Les entreprises pétrolières ne peuvent pas échapper à leur responsabilité de nettoyer les anciens puits de pétrole en cas de faillite, a annoncé la Cour suprême jeudi dans une décision qui aura des conséquences importantes pour les industries de l'extraction des ressources.

La cour a tranché à 5 voix contre 2 de renverser les décisions de deux juridictions du tribunal inférieur conciliant le séquestre du producteur junior de pétrole et de gaz de l'Alberta, Redwater Energy Limited, qui avait fait faillite en 2015.

Redwater était propriétaire de 84 puits pétroliers, de 7 installations et de 36 pipelines au moment de sa faillite et étaient endetté de 5,1 millions de dollars envers ATB Financial. Le séquestre de Redwater, Grant Thornton - qui finalement est devenu son syndic de faillite - voulait vendre ses puits actif afin de rembourser ses dettes à l’ATB, mais l’Agence de réglementation de l'énergie de l'Alberta (AER) a exigés que le séquestre fût obligé de respecter l'obligation de Redwater de nettoyer ces puits orphelins avant que leurs créanciers puissent être remboursés.

En Alberta, les puits renoncé deviennent la responsabilité de l'AER, qui a des règles sur la manière lesquelles ils sont pris en charge, et de l'Orphan Well Association, un groupe financé par l'industrie chargé de nettoyer ces puits. L’AER et l’association ont porté l’affaire devant les tribunaux, et Grant Thornton a déposé une demande reconventionnelle afin de contester la constitutionnalité de la position de l’organisme de réglementation. Deux tribunaux provinciaux ont statué en faveur du séquestre de Redwater, arguant que l'utilisation par l'AER de ses pouvoirs légaux était en contradiction avec la Loi sur la faillite et l'insolvabilité en imposant les obligations d'un titulaire de permis de forage pétrolier à un syndic de faillite, et contournait la procédure établie pour la distribution des actifs définie dans la loi sur la faillite.

La Cour suprême a déclaré qu'en cas de « conflit véritable » entre le droit provincial et la loi sur la faillite, la loi sur la faillite prévaudrait. Pourtant dans ce cas, ils n’ont pas trouvé de conflit.

« La faillite n’est pas un permis de faire abstraction des règles, et les professionnels de l’insolvabilité sont liés par les lois provinciales valides au cours de la faillite », a écrit le juge en chef Richard Wagner au nom de la majorité.    « Le régime de réglementation de l’Alberta peut coexister et s’appliquer conjointement avec [la loi sur la faillite] ».


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Wagner a souligné qu’un article de la loi protège notamment les syndics de toute responsabilité dans le cas que la législation provinciale exige la restauration environnementale de l’actif du failli, ce qui contredit l’affirmation de Grant Thornton selon laquelle elle aurait assumé la responsabilité d’un titulaire de permis. La décision été également en désaccord avec l'argument du syndic selon lequel la procédure de répartition des actifs avait été violée. Étant donné que l’organisme de réglementation n’était pas prêt à profiter financièrement du nettoyage des puits abandonnés, il ne pouvait pas être considéré comme un autre créancier de Redwater. « Un organisme de réglementation exerçant un pouvoir pour faire respecter un devoir public n’est pas un créancier de la personne ou de la société assujettie à ce devoir », a écrit Wagner. 

Dans leur opinion dissidente, les juges Michael Moldaver et Suzanne Côté ont écrit que Grant Thornton et ATB avaient démontré une « incompatibilité véritable » entre les lois provinciales et fédérales, car les lois de l'Alberta régissant les producteurs de pétrole et de gaz empêchaient les syndics de faillite de céder des actifs tandis que la loi sur la faillite leur donnerait ce pouvoir. 

L’Association canadienne des producteurs pétroliers, qui est intervenue dans cette affaire, a déclaré dans un communiqué qu’elle était « encouragée » par la décision de la cour. 

« La CAPP a soutenu au nom de l'industrie que lorsqu'une entreprise se déclare en faillite, la valeur de tous les actifs devrait d'abord être absorbée par les frais d'abandon et de remise en état. L'Association Orphan Well (...) devrait être un dernier recours et utilisé seulement après que toutes autres sources de financement soient épuisées », a déclaré l'association. « La CAPP estime que ce jugement rétablit l'équilibre entre les obligations environnementales et les intérêts des créanciers à celui existant de nombreuses années précédant cette affaire ». Plusieurs gouvernements provinciaux ont également été enregistrés comme qu'intervenants dans cette affaire.