Vic Pakalnis

Nous connaissons maintenant le taux d'accidents dans les mines de l'Ontario pour l'année 2016. Le ministre du travail Kevin Flynn annonçait début janvier que la province n'en affichait aucun ! C'est un exploit remarquable. Quant au taux d'absences résultant de blessure (LTI, de l'anglais lost time injury) en 2015, il était de 0,63 pour 100 travailleurs. Au congrès de l'ICM 2016, le trophée John T. Ryan a été attribué à dix sociétés minières qui n'ont déclaré aucun accident et aucune LTI. Serait-ce le fruit du hasard ou cela reflète-t-il l'engagement de l'industrie minière envers la sécurité ? J'aurais tendance à pencher pour la deuxième option.

En 1976, l'Ontario affichait 19 accidents mortels, 12,5 LTI pour 100 travailleurs et un taux d'accidents qui se situait à 10,4 pour 100 travailleurs. Durant les 40 années qui ont suivies, l'industrie minière a entrepris des changements colossaux dans sa culture, sa technologie et ses réglementations.

La commission d'enquête parlementaire dédiée à la santé et la sécurité des travailleurs dans les mines, dirigée par le Dr James Ham, remaniait le 1er octobre 1979 la loi sur la santé et la sécurité au travail de l'Ontario. Elle introduisait le concept d'un système de responsabilité interne qui constituait le fondement de la loi et des systèmes de gestion de la sécurité encore en vigueur aujourd'hui. Elle souligne le rôle et les responsabilités clairs des parties en présence dans le milieu du travail ayant des obligations et une contribution directes envers la santé et la sécurité. Certains attribueront ces changements aux améliorations en matière de technologie. Par exemple, la mécanisation généralisée et l'équipement contrôlé à distance permettent aux travailleurs de mener leurs activités sans se trouver dans des lieux à risque sur un site minier, et les capteurs de détection de proximité d'éviter des collisions, des accidents et des décès. En outre, les méthodes d'exploitation minière, qui sont considérées comme des technologies, ont évolué de l'exploitation avec boisage à l'exploitation rabattante verticale, bien moins risquée.

Une autre explication possible concerne la formation obligatoire des travailleurs et des chefs d'équipe dans la province. De fait, l'Ontario a été la première province au Canada à l'exiger par le biais des modules de formation du programme de tronc commun dans le secteur minier. La plupart des provinces dans le monde ne la demande pas, même celles qui exigent souvent que seuls les travailleurs, et pas nécessairement les chefs d'équipe, y participent. Peut-être peut-on également attribuer cela à la culture de sécurité unique qui s'est installée au sein de l'industrie minière, où chaque réunion commence par un « partage sur une question de sécurité ». L'industrie adoptait auparavant une approche fataliste à la sécurité. La mentalité dans l'industrie minière décrétait que ce métier comportait des risques et que les accidents lui étaient inhérents et par là même inévitables. Cette attitude a totalement changé, à tel point que certaines associations dédiées à la sécurité ont rayé le mot « accident » de leur vocabulaire car il implique qu'aucune mesure préventive n'aurait pu être prise pour éviter ce genre d'incidents. Elles préfèrent plutôt les termes « événement à signaler » ou « incident ». Quelle qu'en soit la raison, on observe une tendance nettement positive au cours des dernières décennies.

Alors, comment se présente l'avenir ? À l'occasion du symposium allemand/canadien Zero Harm (objectif « zéro accident ») dédié à la santé et la sécurité au travail qui se tiendra à Sudbury au mois de juin, la section allemande dédiée à l'exploitation minière de l'association internationale de la sécurité sociale (AISS) présentera sa stratégie de sécurité Vision Zéro dans l'une des capitales minières du monde. En outre, lors de la World Congress on Safety and Health at Work 2017 (la conférence internationale 2017 dédiée à la santé et la sécurité au travail) qui aura lieu à Singapour en septembre, on cherchera des systèmes durables pour atteindre un taux d'accidents nul partout dans le monde, et pour le maintenir. Cette année, le volet du congrès de l'ICM dédié à la sécurité compte des experts de l'industrie du monde entier qui partageront leurs expériences à cette fin.

L'industrie connaît de bonnes et de mauvaises années, et certaines provinces affichent de meilleurs résultats que d'autres ; mais s'il s'agit d'un secteur qui comporte toujours certains risques, un risque aboutissant à la mort est inacceptable. Ainsi, l'industrie à l'international doit s'engager à offrir une meilleure formation, une technologie plus performante et des systèmes de gestion qui ne fonctionneront pas uniquement aujourd'hui, mais également à l'avenir.

L'industrie essuiera certes des échecs dans les années à venir, mais il convient aujourd'hui de célébrer l'absence d'accidents mortels en Ontario. C'est d'ailleurs en faisant le premier pas dans cette direction que la province de l'Ontario a pu prouver à l'industrie qu'il était possible d'atteindre cet objectif « zéro accident » !


Vic Pakalnis est président et chef de la direction de MIRARCO ainsi que vice-président par intérim du groupe Innovation et technologie dans l'industrie minière de l'université Laurentienne.

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