RNCan a confié l’élaboration de ce rapport à Karen Chovan, fondatrice et directrice générale d’Enviro Integration Strategies, ainsi qu’à Alan Young et Maria Laura Barreto, directeurs du Materials Efficiency Research Group. Avec l’aimable autorisation de Jon Benjamin Photography

Alors que les industries du monde entier se tournent vers la décarbonation afin de répondre aux enjeux du changement climatique, il faut se préparer à répondre à la demande croissante en minéraux et métaux essentiels utilisés dans les technologies vertes telles que les batteries ou les panneaux solaires. Et qui dit demande croissante dit hausse de l’exploitation minière et du traitement des minéraux. Parallèlement, l’industrie minière cherche, elle aussi, à réduire, voire à éliminer les émissions et les déchets dans ses exploitations.

L’une des stratégies envisagées, « l’économie circulaire », cherche à éliminer les déchets et la pollution en générant de la valeur à partir de processus normalement peu rentables. Toutefois, la mise en œuvre de cette pratique dans une exploitation minière pourrait prendre une multitude de formes.

Afin de mieux comprendre la valeur potentielle de l’économie circulaire appliquée à l’exploitation minière, Ressources naturelles Canada (RNCan) a chargé Alan Young et Maria Laura Barreto, directeurs du Materials Efficiency Research Group (le groupe de recherche sur l’efficacité des matériaux) ainsi que Karen Chovan, fondatrice et directrice générale d’Enviro Integration Strategies et présidente de la société de la responsabilité sociale et environnementale (SRSE) de l’ICM, d’élaborer un rapport présentant en détail les stratégies à envisager pour l’adoption d’une approche axée sur l’économie circulaire dans les activités minières, et les possibilités qu’elle offrait.

D’après M. Young, il faut bien comprendre l’intérêt majeur d’aller au-delà d’une adaptation progressive dans l’application de l’économie circulaire aux exploitations. Si une société investit dans les systèmes intégrés d’un modèle d’économie circulaire, ses exploitations seront plus à même de tirer pleinement parti des possibilités qui en découlent sur le site et dans leurs écosystèmes d’offre.

« Nous travaillons dans cet espace depuis longtemps et, pour être honnête, il s’agit [principalement] d’un modèle de réduction des préjudices. La question est de savoir comment réduire les dégâts, comment minimiser l’impact ou atténuer les choses », déclarait M. Young. « Toutes les initiatives sont les bienvenues, mais il est davantage question ici d’une transformation. Il faut déterminer comment parvenir à un avantage net, comment évoluer dans des circuits fermés et comment l’industrie peut saisir cette occasion où l’on a besoin de plus de métaux et où l’on ne peut pas justifier un modèle industriel conventionnel pour diverses raisons. »

L’application la plus courante de l’économie circulaire dans le secteur minier implique actuellement de retraiter les résidus afin d’en extraire les minéraux restants. Toutefois, expliquait Mme Chovan, il existe une myriade d’autres possibilités pour tirer parti des ressources à la disposition d’une exploitation minière, par exemple la réutilisation ou le don d’équipements usagés. On peut aussi faire de grands progrès en matière d’objectifs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).

« Nous devons nous considérer comme des emprunteurs de terres. Nous ne devons pas nous poser comme de simples extracteurs de minerais mais penser à ce que nous créons qui ait une valeur pour cet espace, penser à ce que l’on peut faire sur cette propriété », indiquait Mme Chovan. « Il faut penser à ce que nous pouvons faire pour offrir une valeur sur le long terme à ces régions, à ce que nous ferons avec les terres [et l’infrastructure] une fois la mine fermée. Il faut envisager ce que l’on peut faciliter, même pendant l’exploitation, pour offrir plus d’avantages à la région, au-delà de la durée de vie de la mine. »

Mais chaque mine est différente, et il n’existe pas d’approche unique nous montrant ce à quoi une mine pratiquant l’économie circulaire ressemblera. Le rapport mentionne que les mines qui se conforment à des normes d’exploitation minière responsable acceptée, telles que celles énoncées dans l’initiative Vers le développement minier durable (VDMD) de l’association minière du Canada (AMC), pourraient déjà avoir mis en œuvre, sans le savoir, de nombreux principes liés à l’économie circulaire dans leurs exploitations. Toutefois, les occasions sont nombreuses pour les sociétés minières de produire de la valeur en évoluant d’une transition reposant sur des améliorations progressives à une transition transformationnelle globale.

L’un des principaux moteurs de cette transition réside dans les collaborations et les partenariats entre les différentes corporations et les différents secteurs de l’industrie. Plutôt que de développer nombre d’innovations environnementales individuellement, il peut s’avérer bénéfique de partager les connaissances dans toute la chaîne d’approvisionnement afin de les intégrer plus efficacement dans les activités, et de créer de la valeur.

« Les [grandes sociétés minières] mènent des évaluations quant au nombre d’initiatives compartimentées qui sont en cours, lesquelles s’intéressent globalement à l’efficacité et la durabilité, mais elles ne communiquent pas entre elles », indiquait M. Young. « Ainsi, il faudrait adopter une approche systémique, mener une évaluation de toute l’exploitation puis chercher des possibilités où l’on peut commencer à intégrer et à accélérer les choses qui sont en faveur du zéro déchets ou de la neutralité carbone, puis commencer à les associer. »

Pour que le concept d’économie circulaire fonctionne vraiment dans le secteur minier, le gouvernement devra apporter son soutien en investissant dans l’innovation et dans des stratégies clairement définies. Toutefois, un changement de mentalité sera aussi nécessaire de la part des sociétés minières concernant la façon dont elles envisagent leurs actifs.

« Pour faire changer les choses, il suffirait que les sociétés minières parviennent à ne serait-ce qu’un seul changement dans leur manière de penser, et acceptent d’accorder une valeur à tous les matériaux qu’elles déplacent et non pas uniquement aux matières premières ciblées qu’elles produisent. Tous les minéraux sont des actifs en puissance », indiquait Mme Chovan. « Si elles évaluaient la valeur de ces matériaux tout comme elles le font pour l’infrastructure qu’elles exploitent, elles les traiteraient sans doute différemment, et cela entraînerait une transition du modèle économique. On peut toujours optimiser autour d’un produit, mais cela ne signifie pas que le reste n’a aucune valeur. »

Le rapport Towards a Circular Economy Approach to Mining Operations: Key Concepts, Drivers and Opportunities (Vers l’adoption d’une approche axée sur l’économie circulaire dans le cadre des activités minières, traduction en français du résumé uniquement) est disponible en ligne.