D'ici la fin de l'année, neufs foreuses seront équipées du système d'exploitation automatisé. Avec l'aimable autorisation d'ArcelorMittal

Il y a quatre ans, ArcelorMittal Mining Canada G.P. commençait à envisager l'automatisation de son système de forage (ADS, de l'anglais autonomous drilling system) pour son exploitation de minerai de fer de Mont Wright, dans la région Côte-Nord du Québec. Avec 11 foreuses de fabricants différents et un certain nombre de difficultés pratiques, la tâche n'allait pas être simple.

À ce moment-là, l'objectif final de la société pour ce site n'était pas de disposer d'un système autonome fonctionnant 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ; ainsi, elle décidait d'explorer la possibilité d'une automatisation partielle.

Les foreuses électriques de la mine fonctionnent 21 heures par jour. Durant les trois heures restantes, les opérateurs prennent leur pause et changent de poste. « Les foreuses pourraient être activées et forer pendant ces trois heures par jour », déclarait Saad Hameed, directeur des opérations de l'Integrated Remote Operations Centre (IROC, le centre d'opérations intégrées à distance) et codirigeant du projet ADS. « Nous souhaitions récupérer le temps d'immobilisation des foreuses imposé par la structure de notre exploitation. »

Caterpillar fait son entrée

ArcelorMittal possède quatre types de foreuses provenant de deux fabricants. Si la société s'intéressait à l'automatisation partielle du forage afin d'augmenter la productivité à sa mine de Mont Wright, elle ne souhaitait pas pour autant se lancer dans un réaménagement intégral et coûteux de toutes ses foreuses. « Opter pour cette solution reviendrait à reconcevoir la plupart des systèmes embarqués », expliquait M. Hameed.

La solution dont la société avait besoin n'existait pas. D'un point de vue technologique, la question de l'interopérabilité (dans ce cas précis, la capacité du logiciel d'un nouveau système tiers à communiquer avec les systèmes de commandes embarquées des fabricants d'équipement d'origine, ou FEO) constituait un défi colossal.

Afin de développer une nouvelle technologie qui lui permettrait de surmonter cette difficulté, ArcelorMittal décidait alors de collaborer avec Caterpillar, qui travaille sur l'automatisation du forage depuis des années et a présenté son premier système en 2012.

« Nous avons des clients dans le monde entier qui sont intéressés par l'automatisation », déclarait Jim Peterson, spécialiste en application des technologies minières chez Caterpillar. Si la société est convaincue que ses foreuses constituent la meilleure solution, expliquait M. Peterson, elle souhaitait aussi développer des options qui répondent aux besoins de tous les clients potentiels cherchant à intégrer le forage automatisé dans leur exploitation.

« Le réel objectif de ce projet est d'offrir les mêmes avantages aux clients avec des produits différents », indiquait M. Peterson.

La nouvelle technologie

Les FEO introduisent périodiquement des mises à niveau et des améliorations dans les automates programmables à bord de leur équipement. Ainsi, les difficultés au niveau de l'interopérabilité n'allaient pas être un problème ponctuel. « Ce n'est pas parce que des améliorations sont apportées aux automates programmables que l'automatisation doit être perturbée », indiquait M. Peterson. Inversement, Caterpillar souhaitait aussi s'assurer que les clients pourraient encore profiter des améliorations que leurs proposent les FEO.

La solution que la société a développée consistait essentiellement à contourner le problème en développant un système à plusieurs niveaux qui ne modifie pas le système embarqué. Cette nouvelle technologie commence par une interface innovante dotée de fonctionnalités complémentaires qui exploite les commandes de l'engin de base, à laquelle vient s'ajouter le système très précis de positionnement par satellites Cat Terrain qui détermine l'emplacement, la profondeur et l'angle des trous de forage dans une seule rangée à l'aide d'un logiciel d'orientation.

Le système dispose aussi d'une couche pour la technologie automatisée et d'une couche pour l'aide à distance. Plutôt que de remplacer les commandes embarquées, l'ordinateur du nouveau système propose un opérateur virtuel.

Sur une tablette non embarquée, un opérateur peut gérer et surveiller le forage automatisé effectué par l'opérateur virtuel.

« C'est un système non intrusif ; ainsi, s'il tombe en panne, l'opérateur [humain] peut continuer à faire son travail avec le système embarqué dont est équipée la foreuse », indiquait M. Hameed, qui ajoutait que cette approche est également beaucoup moins coûteuse qu'une rénovation classique.

Parce que le système est modulable, ArcelorMittal pourra ajouter d'autres fonctionnalités autonomes si elle le souhaite. « On peut laisser un opérateur dans la cabine, mais on dispose néanmoins de toutes les fonctionnalités autonomes », indiquait M. Peterson. « L'opérateur peut ensuite quitter la foreuse pour l'actionner à distance. »

Le lancement

En octobre 2015, l'équipe installait le système modulaire ADS complémentaire de Caterpillar sur une foreuse. Au cours de l'année suivante, ArcelorMittal évaluait la performance de l'exploitation de la foreuse pendant les pauses et les changements de poste. L'évaluation confirmait que ce nouveau système se traduisait non seulement par une meilleure productivité, mais aussi par une amélioration de la qualité et de l'avancement du forage. En 2017, le système était installé sur deux autres foreuses.

D'autres avantages inattendus se sont également manifestés. « Nous observons un rendement supplémentaire pour les opérateurs, qui peuvent désormais abandonner la foreuse lorsque leur aide est requise ailleurs, puis y revenir », expliquait Michel Plourde, directeur de l'innovation et de la technologie pour l'IROC d'ArcelorMittal et dirigeant du projet pilote ADS. « Les opérateurs sont satisfaits et peuvent effectuer d'autres tâches. Nous avons souhaité faire comprendre aux gens que cette technologie est là pour les aider, pour améliorer leur travail, et que le fait de devenir opérateur d'une foreuse automatisée est, en soi, un progrès. »


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Aujourd'hui, cinq foreuses sont équipées du système modulaire ADS complémentaire de Caterpillar. D'ici la fin de l'année, neufs foreuses seront équipées de ce système, et le projet s'achèvera. En effet, deux des foreuses arrivent en fin de leur cycle de vie et seront retirées du circuit. L'augmentation de la productivité permettra à la mine de Mont Wright de continuer à fonctionner sans avoir à remplacer ces deux foreuses. Même avec une automatisation partielle, ArcelorMittal a constaté qu'une utilisation accrue du système automatisé permettait une réduction importante de l'usure de l'équipement. « L'automatisation permet de bénéficier d'une productivité régulière, et il est fort probable que les coûts d'entretien soient réduits », déclarait M. Hameed.

« Cette approche présente donc un double avantage », expliquait M. Plourde. « Le premier concerne la réduction des besoins en entretien, le second une variabilité moindre de la production. »

La réduction de la variabilité est le facteur le plus attrayant de l'automatisation. « La stratégie de la société en matière de leadership et d'innovation se rapproche d'une variabilité plus faible et d'une exploitation plus simple », indiquait M. Hameed. « Mais comment peut-on contrôler la variabilité ? Ce projet est totalement en accord avec notre stratégie. »

Et maintenant ?

Caterpillar intègre aujourd'hui sa technologie ADS à ses foreuses électriques et à moteur diesel. « Un site équipé de foreuses à moteur diesel ou électriques peut désormais avoir les mêmes capacités », expliquait M. Peterson. « Les clients ne sont pas contraints d'adopter une approche radicale face à l'automatisation. La gestion des changements pour passer d'une exploitation gérée par des hommes à une exploitation automatisée n'est pas simple. Environ cinq éléments sur ces foreuses peuvent être automatisés pour parvenir à une automatisation totale. »

Pour ArcelorMittal, ce projet a abondé dans le sens de sa stratégie en matière d'automatisation partielle. « Nous avons pu confirmer que les avantages apparemment insignifiants découlant de l'ajout d'une automatisation partielle étaient en réalité plutôt importants et en valaient vraiment la peine ; à tel point que l'amortissement de l'automatisation est pratiquement immédiat », indiquait M. Hameed.

Traduit par Karen Rolland