La loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif est entrée en vigueur en juin l'année dernière, et impose aux sociétés minières ainsi qu'aux sociétés pétrolières et gazières d'une certaine taille cotées en bourse au Canada de déclarer les paiements faits à tout gouvernement au Canada et à l'étranger. Les règles et systèmes tels que celui-ci jouent un rôle important dans l'amélioration de la gouvernance de l'exploitation minière, dans les pays avancés tout autant que dans les pays en développement. La transparence permet d'éviter les codes et les contrats miniers problématiques, et les données ouvertes aident les parties prenantes des pays d'accueil à exiger une meilleure gestion de l'extraction des ressources naturelles.
Il est cependant surprenant de constater que l'attention de la société civile concernant les répercussions économiques de l'exploitation minière s'est jusqu'ici exclusivement concentrée sur le paiement des impôts. C'est un point certes important, mais ce n'est pas le seul, et ces paiements ne représentent pas les contributions économiques les plus conséquentes des exploitations minières aux économies des pays d'accueil.
Dans la plupart des cas, les sociétés dépensent en réalité plus d'argent dans l'acquisition de biens et services que dans les impôts, les salaires et l'investissement dans les collectivités réunis. Le World Gold Council (WGC, le conseil mondial de l'or) a mené une enquête auprès de 18 sociétés membres qui mènent des activités dans plus de 40 pays, et a constaté que l'acquisition au sein du pays où se trouve la société en 2013 représentait 71 % de toute la valeur économique distribuée dans les pays d'accueil par les sites des sociétés membres.
Ainsi, les sociétés minières doivent optimiser leurs stratégies d'acquisition au niveau local si l'on souhaite vraiment nous assurer que l'exploitation minière a un impact positif sur les économies des pays d'accueil, et pour que les sociétés minières obtiennent leur permis social d'exploitation.
Une bonne gestion des procédures telles que l'acquisition au niveau local requiert une bonne mesure. Depuis trois ans, l'initiative Valeur partagée en matière d'exploitation minière d'Ingénieurs sans frontières Canada veille à recueillir des informations quant à la façon dont le Canada et les plus grandes sociétés minières du monde divulguent leur acquisition de biens et services au niveau local. On a observé une hausse régulière du nombre de sociétés donnant davantage d'informations sur leurs programmes, ainsi que des statistiques qui montrent la part de leurs acquisitions profitant aux fournisseurs locaux. Kinross Gold, Anglo American et Cameco font partie des sociétés qui communiquent ces informations d'une manière qui permet à toutes les parties prenantes impliquées de prendre des décisions plus éclairées.
Si les sociétés communiquent davantage d'informations sur leurs acquisitions au niveau local, les parties prenantes locales pourront prendre des décisions plus éclairées quant à leur collaboration avec ces sociétés. Par exemple, si les sociétés minières partagent des informations concernant les divers programmes auxquels elles ont recours (l'expansion du réseau de fournisseurs par exemple), cela permet aux chambres de commerce, aux organisations non gouvernementales (ONG), aux instituts de formation et aux institutions financières de la région dont il est question de savoir comment ils peuvent soutenir ces programmes.
Une meilleure divulgation des volumes et des types de biens et services qu'une exploitation achète pourra aussi aider les gouvernements et les commerces locaux à s'orienter davantage sur ce qu'ils doivent fournir, plutôt que d'avoir à deviner dans quels secteurs ils doivent investir.
Il convient également de noter que la plupart des pays créant de nouveaux codes miniers incluent maintenant des réglementations sur le contenu local. En améliorant la communication, on pourra contribuer à l'engagement d'une société auprès des gouvernements sur ces nouveaux codes et éviter que les gouvernements imposent des exigences irréalistes et arbitraires. En mesurant mieux et en présentant la nature exacte de leurs acquisitions, les sociétés peuvent collaborer avec les gouvernements afin de créer des réglementations efficaces. Si les sociétés ne sont pas en mesure de prouver et d'expliquer les nuances de la source de leurs acquisitions, elles risquent de pousser les gouvernements à imposer des règles qui ne reflètent pas la réalité.
Malheureusement, nombre de sociétés ne communiquent pas leurs acquisitions au niveau local et sont relativement pauvres en termes de systèmes de gestion sophistiqués. En outre, même pour les sociétés qui s'appliquent à consigner leurs efforts d'acquisition au niveau local, il n'existe pas de mesures standard à leur disposition et nombreuses sont celles qui doivent réinventer la roue et créer leurs propres systèmes.
Pour résoudre ce problème, nous travaillons de concert avec l'organisation de développement allemande G.I.Z. afin de créer une norme à l'intention des sociétés minières leur permettant de communiquer leurs acquisitions de biens et services au niveau local. L'objectif de ce nouveau système est d'aider les sociétés à gérer leurs répercussions économiques à l'aide des indicateurs les plus performants de manière à prendre des décisions éclairées, et à aider les pays d'accueil à mieux comprendre comment ils peuvent collaborer avec les sociétés minières pour renforcer l'acquisition au niveau local.
Les sociétés minières et les gouvernements des pays d'accueil ainsi que les communautés avec lesquelles ils sont en relation ont besoin de mesures précises pour orienter leurs décisions. Ces systèmes de mesure doivent reproduire les nuances, responsabiliser les entités concernées et nous aider à comprendre comment les secteurs public et privé peuvent soutenir le développement inclusif.
Traduit par Karen Rolland
Jeff Geipel est un chef d'entreprise qui dirige l'initiative Valeur partagée en matière d'exploitation minière d'Ingénieurs sans frontières Canada.
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