L’EcoHoist est une alternative aux systèmes de levage à skip qui vise à réduire la taille des puits de mine, leur coût et leur délai de construction. Avec l’aimable autorisation d’EcoHoist

Imaginez qu’une exploitation minière ramène en surface des matériaux souterrains d’une manière qui réduise considérablement les coûts et l’empreinte carbone du projet, par rapport aux solutions classiques de manutention. C’est ce qu’essaie de faire EcoHoist, une société basée à Adélaïde, en Australie. Elle a créé une nouvelle option de levage, du même nom que la société, qui suscite déjà l’intérêt de clients canadiens du secteur minier.

L’EcoHoist comprend un convoyeur à chaîne mécanique équipé de godets qui hissent sans cesse des matériaux de la mine à la surface par l’intermédiaire de deux puits de mine de petit diamètre. Le minerai est chargé dans les godets à des profondeurs basiques de 1 500 mètres, puis il est hissé jusqu’à la surface avant d’être vidé à l’aide d’un barbotin semblable à la roue d’un excavateur à roue-pelle. Le barbotin effectue une rotation à un rythme régulier de sept à dix révolutions par minute, en synchronisation avec le mouvement de la chaîne qui fonctionne à peu près à une vitesse de marche. Le système est conçu pour transporter jusqu’à quatre millions de tonnes de matériaux par an.

« L’avantage d’utiliser une chaîne mécanique plutôt que des [câbles métalliques] est que nous pouvons utiliser des matériaux composites de résines époxy en fibre de verre qui sont légers et résistants à la tension, ce qui réduit le poids propre du système et signifie que l’on peut soulever davantage de matériaux à des profondeurs supérieures », expliquait Matthew Forrest, directeur exécutif qui a développé EcoHoist avec ses collègues David Coupe et Michael Short.

Contrairement à l’acier, un métal communément utilisé pour les structures et les câbles métalliques, les matériaux composites en fibre de verre résistent à la corrosion, et sont donc des matériaux idéaux pour les environnements miniers austères fortement exposés à l’humidité et aux substances chimiques. Ceci prolonge la durée de vie de l’équipement et réduit les exigences en matière d’entretien. M. Forrest indiquait que ce même matériau est couramment utilisé pour les yachts destinés à la haute mer, qui évoluent dans un environnement salin où les pièces en acier non protégées se désintégreraient en quelques mois.

La chaîne symétrique est une caractéristique nominale de l’EcoHoist, lui permettant de hisser des matériaux exactement à la verticale sans avoir besoin de guider la chaîne dans le puits de mine. Aucun soutènement structurel supplémentaire ni rouleaux d’alignement ne sont donc nécessaires. M. Forrest ajoutait que ce genre de guides est une source de perte d’énergie de frottement, qui entraîne des coûts supplémentaires en termes d’entretien et d’usure.

L’EcoHoist fonctionne également dans des puits de mine verticaux qui mesurent de 0,75 à 1,2 mètre de diamètre. Ils sont donc bien plus étroits que les puits de mine traditionnels pour un système de skip, lesquels mesurent généralement entre 5 et 8 mètres de diamètre. Ainsi, d’après les développeurs d’EcoHoist, cette solution permettra de maîtriser les coûts du projet, car les puits sont considérablement moins onéreux à construire (les puits d’extraction équipés de skips coûtent plus de 100 millions de dollars, alors que les puits équipés d’EcoHoist coûtent moins de 10 millions de dollars, d’après M. Forrest), ont des exigences réduites en matière d’infrastructure et des délais de construction plus courts par rapport aux puits de mine traditionnels.

Outre les économies réalisées sur les coûts d’investissements, M. Forrest indiquait que l’EcoHoist peut aussi considérablement réduire le risque géotechnique. « Les puits plus étroits sont forés mécaniquement et un tube de revêtement est installé. Ce n’est donc pas seulement moins coûteux, mais [aussi] plus intégral sur le plan structurel », indiquait-il.

Par rapport au transport par camions alimentés au diesel via les descenderies, cette technologie est aussi plus respectueuse de l’environnement. M. Forrest présentait les nombreux avantages d’EcoHoist permettant d’utiliser moins de camions dans les mines souterraines pour obtenir le même taux de production, par exemple une réduction des émissions, des exigences moindres en matière d’aérage et moins de circulation sous terre, ainsi que moins de conducteurs exposés aux risques sous terre. En outre, dans les cas où une mine utilise de l’énergie renouvelable pour alimenter l’EcoHoist, les émissions opérationnelles du système sont faibles. Même dans les mines alimentées au diesel, ses développeurs expliquaient que le produit émettra 50 % de CO2 en moins que les camions fonctionnant au diesel par tonne de minerai remonté en surface.

Développement et démonstration

M. Forrest, expert en génie mécanique et robotique, est à l’origine de l’idée pour l’EcoHoist. Parallèlement, il a exploré le développement d’un nouveau système de stockage de l’énergie par gravité qui utiliserait l’équipement mécanique pour transporter du matériel entre un réservoir en surface et souterrain. « Je ne m’intéressais pas initialement à l’amélioration de l’exploitation minière souterraine », expliquait-il, « mais j’ai fini par trouver une solution qui s’y applique très bien. »

Si d’autres systèmes de convoyeurs verticaux continus existent pour les mines souterraines, EcoHoist est le seul capable de fonctionner dans des puits de mine si étroits, indiquait-il.

« Lorsque nous avons étudié le produit, nous avons pensé que cette technologie pourrait bien être révolutionnaire dans le domaine de l’extraction », indiquait Mike Davis, chef de produit à l’international de l’extraction dans la société de technologie internationale ABB. « Avec son système de chaîne à godets en continu, il n’est pas nécessaire d’arrêter et de relancer le treuil d’extraction minière, et c’est ce qui nous intéressait. C’est assez performant d’un point de vue électrique. »

Un treuil d’extraction minière classique hissant un skip en pleine charge du fond d’un puits requiert une forte dose de courant du réseau électrique de la mine. M. Davis expliquait toutefois qu’un système en fonctionnement continu tel que celui d’EcoHoist impose une charge bien moindre sur le réseau. « C’est comme une pompe, une fois qu’elle a démarré, elle fonctionne en continu. Ses besoins en électricité sont moins exigeants sur le réseau », ajoutait-il.

En avril 2024, EcoHoist et ABB ont signé un protocole d’entente (PE) pour collaborer, en exploitant l’expertise d’ABB en génie et en systèmes de sécurité des treuils d’extraction minière afin d’accélérer l’exécution d’une démonstration à sous-échelle du produit. M. Davis indiquait que son équipe s’intéresse avant tout à la partie électrique, à la transmission et au système de freinage du produit. Quant à l’équipe d’EcoHoist, elle se chargera du reste.

Ensemble, les sociétés œuvrent vers une démonstration du système intégral. La taille de l’élévateur vertical à godets sera de 30 % celle que prévoit EcoHoist lorsque le produit sera commercialisé. La démonstration à échelle sera répartie en trois étapes qui dureront environ six mois chacune, en commençant par une version à petite échelle de l’élévateur à godets mécanique en fonctionnement. Pour la deuxième étape, un système de manutention de matériaux en vrac qui transportera du minerai concassé au rythme d’environ 50 tonnes par heure sera ajouté. Pour l’étape finale, le système sera chargé mécaniquement pour refléter une élévation du levage à 300 mètres.

« Nous procéderons ensuite à notre premier essai sur le site minier », indiquait M. Forrest. Il est prévu pour la fin 2027, suivi de la commercialisation du produit en 2028, même si des études sur l’intégration dans plusieurs mines sont déjà en cours.

M. Forrest indiquait que le système sera certainement utilisé initialement pour améliorer la logistique sous terre. « Plusieurs mines que nous connaissons ont des contraintes d’engorgement concernant les chargeurs-transporteurs actionnés à distance qui extraient des matériaux. Ainsi, un EcoHoist pourrait hisser le matériau jusqu’à un autre niveau pour soulager l’engorgement », indiquait-il.

Projets d’avenir

Le produit suscite un intérêt considérable, même avant sa démonstration à l’échelle. D’après M. Forrest, la société a déjà reçu sept lettres d’intérêt de clients potentiels, notamment deux qui envisagent l’acquisition d’un EcoHoist pour des mines au Canada et d’autres en Australie, aux Philippines, au Kazakhstan et aux États-Unis. « Ce produit est intéressant pour des mines à la recherche d’un treuil d’extraction minière pouvant hisser entre 0,5 million et 4 millions de tonnes par an, à des profondeurs de 300 à 1 000 mètres », indiquait-il.

Restant fidèle à la mission d’EcoHoist visant à atteindre la neutralité carbone des mines souterraines, M. Forrest expliquait que l’objectif final est d’aider les clients à remplacer dès que possible l’utilisation des camions au diesel dans les mines souterraines. Il espère aussi que le produit facilitera l’électrification intégrale des mines souterraines. « Il n’existe actuellement aucun camion électrique à batterie capable de remonter en surface du matériel à la verticale sur une distance allant jusqu’à 1 000 mètres en une seule charge », indiquait-il. « Toutefois, l’association d’un EcoHoist électrique pour le mouvement vertical du matériel et des camions électriques pour le mouvement horizontal du matériel aidera à la transition vers une [exploitation souterraine] totalement électrique. »

Une étude de cas de juillet 2024 sur l’intégration d’un EcoHoist dans une mine représentative, élaborée par EcoHoist en conjonction avec ABB et Mining One Consultants, révélait que l’investissement dans un projet d’EcoHoist offrait un taux de rentabilité interne de 167 %. La mine en question était une mine d’or souterraine hypothétique, creusée à une profondeur de 500 mètres et avec un taux d’extraction d’un million de tonnes par an. Outre le rendement financier intéressant, expliquait M. Forrest, le projet devrait réduire les émissions de la mine sur sa durée de vie de 101 000 tonnes de CO2. L’étude de cas intégrale, qui inclut des calculs détaillés, peut être téléchargée sur le site Internet d’EcoHoist.

Concernant les projets futurs pour la technologie, la société étudie les possibilités d’une utilisation d’EcoHoist pour ramener les matériaux des anciennes mines sous terre. « Nous avons une variante dans la conception équipée d’un godet à double face, qui peut donc simultanément soulever des matériaux et ramener [les déchets] sous terre. »

Dans les mines où l’espace est restreint pour le stockage des résidus après l’extraction, il serait sensé d’utiliser l’EcoHoist pour ramener les résidus secs sous terre. Ceci présentait l’avantage supplémentaire de réduire le stockage des résidus en surface et les risques environnementaux et sociaux associés, ajoutait-il.

M. Davis d’ABB indiquait que l’utilisation considérable de matériaux composites dans le système d’EcoHoist est un concept novateur dans le secteur minier et pourrait demander un certain degré d’adaptation de la part de l’industrie. Toutefois, il établissait un parallèle avec le secteur de l’aviation, qui s’était initialement montré hésitant quant à l’utilisation des composites dans les avions commerciaux, mais qui avait fini par les adopter de manière généralisée. « Au départ, je pense, nous allons susciter quelques froncements de sourcils concernant l’utilisation de matériaux composites. Mais c’est à l’usage que l’on peut juger de la qualité d’une chose », concluait-il.

Traduit par Karen Rolland