L'ingénieur des procédés de fabrication Ashwin Gupta effectue la dernière inspection des éléments du lit fluidisé de deux pouces avant de procéder à une expérience de grillage du minerai aurifère | Avec l'aimable autorisation de Kingston Process Metallurgy

La collaboration entre Kingston Process Metallurgy (KPM) et Barrick Gold a abouti au développement d'un four à lit fluidisé continu de deux pouces qui devrait permettre la mise à l'essai peu coûteuse de petits échantillons de minerai tels que ceux issus de carottes de sondage prélevées dans des projets potentiels.

« Notre four de grillage de deux pouces permet de traiter une petite quantité de matière et d'obtenir des résultats représentatifs pour évaluer de manière quantitative le comportement des nouveaux minerais ou la teneur d'un corps minéralisé », indique Alain Roy, cofondateur de KPM.

Dans un article présenté par KPM lors de la conférence des métallurgistes 2014 (COM 2014), la société décrit deux campagnes d'essais qui montrent que son nouvel appareil permet d'obtenir des résultats représentatifs des fours de grillage utilisés à l'échelle de la production et aide à optimiser les paramètres de traitement pour les compositions uniques du minerai. Chaque essai-témoin consomme seulement quelques centaines de grammes du matériau, ce qui en fait une solution rapide et peu coûteuse.

« Nous tentons de trouver un procédé qui nous offrira des résultats plus modulables et nous permettra d'utiliser moins d'échantillons et de réduire le temps d'exécution ainsi que les coûts », déclare Peter Lind, directeur du centre technologique de Barrick de Vancouver, expliquant la raison de l'intérêt que porte sa société au développement d'une technologie d'essai efficace à plus petite échelle. « Nous préférons tester 100 échantillons du corps minéralisé plutôt que de nous restreindre à un seul gros élément composite et de fonder toutes nos incertitudes sur un seul échantillon. »

Minerais réfractaires

L'une des plus grandes difficultés de la récupération rentable de l'or à partir de nombreux corps minéralisés est la présence de certaines impuretés telles que des sulfures, du carbone organique ou de l'arsenic, lesquelles peuvent rendre le minerai plus résistant aux techniques de traitement classiques telles que la cyanuration et l'adsorption sur charbon actif. Les minerais qualifiés de « réfractaires » nécessitent un prétraitement pour permettre la récupération efficace de l'or.

Pendant le grillage, une méthode classique de prétraitement, le minerai broyé très fin est exposé à de l'oxygène à haute température. Des réactions chimiques se produisent entre le gaz et le minerai réfractaire solide ; elles convertissent les impuretés au sein du minerai en composés gazeux tels que du dioxyde de soufre, du dioxyde de carbone et des oxydes d'arsenic, qui sont libérés par la roche et évacués par le four, laissant un minerai qui peut être facilement traité par des méthodes classiques.

« L'objectif du grillage est de trouver une condition nous permettant d'éliminer l'arsenic et le charbon sans engendrer d'autres problèmes », explique M. Roy. « Si vous vous contentez de chauffer sans prendre garde à ce que vous faites, vous risquez de former des minéraux d'arsenic qui seront stables dans le minerai, et vous ne serez plus en mesure d'extraire votre or. »

Un bon traitement permet d'augmenter la récupération de l'or à plus de 90  %. Mais un mauvais traitement (à une température trop élevée ou avec une quantité trop importante d'oxygène) peut entraîner la formation de composés solides non souhaités dans le minerai, ce qui réduira la récupération de l'or à 10 %, voire moins.

Trouver le bon traitement est généralement relativement onéreux. On ne devrait pas utiliser les fours de grillage utilisés à l'échelle de la production (lesquels peuvent mesurer plus de 10 mètres de diamètre et comportent plusieurs étages) pour les essais et le développement. Les fours de grillage pilotes, dont le diamètre est généralement compris entre six et huit pouces, consomment des centaines de kilogrammes de minerai pour effectuer un seul essai. Les tests d'optimisation deviennent vite extrêmement coûteux, voire impossibles, si la matière brute consiste en des échantillons de carottes de sondage prélevés sur un site potentiel.

Jusqu'à maintenant, l'autre solution consistait à utiliser des fours rotatifs intermittents à l'échelle de banc d'essai, bien qu'ils soient réputés pour donner des résultats très variables lorsqu'ils traitent du minerai riche en arsenic, souvent en raison d'un mélange gaz-solide imparfait dans le four et du manque de contrôle précis des paramètres d'essai. « Beaucoup pratiquaient le grillage intermittent à petite échelle dans les réacteurs rotatifs », indique Trevor LeBel, chef de projet chez KPM, « mais personne ne faisait vraiment confiance à ce procédé pour les matériaux contenant de l'arsenic car en faisant la même manœuvre trois fois, on pouvait obtenir trois résultats différents. »

Une autre option consiste à utiliser un petit réacteur à lit fluidisé de deux pouces dans lequel le gaz est expulsé vers le haut par l'intermédiaire d'un lit de fines particules, ce qui oblige les particules solides à se comporter pratiquement comme un fluide. Les réacteurs à lit fluidisé, plus que les fours de grillage rotatifs intermittents, génèrent un bon mélange gaz-solide et permettent de bien contrôler les principaux paramètres du traitement. D'autres laboratoires avaient tenté de mener cette expérience dans le passé, mais sans répondre aux attentes. KPM a été mis au défi par Pascal Coursol, qui travaillait à l'époque pour Barrick, de construire et démontrer la viabilité d'un réacteur à lit fluidisé de deux pouces qui pourrait générer des résultats fiables représentatifs d'une exploitation à grande échelle.

C'est impossible ! ...

L'un des principaux obstacles à la construction d'un petit four à lit fluidisé est de maintenir un contrôle suffisant des pressions et des températures pour maintenir la fluidisation et garantir une chaleur homogène. « D'autres y sont parvenus dans le passé dans un four de grillage bien plus grand que le nôtre, d'un diamètre de quatre ou six pouces », ajoute M. Roy. « C'est mieux qu'une usine, mais les essais requièrent tout de même des dizaines, voire des centaines de kilos du minerai. » Ceci représente une trop grande partie du matériau lorsque l'on travaille à partir d'échantillons de carottes de sondage prélevés dans de nouveaux projets. Si les essais se servent du concentré produit à partir de la flottation d'échantillons de minerai provenant de carottes de sondage, le coût augmente encore davantage.

« Il s'agissait de pouvoir dire " c'est certainement possible " », explique M. Roy. « Aucune raison physique ne montre que cela n'est pas possible, et nous y parviendrons. Mais nous devons prouver au public que le procédé fonctionne. Nos conceptions sont précises et utilisent un grand nombre d'instruments et de commandes. Cependant, il nous faut des moyens de mesurer nos principaux paramètres sans placer de sondes directement dans le lit » car cela perturberait le lit et empêcherait la fluidisation.

Ainsi, la construction d'un four à lit fluidisé à l'échelle de banc d'essai se résumait à résoudre un problème relativement commun, à savoir l'intégration de toute l'instrumentation nécessaire dans une enceinte de deux pouces de large.

...ou serait-ce finalement possible ?

La réponse n'a rien de révolutionnaire : persévérance et créativité. Grâce à un examen approfondi des configurations possibles (et à de nombreuses restructurations en testant diverses configurations), KPM a fini par réussir.

Dans les essais décrits dans l'article, la société cherchait tout d'abord à reproduire les résultats qu'obtenait Barrick dans ses fours de grillage à l'échelle de l'usine, en s'assurant que le scénario de base était représentatif du grillage à grande échelle.

Après avoir reproduit les résultats de Barrick en toute fiabilité, l'équipe de KPM a exploré les conditions qui permettraient la meilleure extraction de l'arsenic du minerai et ultérieurement, la meilleure récupération de l'or pendant le traitement normal. Le grillage en deux étapes (une étape à un niveau d'oxygène plus bas pour éliminer l'arsenic, puis une étape à un niveau d'oxygène et à température plus élevés pour brûler le charbon restant) semble optimiser la récupération de l'or comme l'on s'y attendait.

En parvenant à reproduire les résultats de Barrick, explique M. Roy, KPM a prouvé au géant minier que ce dernier pouvait maintenant leur envoyer un petit échantillon pour tester et prévoir avec précision le taux de récupération qu'il obtiendrait dans son usine. « Il leur faudra autrement procéder aux essais dans leur usine, et si les résultats ne sont pas satisfaisants, il leur en coûtera des millions de dollars », ajoute M. Roy. « Ils peuvent nous envoyer un kilogramme d'un échantillon, nous le testons, et nous leur envoyons ensuite un résultat qui leur donnera une idée de ce qu'ils pourraient obtenir dans leur usine. »

Une collaboration fructueuse

Tout au long du processus de développement, les deux sociétés ont entretenu une relation de travail étroite et complémentaire. Chaque société a apporté sa propre expertise ; Barrick a fourni les connaissances en matière de minéralogie et de traitement hydrométallurgique, et l'équipe de KPM a offert ses grandes compétences en matière de traitement pyrométallurgique et de développement d'un équipement de laboratoire sur mesure. Cette collaboration devrait profiter aux deux sociétés.

« Pour nous, l'aboutissement de cette collaboration est importante », déclare M. Lind. « Le grillage devient de plus en plus important pour de nombreux projets, car il présente de réels avantages en termes de coûts en capital et d'exploitation. »

« Jusqu'à présent avec cette unité, la plupart des travaux que nous avons menés portaient sur le grillage de l'or, mais le lit fluidisé offre beaucoup d'autres possibilités pour tester les réactions », ajoute M. Lebel de KPM. « Nous devrions attirer d'autres domaines d'activités grâce à ce four de grillage. »

Traduit par Karen Rolland