Avec l’aimable autorisation de Samantha Espley

Samantha Espley, présidente de l’ICM pour l’année 2020-2021, a pris les rênes de l’institut en mai. Elle a travaillé la majeure partie de sa carrière à Sudbury ; après 30 ans chez Vale, elle a terminé son parcours professionnel en tant que directrice de la technologie et de l’innovation minières avant de prendre sa retraite en octobre 2019. Durant sa carrière, Mme Espley a gravi les échelons et a occupé des postes de direction dans les domaines du génie, des services techniques de la mine, ainsi que de l’exploitation et de la technologie minières et de broyage. Fervente défenseur du secteur minier canadien, elle est très présente au sein de la communauté minière de Sudbury.

L’ICM : Quelle est la seule et unique grande qualité que vous recherchez chez un jeune talent ?

Mme Espley : J’aime les personnes entreprenantes, en raison des complexités que cela implique en termes de courage, de connaissance de soi et de confiance ; c’est une qualité que je recherche. Les [différentes perspectives apportées par les employés] commencent à être plébiscitées sur le lieu de travail et applaudies. Quand je pense à certains des jeunes ingénieurs en formation dans mon équipe, je suis fière de les voir saisir une occasion et la transformer en une action concrète.

L’ICM : Quelle qualité professionnelle a été pour vous la plus complexe à acquérir, mais également la plus valorisante ?

Mme Espley : L’une des choses que j’ai dû apprendre, probablement à mes dépens, est de développer mon bon sens politique. Il existe des hiérarchies et des voies à respecter ; je [débordais] d’initiative à mon arrivée dans cette industrie et lorsque je commençais un nouveau projet, je n’obéissais pas forcément à la hiérarchie et j’attribuais les tâches à des personnes qui ne travaillaient pas nécessairement sous mon autorité. Je n’avais pas qualité pour agir ainsi et je n’avais pas vraiment reçu d’instructions. Personne ne me disait si c’était une bonne idée, ou s’il était préférable que j’adopte une voie différente. J’ai froissé quelques personnes, puis on m’a remis dans le droit chemin. Il m’aurait été utile de faire preuve d’un minimum de prévoyance ou de recevoir des instructions, ou encore que quelqu’un me guide dans ce bourbier ; de fait, avec les grandes organisations et pour beaucoup de mines, il m’aurait fallu posséder un brin de bon sens politique pour essayer d’obtenir des informations. [Cet apprentissage] m’a porté tout au long de ma carrière et m’a beaucoup aidé lorsque je devais faire la liaison en interne et avec d’autres organisations.

L’ICM : Certains pensent que l’échec est un tremplin vers la réussite. En quoi l’échec a-t-il façonné votre réussite ?

Mme Espley : J’ai toujours eu en tête de travailler dans la production, et j’y suis parvenue. Quand j’ai commencé à travailler dans ce domaine, je rêvais d’occuper un jour un poste de direction. J’ai déposé ma candidature pour un poste que je n’ai pas obtenu, à la grande surprise de beaucoup car on m’y préparait. J’étais dévastée ; j’ai touché le fond, et j’ai dû réévaluer mes capacités. Peu de temps après, une occasion s’est présentée pour un poste à peu près semblable au sein de l’équipe d’ingénieurs, mais qui concernait un tout nouveau projet colossal, l’un de nos projets de plusieurs milliards de dollars à Vale. Je me suis alors engagée dans une toute nouvelle voie. Il n’était plus uniquement question d’exploitation minière souterraine ; j’ai découvert les treuils et les chevalements. J’ai vraiment pris un tout autre chemin, et je ne regrette rien. Avec du recul, cela m’a été d’un grand secours. J’ai eu énormément de chance d’avoir pu saisir toutes ces occasions.

L’ICM : Quel est le meilleur investissement que vous ayez fait durant votre carrière ?

Mme Espley : Mon plus grand investissement n’a rien à voir avec ma carrière. Dans ma vie professionnelle, je [consacre] du temps et toute mon attention [à] mon travail ; en dehors du travail, je profite de ma famille bien évidemment, mais je passe aussi beaucoup de temps avec la communauté minière. J’ai accordé beaucoup de temps aux conseils d’administration de Science Nord, beaucoup de temps à l’université Laurentienne, ainsi qu’à l’ICM. J’ai fait mes premiers pas au sein de l’ICM il y a une trentaine d’années. Un jour, l’un des directeurs m’a dit que l’ICM était à la recherche d’une personne pouvant s’occuper de l’audiovisuel dans la section de Sudbury. Il m’a demandé si cela m’intéressait, et j’ai tout de suite accepté. Je suis tombée amoureuse de cette organisation ; j’aime son énergie, les différentes discussions que l’on a avec tous ces gens qui viennent nous rencontrer pour nous raconter leur histoire. Je n’ai jamais quitté l’ICM depuis et je suis ravie de faire partie de cette grande famille qu’est l’industrie minière canadienne. J’ai du mal à croire [que j’ai été nommée présidente de l’ICM], je ne l’aurais jamais envisagé. Je suis littéralement tombée de mon siège quand le [président sortant de l’ICM] Michael Winship m’a demandé s’il pouvait envoyer ma candidature. C’est un véritable honneur et j’ai hâte de prendre les rênes de l’ICM.

L’ICM : Si vous pouviez revenir sur une décision que vous avez prise durant votre carrière, quelle serait-elle ?

Mme Espley : Je ne regrette rien. J’ai passé beaucoup de temps à Sudbury comme représentante d’une société unique. Je suis fière d’y avoir travaillé pendant 30 ans. Les opportunités vont sans doute être très différentes pour la prochaine génération. Si tout était à refaire aujourd’hui et si j’avais leur âge, je me mettrais à la recherche de débouchés possibles dans plusieurs sociétés et dans différentes régions du monde afin de réellement me développer en tant que personne et d’approfondir mes connaissances.

L’ICM : Vous venez d’annoncer votre départ à la retraite. Quels sont vos projets ?

Mme Espley : Lorsque j’ai rejoint Vale, je savais que 2020 serait sans doute ma dernière année. Aujourd’hui, j’étudie mes options. Je m’implique beaucoup dans les activités de mentorat et de sensibilisation des ingénieurs des mines, et dispense mes conseils en génie pour la création de meilleures conceptions, plus futuristes. [J’aimerais] participer davantage au développement de programmes dans les universités et les établissements d’enseignement supérieur pour [les axer] davantage sur les besoins de l’industrie, pour aider les étudiants à être davantage préparés à l’ère du numérique, car elle est bel et bien là. Nous devons changer et adapter le programme universitaire afin qu’il soit plus proche de la réalité des mines de demain. Du côté de l’industrie, nous devons fournir des feuilles de route techniques. Lorsque je travaillais à Vale, j’avais envisagé cette idée avec l’université Laurentienne. Dernièrement, je m’entretenais avec l’université de l’Alberta quant à la façon dont on pouvait changer le contenu relatif à la sécurité et l’orienter davantage sur les efforts de l’industrie vers l’objectif zéro blessure, ainsi que sur ses percées au niveau des performances en matière de sécurité. Nous avons besoin d’étudiants et d’ingénieurs axés sur ce genre de raisonnement.

L’ICM : Quel conseil donneriez-vous à un(e) étudiant(e) plein(e) d’ambition commençant une carrière dans ce secteur ?

Mme Espley : Trouvez des mentors. Pas nécessairement au sein de votre société, [tournez-vous] vers quelqu’un que vous admirez. J’ai vécu une expérience intéressante lorsqu’on m’a demandé d’être le mentor d’un dirigeant de l’hôpital Horizon Santé-Nord à Sudbury. Aussi improbable que cela puisse paraître, cette relation entre un mentor de l’industrie minière et un mentoré du domaine de la santé a été mutuellement très enrichissante. [Les jeunes] doivent penser différemment et s’intéresser à divers secteurs, à différentes personnes, ne serait-ce que pour six mois ou le temps d’un café. Ne vous reposez pas sur vos lauriers et n’attendez pas que quelqu’un s’occupe de votre carrière à votre place ; rapprochez-vous des personnes qui peuvent vous aider. Je me connais ; si quelqu’un me propose d’aller boire un café, je ne vais pas refuser. Cela me touche beaucoup. Ne pensez pas que vous importunez cette personne. Au contraire, elle sera sans doute très heureuse de vous aider et de vous donner des conseils.

Traduit par Karen Rolland