Le déficit du fonds consacré à la réhabilitation des sites miniers accordé par le ministère des mines de Colombie-Britannique est majoritairement attribuable aux mines qui requerront un traitement des eaux à long terme, dont fait notamment partie le projet d'exploitation du charbon Elk Valley de Teck. Avec l'aimable autorisation de Teck Resources

Un audit publié en mai par le bureau de l'auditrice générale de la province montre que la « mise en application des lois » ne s'inscrit pas dans la culture du ministère des mines de Colombie-Britannique (C.-B.). Dans un communiqué de presse annonçant la publication du rapport, l'auditrice générale Carol Bellringer indiquait que « presque aucune de nos attentes concernant l'élaboration d'un programme solide de conformité et d'exécution des lois n'ont été respectées ». Le rapport examinait les activités des ministères de l'énergie et des mines (MEM) ainsi que de l'environnement.

Il montrait que le MEM courait le risque d'une captation de la réglementation (lorsqu'un organisme de réglementation soutient l'industrie qu'il réglemente aux dépens de l'intérêt du public) et recommandait que les activités de conformité et d'exécution des lois soient retirées du ministère. L'audit conseillait que ces tâches soient plutôt gouvernées par une unité indépendante.

Cette recommandation était la seule que le gouvernement n'a pas approuvée sans équivoque. « Cette recommandation suggère que les fonctionnaires du MEM sont incapables de faire la différence entre la promotion et la réglementation de l'exploitation minière, une opinion que le gouvernement ne partage pas », déclarait les représentants des ministères de l'environnement et des mines dans une réponse conjointe au rapport. « Nous réfutons que de simples apparences suffisent à justifier que les activités de conformité et d'exécution des lois soient retirées du MEM. »

Le communiqué de presse indiquait néanmoins que le MEM créera un comité distinct dans les trois mois à venir afin de « renforcer la supervision réglementaire du secteur minier par le gouvernement » et comblera ainsi le fossé entre les ministères des mines et de l'environnement et l'agence provinciale de l'évaluation de l'environnement.

« Globalement, cette recommandation marque selon nous la base d'un programme solide », déclarait Morris Sydor, vérificateur général adjoint pour la province. Il indiquait que d'autres provinces ont identifié la captation de la réglementation comme un problème après des catastrophes affectant l'environnement et la sécurité, notamment la Nouvelle-Écosse après l'enquête de 1997 sur la catastrophe à la mine Westray, laquelle a mené à la création de la loi sur les mines souterraines de la province en 2003 (de nouveau révisée en 2008).

M. Sydor espère que le rapport sera présenté aux législateurs de manière à ce que le ministère puisse expliquer la raison pour laquelle il décide « d'adopter une voie différente ». David Haslam, porte-parole du MEM, indiquait que le ministère n'est pas d'avis que ses régimes de conformité et d'exécution des lois représentent un quelconque danger pour l'environnement (le gouvernement a accepté les 17 recommandations supplémentaires).

Le rapport portait également sur un déficit estimé à 1,2 milliard $ dans le fonds dédié à couvrir les futurs coûts de réhabilitation des sites miniers. La loi sur les mines de la province exige des sociétés minières qu'elles donnent au gouvernement un dépôt de garantie complet ou partiel basé sur des calculs de la dette provisionnée de manière à s'assurer que la province ne se retrouve pas financièrement responsable des futurs coûts de réhabilitation du terrain (ce sont des « décideurs prévus par la loi », et non pas le ministère, qui établiront le montant des garanties exigées pour chaque mine, expliquait M. Haslam. Le ministère pourra examiner et modifier les montants le cas échéant). De nombreuses sociétés minières n'ont cependant pas mis de côté de garantie suffisante pour couvrir les dettes provisionnées.

« Au vu de l'augmentation des risques [environnementaux], on peut ne pas être conscient lors de la conception d'une mine que l'on aura besoin de construire une usine de traitement de l'eau dix ans plus tard », expliquait Tanya Wood, auditrice de performance. S'il s'avère finalement nécessaire de construire une telle usine, le ministère devra réévaluer le montant de la dette provisionnée. « Réclamer cette somme à la mine plus tard peut se révéler complexe », indiquait-elle.

Le 18 mai dernier, le quotidien Vancouver Sun a publié une liste détaillée des sociétés qui contribuent au déficit du fonds de réhabilitation des sites miniers évalués dans l'audit et présentent des dépôts de garantie en souffrance. Cette liste identifiait notamment le projet d'exploitation du charbon Elk Valley de Teck Resources comme l'un des principaux responsables de ce déficit, affichant un écart entre la couverture des dettes provisionnées estimées et réelles de plus de 500 millions $. La mine Highland Valley Copper de Teck et le projet aurifère Eskay Creek de Barrick présentaient également des écarts importants, respectivement plus de 186 millions $ et 114 millions $. Plus de la moitié des sites apparaissant dans la liste n'affichaient aucun déficit ; de nombreux déficits n'atteignaient pas la barre des 1 million $.

D'après Andy Lloyd, vice-président principal des communications chez Barrick, la société disposera de fonds suffisants pour couvrir les coûts de fermeture de sa mine Eskay Creek, et les sommes nécessaires ont déjà été mises de côté. « Nous disposons d'environ 114 millions $ réservés aux charges estimatives nécessaires à l'assainissement de l'environnement pour les sites désaffectés », indiquait-il. « Nous continuons de financer ces activités de façon régulière. »

« Barrick dispose de suffisamment de liquidités pour couvrir toutes ses obligations, et bien entendu nos obligations en termes de fermeture des sites ; nos résultats sont bons. »

Les mines qui requerront un traitement de l'eau, dont Elk Valley, sont responsables du déficit de 730 millions $. « Il est contraire à la politique du MEM de réclamer une garantie totale pour des mines qui nécessitent un traitement de l'eau sur le long terme », pouvait-on lire dans l'audit.

M. Haslam indiquait que le MEM a augmenté ses garanties relatives à la réhabilitation des sites miniers ; depuis 2011, les sommes requises ont doublé et, depuis 2001, elles ont quadruplé.

Le gouvernement provincial mettait également l'accent sur les efforts déployés par Teck pour traiter le sélénium dans les eaux du site d'Elk Valley, précisant que la société s'est engagée à construire huit nouvelles installations de traitement de l'eau.

Le déficit dans les dettes provisionnées de Mount Polley a été estimé à un peu moins de 10,5 millions $. La rupture en août 2014 de la digue à résidus miniers à Mount Polley s'est trouvée au cœur du raisonnement de l'audit préconisant de retirer de la compétence du MEM les activités de conformité et d'exécution des lois.

« Nous avons constaté que le ministère ne s'était pas assuré que la digue à résidus miniers était construite ou exploitée conformément à la conception approuvée, ni ne s'était assuré que la société minière ait rectifié les défaillances au niveau de la conception ou opérationnelles », pouvait-on lire dans le rapport.

L'audit a également constaté que le MEM ne disposait pas de suffisamment de ressources humaines ou financières pour mener les inspections nécessaires. Le ministère a remis en question l'interprétation de l'audit de son rôle dans l'affaire Mount Polley, déclarant qu'« elle ne correspond pas » aux conclusions de la commission indépendante de Mount Polley ou d'Al Hoffman, inspecteur en chef des mines du gouvernement de la Colombie-Britannique.

Parmi les autres recommandations de l'audit figuraient des incitations à promouvoir une attitude responsable au sein des sociétés minières, la formulation de lignes directrices quant à la réhabilitation des sites miniers et la mise en application de nouvelles politiques de divulgation concernant les activités d'exécution des lois et les dépôts de garantie.

Il a fallu environ deux années pour terminer le rapport, et la phase d'évaluation a duré trois ans, de début 2012 à fin 2014.