Au cours de l’année qui s’est écoulée, durant laquelle j’ai exercé la fonction de président de l’ICM, j’ai eu le privilège de participer à diverses conversations avec des chefs de file de notre industrie. Lors de ces conversations, je leur ai demandé quelles étaient les plus grandes difficultés qu’ils rencontraient. Toutes et tous m’ont répondu, invariablement, que la difficulté numéro un concernait la disponibilité des talents.
Ceci ne surprendra sans aucun doute pas des lecteurs de ce magazine. Les indices sont partout, et ne se limitent pas aux professionnels du domaine technique. Ils couvrent le cycle de vie intégral de la production des métaux, depuis les foreurs sur le front de l’exploration jusqu’aux techniciens dans les concentrateurs et les affineries. Ces indices sont étayés par les recherches menées par le conseil des ressources humaines de l’industrie minière (RHiM), lequel s’intéresse à 70 « professions sélectionnées » que l’on considère comme les plus pertinentes pour l’industrie minière. Dans son étude de 2019 sur le marché du travail, les sociétés canadiennes indiquaient que 1 820 postes étaient à pourvoir dans ces catégories sur le territoire canadien. Au vu de l’activité de l’industrie et de la demande croissante en métaux nécessaires à la décarbonation, ce chiffre a probablement augmenté. Le RHiM suit également de près le taux d’inscription dans les universités canadiennes dans les disciplines du génie indispensables à l’industrie (génie métallurgique, génie minier, géologie appliquée). Ces cinq dernières années, ces trois disciplines ont enregistré un déclin important du nombre d’inscriptions, et la tendance négative se poursuit.
Ce déclin continu des inscriptions à des disciplines relatives à l’industrie minière se poursuit et ce, malgré les millions de dollars que l’industrie investit dans la communication des répercussions positives de l’industrie minière afin d’attirer des étudiants. Tous les instituts et les associations de l’industrie minière du Canada et du monde entier ont mis en œuvre des programmes promouvant l’industrie minière auprès des étudiants et de la société dans son ensemble. De manière générale, ces programmes n’ont pas entraîné de changements.
Mon opinion, qui est, j’en conviens, controversé, est que le terme « mines » ne reflète pas nos actions, et se rapporte à un secteur dont la réputation est trop entachée pour pouvoir être sauvée. Les perceptions qui découlent de l’héritage du passé, associées aux émissions de téléréalité modernes qui présentent l’industrie minière comme un secteur obsolète et sale, rendent pratiquement impossible l’évolution positive de la société à son égard. Nos infographies sur le nombre de métaux que l’on trouve dans un téléphone portable ou une voiture électrique ne semblent pas trouver écho auprès du public. Le temps est-il venu de changer de nom ?
Prenons pour commencer la définition de « l’exploitation minière » que propose le dictionnaire Cambridge. Il la décrit comme « une activité consistant à extraire des substances telles que le charbon ou le métal en creusant le sol ». Est-ce réellement ce que l’on fait ? Les promoteurs immobiliers, les constructeurs de routes, les entrepreneurs chargés de la construction de tunnels extraient tous des substances en creusant le sol. Se qualifient-ils pour autant d’exploitants miniers ?
Prenons maintenant la définition de « valorisation de la marque ». Selon Cambridge, c’est « une activité consistant à relier un produit à un nom ou un symbole spécifique, etc. ou à des caractéristiques ou idées particulières, afin que le public le reconnaisse et décide de l’acheter ». La valorisation de la marque aide à façonner les perceptions qu’a le public des sociétés, de leurs produits ou des personnes qui la représentent.
La marque de l’exploitation minière est liée à l’excavation et à l’abattage à l’explosif des berges du fleuve Yukon à la recherche d’or. Qui veut acheter une telle marque ? Pas moi.
La réalité est que nous sommes une industrie qui développe et utilise une technologie de pointe à la recherche de minéraux et de métaux, et pour leur production. Nous utilisons des géoradars, la résonance magnétique, l’intelligence artificielle, des microscopes électroniques à balayage, des Lidar (systèmes de détection et télémétrie par ondes lumineuses), la fluorescence des rayons X, des modèles mathématiques et financiers complexes, le génie biologique et des logiciels de conceptions en 3D, pour n’en citer que quelques-unes. Par ailleurs, nous construisons et exploitons certaines des machines les plus puissantes de la planète, et nous mettons en œuvre des projets complexes de plusieurs milliards de dollars dans les environnements les plus austères de la planète.
Nous faisons tout cela dans le but de produire les minéraux dont la société a besoin pour cultiver les aliments et les métaux nécessaires au maintien du mode de vie moderne, notamment ceux nécessaires à la décarbonation de notre économie, dans une course contre le changement climatique. Si nous voulons attirer la main-d’œuvre de demain, nous devons revaloriser notre marque et nous présenter en tant que producteurs haute technologie de minéraux et de métaux.
Cette action simple ne résoudra pas tous nos problèmes, certes. C’est toutefois une étape nécessaire, à mon avis, pour modifier les perceptions et rendre notre industrie plus positive et attrayante.
P.S. : cette note est la dernière que j’écris en tant que président de l’ICM, aussi je tiens à remercier les membres exceptionnels du personnel de l’ICM. Malgré les difficultés sans précédent que la pandémie a engendrées pour l’institut, l’équipe a persévéré avec une passion, des compétences et un professionnalisme à parts égales afin d’assurer la continuation de cette institution canadienne exceptionnelle.
Traduit par Karen Rolland