûts relatifs aux pannes des systèmes hydrauliques sont depuis longtemps perçus comme naturels. « Les filtres à texture moyenne ne supportent pas les niveaux élevés de contamination engendrés lorsque le système est en panne », expliquait-il. Pendant les pannes, l'huile contaminée circule sans être filtrée dans tout le système hydraulique, générant ainsi les conditions idéales pour de futures pannes. « Ce genre de cycles de pannes est depuis longtemps considéré comme " faisant partie du jeu ", mais il est désormais possible de gérer ces pannes », expliquait M. Marchand. « La filtration magnétique permet de capter et de contenir cette contamination. » En effet, la majeure partie de la contamination qui se propage durant une panne est d'origine ferreuse et peut être récupérée par des aimants empêchant l'obstruction.
5) Les systèmes hydrauliques ne constituent pas un danger important pour les préposé(e)s à l'entretien.
Les systèmes hydrauliques deviennent de plus en plus imposants au fil des ans, avec des pressions pouvant atteindre plus de 750 livres par pouce carré(lb/po²) et des températures dépassant les 60°C. Le fluide qui s'écoule dans ces conditions peut pénétrer la peau et s'infiltrer dans le flux sanguin, auquel cas les victimes devront obligatoirement se faire opérer. D'après la Mine Safety and Health Administration (MSHA, l'administration de la sécurité et la santé dans les mines), 9 % des accidents dans les mines sont liés à des tuyaux à transmission d'énergie par fluide.
6) La graisse est une meilleure option que l'huile pour lubrifier les roulements à rotule à double rangée sur rouleaux.
« Le débat préconisant l'utilisation de graisse plutôt que d'huile est courant dans une application impliquant des roulements à vitesse lente ou modérée », expliquait Leo Perry, ingénieur principal chez GIW Industries, le fabricant de pompes à boue détenu par KSB. Certains préposé(e)s à l'entretien préfèrent la graisse pour des raisons pratiques, mais la géométrie de certains roulements (tels que les butées à rotule sur rouleaux) fait de l'huile un choix fiable, indiquait M. Perry. « Il peut s'avérer difficile de maintenir des niveaux de graisse adaptés dans ces roulements au fil du temps. » L'huile dissipe également mieux la chaleur, ce qui permet à l'appareil de fonctionner à plus grande vitesse, et il est plus facile de surveiller son niveau et sa température.
7) Plus il y a d'huile, mieux c'est.
Trop d'huile entraînera une surchauffe des roulements. « Un niveau excessif d'huile peut générer un surplus de chaleur et gazéifier l'huile en raison de l'action de rotation au sein du boîtier », expliquait M. Perry. « Un trop grand volume d'huile peut également entraîner le phénomène de réservoir de chaleur, ce qui rend difficile l'élimination de la chaleur des roulements. » Sur les pompes de GIW, les instructions préconisent de remplir la jauge d'observation du niveau d'huile jusqu'à la ligne centrale lorsque la pompe est à l'arrêt, ce qui devrait suffire à revêtir chaque élément roulant d'une pellicule d'huile.
8) Tous les indicateurs de rendement clés (IRC) sont détenus par le service d'entretien.
« Qui détient l'IRC de la conformité à la maintenance préventive ? », demandait Bruce Wesner, directeur de la gestion chez Life Cycle Engineering. La plupart des équipes des opérations considèrent qu'il est du ressort des équipes préposées à l'entretien, mais pour M. Wesner, cet IRC devrait revenir aux équipes des opérations. « L'équipe des opérations doit céder l'actif à l'équipe préposée à l'entretien afin qu'elle prenne des mesures préventives », mais étant donné que la plupart des équipes des opérations sont animées par des objectifs de production, elles sont réticentes à donner libre cours aux mesures de maintenance préventive.
9) Le principal objectif des équipes préposées à l'entretien est de résoudre les problèmes dès qu'ils se produisent.
Le personnel préposé à l'entretien doit avant tout concentrer ses efforts sur les pannes et la manière de les éviter, expliquait M. Wesner. « L'équipe des opérations doit appréhender l'entretien comme un spécialiste qui mène constamment des diagnostics d'un point de vue prédictif de manière à comprendre si cet actif affiche de bons ou de mauvais résultats », ajoutait-il. Si un actif se détériore, soulignait M. Wesner, il est aussi essentiel « que l'équipe des opérations soit sur place, se sente impliquée et comprenne ce qu'il se passe, et qu'elle joue un rôle dans la résolution du problème. Les personnes pour lesquelles un actif n'a pas de secret sont celles qui l'exploitent. » Cette approche collaborative adoptée envers l'entretien des actifs peut, selon lui, contribuer à éviter des pannes coûteuses avant même qu'elles ne se produisent. « Le coût des pannes catastrophiques est généralement de sept à dix fois plus élevé », indiquait M. Wesner.
10) Un tonnage élevé est synonyme d'une exploitation efficace.
Il peut sembler paradoxal que les exploitations déplacent plus de tonnes en se concentrant moins sur ces dernières et davantage sur la disponibilité des actifs qu'elles utilisent pour déplacer ces tonnes, expliquait M. Wesner. Dans le cadre des travaux qu'il a menés avec une société minière, en mettant l'accent sur la disponibilité des actifs et non sur le tonnage, la société est parvenue à augmenter de 35 % le volume de tonnes déplacées sur trois mois. En plus de prendre des mesures de maintenance préventive, M. Wesner indiquait que les sociétés minières peuvent réaliser des gains importants en assurant la transition la plus homogène et efficace possible au moment de la relève au travail. « Il ne s'agit pas de monter une équipe contre l'autre », déclarait-il, ajoutant qu'il se souvenait d'une exploitation où les conducteurs/trices de camions prenaient la peine d'ajuster le siège pour le/la prochain/e conducteur/trice de manière à ce qu'il/elle puisse commencer immédiatement à travailler.
Traduit par Karen Rolland