Des billes provenant de sociétés forestières des environs sont entreposées pendant l’été et l’automne dans une installation de la mine qui peut contenir jusqu’à 5 000 tonnes de biomasse. Avec l’aimable autorisation de Norforce Énergie

Le projet de chauffage à la biomasse à la mine Casa Berardi d'Hecla Québec, située à 95 kilomètres (km) au nord de La Sarre dans l'ouest du Québec, vient d'entrer dans sa deuxième phase cet hiver, faisant passer de deux à sept le nombre d'échangeurs de chaleur dont l'exploitation dispose. Il s'agit de la première mine souterraine dans la province à utiliser un système de chauffage basé sur la biomasse d'origine forestière.

Ce projet, dirigé par Norforce Énergie, une société dédiée à la production et la vente d'énergie issue de la biomasse forestière établie à La Sarre, fournit aux bâtiments en surface de la mine le chauffage généré par la biomasse forestière résiduelle provenant de billes mises au rebut par des sociétés d'exploitation forestière de la région d'Abitibi-Témiscamingue. Ces sociétés envoient leurs billes indésirables sur un site d'Hecla où elles sont stockées pendant l'été et l'automne dans une installation construite expressément pour ce projet. Quelque 5 000 tonnes de biomasse peuvent y être entreposées. En hiver, les billes séchées sont transformées en copeaux de bois pour alimenter les unités de conversion.

Durant la première phase du projet, qui a duré de l'hiver 2014 à l'hiver 2015, Norforce et Hecla ont constaté une réduction de la consommation de propane de 45 000 litres.

« L'essai pilote réalisé en 2014 nous a donné toutes les données nécessaires pour mesurer l'impact de l'utilisation des deux échangeurs dans le système de chauffage au propane de la mine ; cet impact s'est révélé considérable », déclarait hristian Léveillé, directeur général de Norforce. « Nous nous attendons à ce que ce système ait une grande incidence sur la consommation de propane [au cours de la deuxième phase]. »

Les sept échangeurs de chaleur consommeront entre 4 500 et 6 000 tonnes de biomasse par an, générant chacun 500 kilowatts d'électricité. D'après M. Léveillé, la deuxième phase du projet durera au moins neuf ans.

Avant le commencement du projet, Casa Berardi était chauffée exclusivement au propane pendant l'hiver, de la mi-novembre à la mi-avril, et consommait entre 2,5 et 3 millions de litres par an. Toutefois, l'objectif n'est pas d'éliminer entièrement le propane, mais plutôt de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) sur le site tout en équipant la mine d'un système hybride de chauffage fonctionnel. Pendant les journées plus douces de l'hiver, lorsque la température avoisine les 0° Celsius, M. Léveillé expliquait que le site serait chauffé à la biomasse ; le propane, moins performant à ces températures, serait utilisé pendant les journées plus froides.

« L'objectif final est d'être en mesure [… de ne dépendre d'aucune de ces deux formes d'énergie et de parer toute éventualité », indiquait Josée Plouffe, coordonnatrice régionale des communications chez Hecla Québec.

Ce projet de 3 millions $ a bénéficié d'un financement de 1,1 million $ du ministère québécois de l'énergie et des ressources naturelles dans le cadre de son programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La société minière pense pouvoir éviter le rejet dans l'atmosphère de 2 732 tonnes de GES par an en utilisant la biomasse plutôt que le propane. Norforce vend la chaleur générée à Hecla, et réalisera des gains en fonction des économies réalisées chaque année en termes de consommation de propane.

Norforce, née de l'alliance de Métal Marquis et de Coopérative forestière St-Dominique, avait contacté Mines Aurizon en 2011 pour envisager l'installation d'un système de chauffage alimenté à la biomasse pour la mine Casa Berardi. Durant les négociations entre les deux entreprises, la mine d'or souterraine a été vendue à Hecla, et les discussions ont alors repris.

Le projet pilote a commencé en 2013, mais les échangeurs de chaleur n'ont été installés qu'en janvier 2014. Norforce devait d'abord trouver la technologie adaptée à ce projet. M. Léveillé expliquait qu'à l'origine, la société avait envisagé la technologie utilisée dans les scieries pour brûler l'écorce, mais les appareils étaient trop imposants et une perte d'énergie se produisait à chaque transfert d'énergie. « Nous souhaitions utiliser une technologie exigeant moins de transfert d'énergie », précisait-il.

La société a finalement opté pour une technologie actuellement utilisée dans le domaine de l'agriculture pour sécher les récoltes, et l'a adaptée aux besoins de la mine. « Nous disposons d'un système qui produit de l'énergie sans eau, l'équivalent d'un pistolet à air chaud. Il produit de l'air chaud et propre, ce dont la mine a besoin », déclarait M.  Léveillé.

La promotion de l'économie locale constitue une valeur ajoutée en Abitibi-Témiscamingue étant donné que la région ne produit pas de propane, mais qu'elle possède une solide économie forestière. « Hecla doit acheter son propane à Montréal et à Sarnia, en Ontario, aussi les investissements dans l'achat du propane sont des fonds qui sortent de la région », déclarait M. Léveillé. « [Elle pourrait plutôt] acheter de la biomasse produite à l'échelle locale. La région préserve alors des fonds qui, autrement, quitterait l'Abitibi-Témiscamingue. »

D'après M. Léveillé, cette solution s'accompagne d'une multitude de possibilités pour d'autres sociétés qui pourraient commencer à utiliser la biomasse sur leurs sites. « 80 % des mines en exploitation sont équipées d'un système de chauffage au [propane] semblable à celui de la mine Casa Berardi », indiquait-il. « Par conséquent, le potentiel est considérable. Nous sommes maintenant bien placés pour développer ce type de projet. »  

Traduit par Karen Rolland