D'après les résultats d'une enquête du gouvernement publiée en juillet dernier, la police aurait tué 65 habitants de la région et en aurait blessé 270 depuis que la mine d'or North Mara d'Acacia Mining est en exploitation. Ce document, rédigé en swahili, a été obtenu par le quotidien The Globe and Mail, qui a communiqué ces chiffres à la fin du mois de septembre. Barrick Gold détient une participation de 63,9 % dans les capitaux propres d'Acacia (anciennement African Barrick Gold).

Ce n'est pas la première fois que des scènes de violence éclatent à la mine entre les forces de sécurité, la police tanzanienne et les habitants du village qui cherchent à pénétrer sur le site minier à la recherche de roches précieuses. Une enquête a été lancée par le ministère de l'énergie et des minéraux de Tanzanie en février pour comprendre les différends en cours, et des commissaires se sont rendus à North Mara en février et mars derniers. La commission était composée des aînés du village, d'employés d'Acacia, de représentants officiels du gouvernement et d'hommes politiques venant d'autres régions.

Acacia a réfuté la majorité des revendications faites par The Globe, objectant que l'article reposait « principalement sur des allégations faites par deux ONG opposées à l'exploitation minière ». D'après une déclaration de la société, le comité d'enquête a entendu des « plaintes non corroborées » concernant les blessures et décès infligés par la police. Il précisait que la situation à North Mara s'est considérablement améliorée au cours des dernières années ; en effet, on compte moins de 10 intrus par mois et seulement 15 % d'accidents mortels résultant d'interventions policières.

Mines Alerte Canada et l'ONG britannique Rights and Accountability in Development (RAID, un organisme à but non lucratif spécialisé dans les droits et la responsabilité dans le domaine du développement) enquêtent depuis trois ans sur la situation tendue à la mine d'or et ont mené trois évaluations dans la région, les plus récentes datant de juillet et août 2016.

Catherine Coumans, coordinatrice de recherche auprès de Mines Alerte Canada, est d'avis que la violence sur le site minier existe toujours et qu'il faut mettre en œuvre « une enquête réellement indépendante sur l'utilisation excessive de la force ». 

D'après Mme Coumans, ce rapport présente une image inexacte de l'étendue des violences à la mine, en partie car les blessures et les décès infligés par le personnel de sécurité de la mine n'étaient pas mentionnés dans le rapport du comité. Elle expliquait que ce rapport est un « document très étrange » qui passe sous silence des informations primordiales, notamment le nom du ministère qui a mené l'enquête, les noms des commissaires ainsi que le tableau chronologique et la période relative à la collecte de ces données.

Dans son rapport à mi-exercice aux investisseurs, Acacia évoquait cette enquête mais ne faisait nullement mention des décès révélés dans le rapport.

North Mara, qui a ouvert ses portes en 2002, a connu de nombreux épisodes de violence au fil des ans. En 2008, quelque 200 personnes avaient envahi la mine et mis le feu à une partie du matériel. Elle a aussi été accusée de violations des droits de l'homme et en 2013, la société a indemnisé 14 femmes de la région victimes d'agressions sexuelles par le personnel de sécurité et la police. 

Traduit par Karen Rolland