Les sociétés minières se tournent de plus en plus vers des solutions d’énergie de rechange afin de réduire le coût du carburant et les émissions de gaz à effet de serre (GES) sur leurs sites et assurer leur acceptabilité sociale. Ce mouvement coïncide avec une année record pour l’adoption de l’énergie renouvelable et l’augmentation de la volonté politique de combattre les changements climatiques, comme ont pu le constater les délégués au Congrès international de l’énergie et des mines à la fin novembre.
« Quelle époque formidable pour l’énergie renouvelable dans les mines », s’est réjouie la directrice du Congrès sur l’énergie et les mines Adrienne Baker lors de son discours d’ouverture. « Avec une capacité installée de 943 mégawatts d’énergie éolienne et solaire alimentant désormais des mines partout dans le monde, nous nous rapprochons d’une énergie durable à faible teneur en carbone. »
Le congrès, qui a eu lieu les 21 et 22 novembre à Toronto, a souligné les réussites des projets renouvelables sur les sites miniers ainsi que les projets en voie de construction et a examiné les progrès liés à l’adoption de l’énergie renouvelable autour du monde, tout en mettant l’accent sur les défis clés relativement à son utilisation à grande échelle dans le secteur minier.
L’énergie renouvelable a connu une « année record » en 2015, a affirmé Heymi Bahar, analyste des marchés énergétiques renouvelables à l’Agence internationale de l’énergie (AIE), lors de sa présentation sur les tendances énergétiques mondiales. En effet, les capacités énergétiques renouvelables installées en 2015 ont surpassé la capacité installée des combustibles fossiles pour la toute première fois. « À l’avenir [l’énergie renouvelable] pourrait surpasser [le charbon en matière de] production aussi », a-t-il indiqué.
L’AIE a également mis à jour ses prévisions en matière d’investissements dans l’énergie renouvelable par pays, estimant que de 2015 à 2021, les investissements des États-Unis dépasseraient ceux de l’Union européenne, une autre première, même si M. Bahar a concédé que les prévisions de l’agence n’avaient pas tenu compte d’un gouvernement Trump favorable au charbon.
Les présentateurs et délégués au congrès, tenu deux semaines seulement après les élections américaines, avaient M. Trump à l’esprit, et beaucoup d’entre eux se demandaient comment ses politiques énergétiques influenceraient l’adoption de l’énergie renouvelable et les initiatives d’atténuation des changements climatiques, comme les taxes sur le carbone.
Les projets énergétiques abordés au cours de la conférence soulignaient à quel point les mentalités ont changé depuis le premier Congrès sur l’énergie et les mines en 2013. Alors qu’à l’époque le scepticisme était de mise quant à la possibilité d’utiliser l’énergie solaire et éolienne sur les sites miniers, les présentateurs de cette année avaient des objectifs beaucoup plus ambitieux.
La mine Musselwhite de Goldcorp dans le nord de l’Ontario a éliminé le besoin de produire du diesel supplémentaire sur deux ans et réduit son utilisation du réseau, coupant ses émissions de GES de 20 000 tonnes de CO2 par année, tout en améliorant l’efficacité énergétique de la mine. Selon Howard Boland, le coordonnateur électrique de la mine Musselwhite, le site travaille désormais à l’électrification de son parc de véhicules en vue d’éliminer complètement le recours au diesel. Mentionnant le projet de métaux des terres rares de Nechalacho d’Avalon Advanced Materials dans les Territoires du Nord-Ouest, le chef de la direction Donald Bubar a affirmé que l’entreprise a installé deux modules solaires de 170 watts (W) responsables de 20 % du mélange énergétique du camp, ce qui nous incite à penser qu’elle est la première société minière d’exploration à le faire.
Stephen Letwin, le chef de la direction d’Iamgold, a quant à lui discuté des plans de son entreprise pour construire une centrale solaire de 15 mégawatts (MW) à sa mine d’Essakane au Burkina Faso afin d’alimenter la mine en conjonction avec la centrale thermique de 57 MW. Les besoins énergétiques du site ont augmenté au cours des quatre dernières années, la majorité de la roche tendre ayant été minée et la proportion de roche dure s’approchant de 100 %. La centrale solaire compterait pour 8 à 9 % de l’énergie globale produite au site et permettrait d’économiser 6 millions de litres de carburant par année.
Alors qu’Iamgold a construit la centrale solaire de 5 MW à sa mine de Rosebel, au Suriname, à l’interne, la réalisation d’un projet trois fois plus gros a nécessité le recrutement d’un partenaire qui construira, possédera, exploitera et financera le projet. Iamgold achètera l’énergie de la centrale pendant 15 ans, mais aura l’option de mettre fin à l’accord d’achat d’énergie après neuf ans. La centrale disposera d’un système de gestion de l’énergie automatisé qui optimisera l’utilisation de l’énergie solaire, et l’entreprise envisage des batteries pour stocker l’énergie. « La capacité de stocker de l’énergie solaire sera révolutionnaire », a affirmé M. Letwin.
On a parlé de la technologie de stockage comme étant un défi persistant relativement à l’utilisation à grande échelle d’énergie renouvelable sur les sites miniers, les présentateurs mentionnant qu’elle est toujours relativement récente et que son prix, dans la plupart des cas, est prohibitif. « Il y a toujours des inquiétudes au sujet de la réalité de la "diminution des coûts" et de sa concrétisation », a expliqué Cosmin Laslau, un analyste chez Lux Research qui se penche sur le stockage d’énergie, la production décentralisée et l’énergie solaire. « On peut encore facilement payer 1 000 $ ou plus par kilowattheure (kWh) pour le stockage. » M. Laslau s’attend à ce que les projets de batteries commencent à présenter un intérêt économique à compter de 500 $ le kWh, soit autour de 2020 ou plus tard.
Souvent mentionnée par le passé, l’incompatibilité entre la durée de vie prévue d’une mine et la vie comparativement plus longue d’une centrale éolienne ou solaire peut représenter un autre obstacle clé à l’adoption de l’énergie renouvelable par les sociétés minières Or, des accords d’achat d’énergie créatifs à court terme sont peut-être en train de changer la donne.
Nick Boyle, chef de la direction de la société d’énergie renouvelable Lightsource, a souligné la nouvelle stratégie de l’entreprise pour les sociétés minières : la signature d’accords d’achat d’énergie d’une durée aussi courte que cinq ans et la construction de centrales solaires qu’on peut déménager vers d’autres projets lorsque la société n’en a plus besoin. Mais plus la durée de l’accord d’achat d’énergie est longue, « plus le prix sera abordable », a-t-il ajouté. « Si on est en mesure de signer un accord d’achat d’énergie de 25 à 30 ans, on profitera de prix incroyables. »
Traduit par CNW
Un rapport de l'organisation des Nations Unies met en lumière le rôle des sociétés minières dans les efforts de développement durable
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