Adam Matthews, directeur principal de l’investissement responsable de la Church of England Pensions Board. Avec l’aimable autorisation de Church of England Pensions Board

Les investisseurs militants ont beaucoup contribué à orienter l’industrie minière vers un avenir plus vert et plus durable, et Adam Matthews pourrait bien être le plus convaincant de tous. En tant que directeur principal de l’investissement responsable de la Church of England Pensions Board (la commission des pensions de l’Église anglicane), M. Matthews supervise des fonds de plus de six milliards de livres sterling et a pour mission de les investir d’une manière qui promeut la durabilité et les meilleures pratiques.

Après les ruptures de digues à stériles qui ont entraîné les catastrophes de Mariana en 2013 et de Brumadinho en 2019 au Brésil, il apparaît clairement que l’industrie minière pose un risque sérieux qui n’est pas abordé correctement, et qu’une intervention extérieure est nécessaire. « Honnêtement, j’ai eu l’impression que c’était une prise de conscience pour l’ensemble de la communauté de l’investissement responsable. Nous avons tout à coup compris que nous passions à côté d’une question fondamentale », déclarait M. Matthews. « C’est la raison pour laquelle notre intervention doit être très différente. Les investisseurs doivent prendre part au processus décisionnel… Nous devons travailler de manière constructive, pragmatique, mais avec un but, avec l’industrie jusqu’à ce que les enjeux soient réglés. »

Ces efforts se sont traduits par la création de l’Investor Mining and Tailings Initiative (IMTSI, l’initiative des investisseurs pour l’exploitation minière et les déchets) qui, aux côtés du conseil danois sur l’éthique, a permis de développer la Global Industry Standard on Tailings Management (la norme internationale de l’industrie sur la gestion des déchets) ainsi qu’un portail en ligne présentant les emplacements des parcs à résidus miniers partout dans le monde.

Toutefois, il ne faut pas se contenter de créer une norme. La mise en application est parfois nécessaire. En janvier 2022, l’IMTSI indiquait son intention de voter contre les présidents des conseils d’administration des grandes entreprises qui ne s’étaient pas engagées à respecter la norme de l’initiative (ou son équivalent). Représentant 100 investisseurs contrôlant plus de 20 billions de dollars américains d’actifs sous gestion, cet avertissement n’était pas vide de sens.

« Plusieurs sociétés nous ont contactés pour confirmer qu’elles étudiaient les possibilités afin d’appliquer la norme et de l’évaluer. C’était donc un renforcement utile pour eux, car les investisseurs prennent ce sujet très au sérieux et s’attendent à ce que les sociétés soient réactives. Nous avons aussi été informés de plusieurs autres fonds qui intègrent également une approche similaire dans leurs votes. Nous voterons par ailleurs contre quelques sociétés lors de leurs AGA respectives », indiquait M. Matthews. « Toutefois, nous pensons qu’il a été très utile de rappeler aux sociétés ne nous ayant pas répondu que les investisseurs ont l’intention de s’assurer que cette norme devienne officielle et soit adoptée. »

D’après M. Matthews, il ne faut pas voir cette initiative comme une tentative de punir l’industrie minière, mais au contraire comme un exemple de la façon dont les investisseurs peuvent activement contribuer à améliorer l’industrie globalement. « Nous avons un rôle très différent à jouer. Nous devons nous éloigner du type de dialogues d’une société individuelle et nous rapprocher d’une sorte d’assurance intersectorielle selon laquelle l’ensemble de l’industrie agit en suivant des normes de meilleures pratiques », ajoutait-il. « [Pour être] clair, il existe dans l’industrie minière des bonnes pratiques. Il ne s’agit pas de saper cette industrie, mais plutôt de collaborer de manière constructive tout en restant vigilants afin de faire face aux défis. »