International SOS a créé des cliniques d'urgence en Afrique de l'ouest semblables à celle présentée ci-dessus au Libéria | l'aimable autorisation de International SOS

Le virus Ebola est redoutable. Certaines victimes souffrent d'hémorragies interne et externe, et le taux de mortalité avoisine les 90 % ; aussi il est difficile d'imaginer pire scénario que celui de l'apparition d'une épidémie dans un camp minier reculé. Mais cette menace est pourtant une réalité pour les sociétés dont les activités sont basées en Afrique, et particulièrement en Afrique de l'ouest. Fin mars, le virus s'est déclaré dans le sud de la Guinée, s'est rapidement propagé vers le nord du pays, et en mai, s'était étendu au Libéria et à la Sierra Leone, où plusieurs personnes victimes de la maladie en Guinée ont été enterrées. Plus de 200 personnes ont succombé à la maladie.

Le Dr Sajjad Ahmed Gill a suivi de près cette épidémie. En tant que conseiller en matière de santé pour Tullow Oil, une société britannique de production et d'exploration de pétrole et de gaz présente sur tout le territoire d'Afrique de l'ouest, il est de sa responsabilité de protéger les travailleurs et les exploitations de la société de ces épidémies. Dans ce cas précis, il lui fallait constamment surveiller les pays environnants, et communiquer avec le personnel ainsi qu'avec un réseau d'organismes de l'industrie et du domaine de la santé. « De nombreuses rumeurs circulaient et il était difficile d'obtenir des informations précises », se souvient-il.

Se préparer au pire

« Les maladies infectieuses rencontrées en Afrique de l'ouest sont uniques ; on ne les trouve nulle part ailleurs dans le monde », explique M. Gill. « Toute société travaillant dans ces régions doit être bien consciente du risque que représentent ces maladies qui entourent ses exploitations et doit disposer d'un solide système de gestion des urgences pour parer aux éventuelles flambées épidémiques. »

Les premières lignes de défense consisteront à disposer d'une stratégie de prévention contre les maladies et d'un plan d'action d'urgence sanitaire. Une épidémie peut avoir un effet dévastateur sur l'exploitation, explique M. Gill, mais un plan solide permettra de réduire ce risque et donnera la possibilité à la société d'une part, de réagir rapidement et efficacement à une épidémie et d'autre part, de prendre davantage d'initiatives pour contrôler la propagation du virus.

Il faut déployer beaucoup d'efforts pour arriver à ce point et souvent faire appel à des experts en gestion des urgences médicales. Tullow Oil a fait appel aux services d'International SOS (ISOS), la plus grande société de services en matière de prévention médicale et de sécurité. « Nous proposons des interventions sur le plan médical et de la sécurité quel que soit le niveau du problème », explique Doug Quarry, directeur médical à ISOS. « Notre personnel médical est également à disposition, de même que l'infrastructure pour aider les sociétés dans leurs initiatives et aventures partout dans le monde, qu'il s'agisse de déléguer des médecins sur des plateformes pétrolières ou de gérer un hôpital complet de 40 lits. » Dans le cas de Tullow, ISOS l'a aidé à prendre des décisions concernant la planification des déplacements et a dispensé des conseils, mais n'a pas organisé les cliniques sur le terrain.

« Nos exploitations n'auront pas toutes besoin des mêmes installations », indique M. Gill. « Certaines régions disposent de cliniques bien équipées alors que dans d'autres, on ne trouvera que des secouristes. Cela dépend de nombreux facteurs, tels que le nombre de personnes sur le site, la probabilité de se blesser ou de tomber malade, la distance séparant le site de centres de santé fiables et le soutien disponible en cas d'urgences médicales dans la région. »

L'isolement, la durée et la superficie d'une exploitation sont des facteurs qui contribuent à déterminer l'ensemble des risques pour la santé. Parmi les autres facteurs figurent l'environnement local, les espèces sauvages, les maladies endémiques, ainsi que toute activité qui pourrait augmenter le risque d'exposition aux maladies et à des animaux infectés. Y contribuent notamment l'aménagement de terrain, la chasse au gibier sauvage, la mauvaise gestion des déchets et du stockage des aliments, ainsi que le manque d'hygiène et d'eau potable dans les communautés locales.

Sachez à quoi vous attendre

L'analyse des risques pour la santé commence bien avant le développement du projet et se poursuit tout au long des activités de construction, de production et de réhabilitation du terrain. « Nous commençons par visiter le site et identifions les maladies endémiques et la qualité des services médicaux aux alentours », explique M. Quarry. « Nous donnons ensuite au client un ensemble réaliste de suggestions concernant le type de services médicaux dont nous aurons besoin autour du site et la formation ou le soutien nécessaires aux employés du pays. »

Le virus Ebola est particulièrement contagieux et mortel ; la souche actuelle est la plus grave, avec un taux de mortalité atteignant 70 à 90 %. Il n'existe à ce jour aucun vaccin ou moyen d'en guérir. Il semblerait que le virus soit transmis par des chauves-souris, et les hommes le contractent après la chasse ou après avoir ingéré une chauve-souris infectée ou un animal sauvage lui-même infecté par la chauve-souris. Il se propage ensuite chez les hommes par contact avec des liquides corporels infectés. Il est difficile d'identifier une épidémie étant donné que les premiers symptômes sont semblables à des fièvres moins dangereuses. On peut également difficilement la suivre, car la période d'incubation peut atteindre 21 jours.

Le meilleur moyen de se défendre est souvent de déclencher une offensive, et les mesures de santé publique et le soutien apporté aux centres médicaux locaux constituent les éléments les plus efficaces sur lesquels il convient de se concentrer. « Dans la plupart des pays en développement, les centres de santé locaux sont relativement limités et le système de santé local requiert une aide externe », explique M. Gill. Des sociétés telles qu'ISOS peuvent offrir leur aide en proposant des programmes de vaccination et de contrôle du paludisme ainsi que des services de formation en matière de santé publique, qui sont importants pour un virus tel qu'Ebola car les personnes vivant dans des communautés isolées n'ont souvent pas idée de la façon dont se propage le virus.

La sécurité va à l'encontre des traditions [r1]

Certaines coutumes d'Afrique de l'ouest posent de graves problèmes au niveau de la façon de réduire la propagation du virus Ebola ; en effet, les rituels funéraires traditionnels consistent à laver le corps du défunt avant de l'enterrer. Ainsi, ISOS a développé une série de supports pédagogiques à l'intention des sociétés de ses clients, qui les distribuent à la population afin de les informer et de former son propre personnel.« Comprendre le fonctionnement de cette maladie permettra de mieux la gérer », explique M. Quarry. « La formation aussi est importante. »

Le risque pour les travailleurs étrangers est généralement faible, poursuit-il. « Le virus Ebola peut se contracter par un contact direct avec les liquides organiques d'une personne infectée, ce qui est bien plus probable lorsqu'un membre de votre famille est infecté, que vous vivez sous le même toit et que vous vous en occupez. Le plus grand risque concerne les habitants de la région ou du pays, et beaucoup moins les expatriés et les personnes en déplacement pour affaires. »

Cependant, les sociétés doivent être prêtes à agir si la maladie pose un risque pour ses exploitations. « La réponse dépend du niveau de risque », explique M. Gill. « Elle peut aller d'une interdiction de voyager à l'évacuation du personnel et la fermeture de l'exploitation. Les exploitants peuvent décider de réduire le personnel, de surveiller la main-d'œuvre de certaines régions et d'interrompre les activités sur le court ou le long terme. »

Tullow a pris d'importantes décisions opérationnelles pour la sécurité de son personnel. Les activités ont été rapidement modifiées afin de minimiser l'exposition du personnel de la société à tous les niveaux. En même temps, Tullow a contribué, aux côtés d'autres organisations internationales de santé, au traitement médical public.

Des efforts similaires ont été déployés par ArcelorMittal, qui détient une exploitation de minerai de fer au Libéria, à la frontière de la région la plus affectée du sud de la Guinée. ArcelorMittal a collaboré avec ISOS pour la création d'une clinique sur le site de l'exploitation. « Lorsque la crise a commencé, nous avons très rapidement réalisé le risque pour la clinique car il s'agit réellement de la meilleure clinique de la région », explique M. Quarry. « Les services médicaux de la région sont médiocres, aussi si des cas venaient à se déclarer, il est fort probable qu'on les amène à notre clinique. Mais elle n'est malheureusement pas prévue pour être un centre de santé publique ou un hôpital général. »

ISOS a fourni des supports pédagogiques à ArcelorMittal, qui les a utilisés pour former son personnel national. Une unité d'isolement a été développée à la clinique de la mine, et un équipement de protection individuelle a été fourni au personnel de la clinique et à celui de l'hôpital le plus proche ; en effet, les personnes travaillant dans le domaine de la santé font partie du groupe le plus exposé aux risques. Plus important encore, explique M. Quarry, ISOS a aussi envoyé sur place un médecin expérimenté d'Afrique du sud spécialisé dans les maladies infectieuses, qui a supervisé la modification de la clinique et la formation de son personnel de santé. Ce médecin s'est rendu dans d'autres hôpitaux nationaux pour aider à créer des unités d'isolement et à former le personnel à l'utilisation de l'équipement de protection individuelle (EPI) et à la propagation des maladies infectieuses. Il a en outre collaboré avec le ministère de la santé de Guinée pour définir une stratégie visant à endiguer le virus Ebola.

Traduit par Karen Rolland