En 2014, la société Copper Mountain Mining Corporation a décidé d'optimiser sa mine de cuivre de Colombie-Britannique, dont la production était de 35 000 tonnes par jour (t/j), et de dépasser sa capacité nominale. Ainsi, elle a commencé à envoyer plusieurs tonnes de matériaux à gros grains dans ses broyeurs à boulets. Ceci a inévitablement entraîné l'engorgement (colmatage et cordage) de ses cyclones, à hauteur de trois ou quatre par semaine, entraînant des interruptions en aval dans le circuit de flottation.

« Nous avons fini par nous retrouver dans une situation où les préposés au concentrateur ne détectaient pas le colmatage dans le cyclone entre les vérifications prévues », déclarait Mike Westendorf, surintendant de l'usine de concentration à l'époque et désormais directeur.

Ainsi, lorsque Portage Technologies a demandé à Copper Mountain si elle souhaitait servir de banc d'essai pour son nouveau système de détection pour cyclones, M. Westendorf s'est empressé d'accepter. Le logiciel de Portal analyse chacune des fréquences de vibration du cyclone par rapport aux conditions du procédé et prévient les opérateurs en cas d'anomalie. Ce système permet de résoudre rapidement les problèmes qui affectent le cyclone, et a totalement éliminé les incidents en aval en 2015.

Bonnes (et mauvaises) vibrations

Un cyclone classe l'alimentation en utilisant la force centrifuge pour accélérer la vitesse de sédimentation des particules. Les configurations de l'écoulement dans les cyclones sont soumises à deux forces opposées, à savoir la force différentielle vers le haut pour les particules les plus fines (surverse) et la centrifugation des particules plus grossières (sous-verse) sur les bords et vers le bas du cyclone. « Quand un cyclone commence à avoir des problèmes, cela se présente généralement de deux façons », expliquait Michael Schaffer, président de Portage. « Il peut être colmaté, ce qui signifie que le matériau se bloque au fond et tout ressort par le haut ; l'autre problème est l'effet de cordage, à savoir le noyau d'air interne s'effondre et le matériau se déplace de bas en haut, environ 50 % de chaque côté. Le cyclone devient alors un système d'injection en forme de T. Dans les deux cas, cela signifie que le matériau envoyé dans le cyclone est bien plus grossier qu'il ne devrait l'être en aval. »

Depuis toujours, Copper Mountain vérifie les cyclones toutes les deux heures. Cependant, les complications arrivent bien plus vite qu'en l'espace de deux heures. « Les opérateurs de flotteurs remarquent en général le problème dans leur circuit en plus ou moins 15 minutes », expliquait M. Westendorf. L'isolation et la réparation du cyclone incriminé prend en moyenne 10 minutes. Portage a calculé qu'en cas de colmatage de l'un des 16 cyclones de Copper Mountain pendant 10 minutes, si l'on ne retire pas le matériau à gros grains dès qu'il atteint la première cellule dégrossisseuse, on constate une réduction de 18 % de la capacité totale.

Le Portage Cyclone Detection (PCD, le système de détection pour cyclones de Portage), quant à lui, permet de repérer les problèmes en quelques secondes. Portage est en partenariat avec Emerson Process Expert ; elle se sert de ses outils de gestion pour son matériel, lesquels consistent en des accéléromètres montés sur les parois de chaque cyclone, en haut et en bas. Ces accéléromètres fournissent des variables de sortie des vibrations qui sont analysées puis envoyées à la technologie de Portage, laquelle détermine ensuite si un incident s'est produit. « Le PCD découple les fréquences en leurs composantes de manière à isoler celles qui sont les plus pertinentes », indiquait M. Schaffer.

Le logiciel PCD contient des algorithmes exclusifs qui interprètent ces fréquences à l'aide des paramètres physiques autour du cyclone et des paramètres de fonctionnement tels que la densité de l'alimentation et le nombre de cyclones ouverts. Si le cyclone est sujet au cordage ou au colmatage, l'opérateur de la salle de contrôle reçoit un avertissement dans les cinq secondes précisant la nature du problème et il peut arrêter le cyclone. Il peut ensuite demander aux préposés à l'entretien de se pencher sur le problème. Le délai total de réponse, réglages compris, est d'environ une minute.

D'après M. Schaffer, ce délai de réponse très court représente un grand avantage. « Un cyclone sujet au colmatage ou au cordage catapultera entre 10 et 25 mètres cubes de matériau à gros grains en 10 minutes », indiquait-il. « C'est une relation linéaire, aussi en réduisant ce délai à moins d'une minute, on parvient rapidement à seulement 2 mètres cubes de matériau à gros grains. »

Les statistiques concernant la disponibilité de l'analyseur en service de Copper Mountain montrent clairement ce que l'on peut accomplir. Dans les deux semaines qui ont précédé la mise en service du PCD, sa disponibilité au point d'essai de récupération de la cellule dégrossisseuse avoisinait les 70 % ; durant les deux semaines qui ont suivi la mise en service, la disponibilité avoisinait les 93 %.

Lors de la première mise en service entre août et septembre 2014, le système ne disposait que de capacités de diagnostic. Portage a ensuite intégré un système de contrôle qui réduit le nombre d'incidents liés au cordage et au colmatage. Le code du système Portage Pumpbox Control (PPC, le contrôle de la pompe aspirante de Portage) répond instantanément aux variations potentiellement problématiques dans l'alimentation du cyclone. Plutôt que de contrôler la pompe en fonction de la stabilité des niveaux, le PPC permet au niveau de la pompe aspirante de flotter et d'absorber les perturbations.

Un projet de développement commun

Le PCD est la première solution technologique qu'avait envisagé Copper Mountain ; cette occasion s'est présentée car Portage collaborait déjà avec Copper Mountain dans le cadre d'autres projets (consultez par exemple notre article intitulé La science dans l'art de la flottation de l'édition de mars/avril 2015).

« La seule raison pour laquelle nous avons envisagé cette solution est parce que Portage offre déjà plusieurs solutions différentes à notre site », déclarait M. Westendorf. « Il était donc naturel de faire appel à eux. Cet essai ne nous a pas coûté un centime, et nous nous sommes seulement engagés à payer si le système nous convenait. »

En échange, ce projet a pour la première fois donné la possibilité à Portage d'adapter sa technologie à des conditions réelles. Par exemple, les emplacements initiaux des capteurs ainsi que la méthode de grippage ont évolué. « Nous avons dû trouver des façons innovantes de fixer les capteurs sur les cyclones afin qu'ils ne soient pas délogés ou endommagés », expliquait M. Schaffer. Au final, les capteurs ont été montés sur un tampon amortisseur directement sur le cyclone.

Il a aussi fallu un peu de temps pour intégrer les paramètres du processus dans les algorithmes du PCD. « Les opérateurs ont donc reçu quelques fausses alertes au démarrage », indiquait M. Westendorf. « Au bout de quelques fausses alarmes, l'opérateur n'y prête naturellement plus attention. » À mesure que le système devenait plus précis, il était davantage accepté ; le dernier incident, qui aurait pu être évité si l'alarme avait été prise en compte, a eu lieu fin 2014, et « il a vraiment appris aux opérateurs à respecter le système ».

Début 2015, Copper Mountain a décidé d'acquérir le système. Durant l'année, aucun incident en aval n'a été causé par le colmatage ou le cordage des cyclones.

Un marché à développer

D'après M. Schaffer, Portage est la première société à avoir développé une solution fondée sur les vibrations. Les autres technologies disponibles sont des capteurs acoustiques pour le niveau supérieur du cyclone et des caméras ou des capteurs d'impact pour le niveau inférieur. Selon M. Schaffer, la solution proposée par Portage est excellente des points de vue de l'entretien et de la précision ; en termes d'entretien, car il n'y a pas de pièces d'usure, et en termes de précision, car les deux capteurs peuvent se valider l'un l'autre. Au vu de sa réussite avec Copper Mountain, Portage offre maintenant son PCD à d'autres mines, dont Escondida au Chili, pour la somme de 10 000 $ US par cyclone.

« Nous travaillons avec l'un des principaux fournisseurs de cyclone », ajoutait M. Schaffer, « lequel intégrera cette technologie dans ses cyclones comme un plus du fabricant d'équipement d'origine et équipera ses cyclones des attaches nécessaires pour pouvoir y accrocher nos capteurs ».

La détection du colmatage et du cordage semble correspondre à un usage étrangement restreint pour cette technologie, et ses partisans sont indéniablement d'accord sur ce point. Portage développe également la technologie pour mesurer l'usure de la bande de garnissage. La deuxième version de ce système devrait être prête dans le courant de l'année 2016. Entre-temps, Copper Mountain teste actuellement le contrôle des vibrations pour mesurer la charge de son broyeur semi-autogène (broyeur SAG).

« Il est souvent difficile de trouver une technologie plus sophistiquée que les exploitants apprécient vraiment », faisait remarquer M. Westendorf. « Et ils apprécient réellement ce système. »

« Nous sommes très reconnaissants envers Copper Mountain qui nous a accordé sa confiance, a pris le temps de comprendre ce que nous lui proposions et était prête à prendre le risque et à tester la technologie dans son usine », indiquait M. Schaffer. « Heureusement, le résultat a été positif pour les deux parties. C'est la façon dont ce secteur va pouvoir évoluer, en travaillant en équipe pour s'assurer que les technologies fonctionnent. »

Traduit par Karen Rolland