Les sociétés minières Teck Resources et Rio Tinto, dont l’exploitation de minerai de fer de Labrador, au Québec, apparaît en photo ci-dessus, sont de grands commanditaires du projet MMAP. Avec l’aimable autorisation de Rio Tinto

Le 1er février, la supergrappe des technologies numériques du Canada, une organisation qui met l’accent sur l’accélération de l’innovation dans les technologies numériques, a lancé le projet Mining Microbiome Analysis Platform (MMAP, la plateforme d’analyse du microbiome minier). Ce projet développera un référentiel de données géochimiques et microbiennes à l’aide d’échantillons prélevés dans plus de 15 000 sites miniers.

Le MMAP est dirigé par Teck Resources, en partenariat avec l’université de la Colombie-Britannique (UBC), BGC Engineering, Koonkie Canada, Rio Tinto, Genome BC, Allonnia, Microsoft et le centre d’excellence en innovation minière (CEIM). Au cours des deux prochaines années, la plateforme en ligne extraira l’ADN des échantillons prélevés dans des sites miniers et identifiera les microbes pouvant servir à mettre en œuvre des procédures d’extraction des ressources et de biorestauration de nouveaux sites miniers reposant sur les microbes.

John Steen, directeur de la Bradshaw Research Initiative in Minerals and Mining (BRIMM, l’initiative de recherche Bradshaw sur les minéraux et les mines) à l’UBC, décrivait ce projet comme « une bibliothèque génétique dédiée aux micro-organismes qui peuplent les sites miniers ».

Comme l’expliquait M. Steen, les microbes existent depuis des milliards d’années, et on les trouve près des métaux depuis à peu près aussi longtemps. De nombreux microbes et gènes ont développé « de petites astuces » pour traiter ou extraire les métaux, ou au contraire, pour ne pas en perturber d’autres. L’objectif, indiquait-il, est de créer une bibliothèque de ces microbes et gènes et d’utiliser les données résultantes en collaboration avec d’autres sociétés pour développer de nouvelles technologies et les rendre rentables.

L’utilisation des microbes dans l’exploitation minière n’a rien de nouveau. L’hydrométallurgie par exemple, un processus utilisé depuis le XIXe siècle, utilise des solutions aqueuses pour traiter le minerai, indiquait M. Steen. L’utilisation des microbes a également été étudiée pour l’assainissement des déchets.

« L’idée selon laquelle les microbes peuvent nous aider dans le traitement et la gestion des déchets n’a rien de nouveau. Ce qui est nouveau, c’est que l’on soit capable de décider de la fonction que l’on souhaite activer », expliquait M. Steen. « Nous nous contentons d’accélérer un processus vraiment très ancien afin qu’il présente un intérêt pour le secteur minier du XXIe siècle. »

À la fin des deux années, indiquait-il, les chercheurs auront entre les mains une validation de principe reposant sur une banque de données d’échantillons, l’analyse de tous les microbes présents dans les échantillons, et leurs codes génétiques. Ils pourront aussi identifier les séquences génomiques à l’aide d’un éventail de fonctions.

Selon lui, c’est un point de départ qui permettra à d’autres sociétés d’enrichir cette banque de données.

« Ce sera un peu comme ces petites bibliothèques de rue. On commence par quelques livres, puis petit à petit, chacun en ajoute un. Au fil du temps, on se retrouve avec une vaste collection d’ouvrages », déclarait-il. « Cette collection s’enrichira et, au fil du temps, elle deviendra plus puissante en tant que plateforme pour les nouvelles technologies. Les deux premières années marquent juste le début de cette aventure. »

Cette technologie ouvrira également la voie à la création de pratiques minières plus respectueuses de l’environnement. Le projet MMAP sera présenté par la supergrappe comme « un catalyseur des pratiques minières durables à l’échelle mondiale ».

« Notre supergrappe s’intéresse au développement, à l’utilisation et à l’extrapolation des solutions numériques aux grands problèmes mondiaux », déclarait Sue Paish, directrice générale de la supergrappe des technologies numériques du Canada. « L’un des grands problèmes que nous rencontrons actuellement à l’échelle mondiale porte sur la réduction de l’impact environnemental de notre secteur des ressources naturelles, tout en [développant] en parallèle une meilleure concurrence mondiale pour notre secteur minier, en nous assurant que nous aidons le Canada à atteindre ses objectifs de neutralité carbone et de décarbonation. »

Comme l’expliquait Mme Paish, les grandes sociétés minières telles que Teck Resources et Rio Tinto sont parfaitement conscientes que la réduction de l’impact environnemental du secteur minier est une priorité pour le Canada. Le projet MMAP confère à ces sociétés une autre voie pour poursuivre leurs objectifs en matière d’environnement.

« Ce projet va changer la donne, à l’échelle mondiale », indiquait-elle. « Cette technologie permettra de réduire l’utilisation de produits chimiques et potentiellement dangereux pour l’environnement auxquels le secteur minier et le processus d’extraction ont actuellement recours. Elle exploitera les renseignements que nous accumulons à partir de l’analyse du génome et autre matériel génétique dans les gisements de minerai et autour d’eux, afin… d’accélérer l’extraction. »

Elle ajoutait que ce projet pourrait transformer le secteur minier, qui dépend fortement des produits chimiques dans le processus d’extraction, pour en faire un secteur utilisant le microbiome du sol dans les gisements et autour d’eux pour faciliter l’extraction.

« De fait, ce projet va concrètement aider le Canada et l’industrie canadienne à se hisser à la première place du podium, de la même manière que nous nous battons pour atteindre cette première place dans des événements sportifs internationaux », concluait-elle. « En tant que Canadiennes et Canadiens, efforçons-nous d’occuper la première place du podium pour des travaux industriels innovants. Soyons fiers des travaux de nos chercheurs, de nos innovateurs et de nos chefs de file de l’industrie. »

Traduit par Karen Rolland