Jean-Philippe Paiement. Avec l’aimable autorisation de VRIFY
Jean-Philippe (JP) Paiement et ses collègues de l’époque à SGS Geostat ont passé des mois à développer un modèle géologique pour le concours Ruée vers l’or de 2016 d’Integra. Leur avantage résidait dans le domaine émergent de l’apprentissage automatique. Ils se sont basés sur un algorithme d’apprentissage automatique pour traiter le vaste corpus de données géologiques d’Integra.
L’algorithme a validé les mêmes cibles d’exploration que M. Paiement et ses collègues avaient identifiées, et en a sélectionné quelques-unes supplémentaires auxquelles ils n’avaient pas pensé. Leur proposition leur a valu de remporter le concours ainsi qu’un prix de 500 000 dollars. Toutefois, leur véritable victoire était d’être parvenus à mettre en avant une application potentiellement puissante de l’intelligence artificielle (IA) pour l’industrie.
Une décennie plus tard, M. Paiement, pour qui le concours Ruée vers l’or constituait une première expérience avec l’IA, est devenu un important défenseur de l’adoption de l’IA dans les sciences de la Terre. « Nous avons besoin de grands efforts pour évoluer. Cette industrie ne changera pas par sa seule bonne volonté », déclarait-il. « J’essaie d’être un catalyseur du changement. »
À VRIFY, où il a rejoint l’équipe de l’ancien directeur général d’Integra Steve de Jong, M. Paiement dirige le développement de l’offre technologique croissante de la société, notamment de DORA, sa plateforme de découverte minérale assistée par l’IA.
Lancée au congrès de la Prospectors and Developers Association of Canada (PDAC, l’association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs), DORA se sert de modèles d’apprentissage profond pour identifier de possibles domaines de minéralisation. La plateforme est formée selon une association de données spécifiques à chaque site de la société, telles que des levés géophysiques, des cartes géochimiques et la géochimie des sols, et d’une banque de données propriétaire plus vaste constituée de sources de données publiques et de données de clients anonymisées. À ce jour, DORA a été formée sur une vaste gamme de types de gisements et de matières premières. L’or est le plus courant, avec environ 43 000 exemples de formation au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande.
Si une société présente des conditions au sol très spécifiques, ou une matière première sur laquelle DORA n’a pas encore été préformée, M. Paiement expliquait que les nouveaux modèles peuvent devenir « très performants dans la prévision pour cette localisation, mais pas si performants pour la généralisation. À mesure que l’on ajoute des données, la précision diminuera légèrement car elle obtient des informations conflictuelles à différencier. Toutefois, la précision commence à remonter lorsque le modèle généralise ses connaissances. »
Comme l’expliquait M. Paiement, il a toujours été difficile de vendre l’adoption d’une approche axée sur les données aux spécialistes, qui interprètent les indices de surface et font des déductions concernant ce qui se trouve en souterrain. Toutefois, ajoutait-il, l’IA a le potentiel d’identifier des cibles d’exploration que les géologues pourraient manquer, soit parce que les sociétés cloisonnaient leurs données jusqu’à présent, soit en raison de leurs biais cognitifs.
M. Paiement, qui a commencé sa carrière dans le camp d’Abitibi, au Québec, s’est par exemple habitué aux types de gisements de cette région. « Le [nouvel] environnement géologique peut présenter des subtilités qui rendent mes méthodes habituelles de guidage de l’exploration moins applicables ou fiables dans un autre lieu », expliquait-il. « L’ajustement demande du temps et une grande flexibilité. »
DORA arrive à un moment tout particulièrement opportun. Les modèles d’IA et les réseaux neuronaux sont devenus bien plus sophistiqués, d’une manière qui les rend « bien plus performants pour des problèmes de sciences de la Terre généralisés », indiquait-il. Simultanément, l’industrie se montre toujours plus ouverte à la technologie, particulièrement depuis que les applications de l’IA dans le domaine de la diagraphie et du balayage se montrent si utiles. Les sociétés sont donc soucieuses de découvrir de nouveaux gisements de minéraux critiques pour répondre à la demande mondiale insatiable.
C’est une évidence à VRIFY qui, d’après M. Paiement, compte déjà plus de 30 clients et en intègre deux ou trois nouveaux chaque mois.
La société a aussi clôturé son deuxième tour de financement (Série B) de 12,5 millions de dollars en février, dirigé par l’entreprise de capital-risque LGVP. Les fonds aident l’équipe de VRIFY à poursuivre le développement d’algorithmes personnalisés pour l’industrie (actuellement, l’équipe adapte des modèles à l’imagerie médicale du fait de leur capacité à voir au travers de multiples couches de données), et à automatiser le processus d’ingestion de données afin de simplifier ce processus et de le mettre à l’échelle plus efficacement.
Traduit par Karen Rolland