D’après Sécurité au travail dans le Nord, les expositions aux substances caustiques et aux produits nocifs ou allergènes étaient responsables de 16 % des absences résultant de blessures et des maladies dans le secteur minier de l’Ontario en 2023. Avec l’aimable autorisation de Mohamamd Noori via Unsplash.
La Workplace Safety and Insurance Board (WSIB, la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail) a annoncé un investissement de 6,78 millions de dollars destiné à protéger les travailleurs et travailleuses des secteurs minier et forestier de la province. L’annonce est arrivée durant le 27e Mining Health and Safety Conference (le 27e congrès annuel sur la santé et la santé dans le secteur minier), qui s’est tenu à Science Nord à Sudbury du 30 avril au 1er mai dernier.
La WSIB a uni ses forces avec Sécurité au travail dans le Nord (STN) et l’Institute for Work & Health (IWH, l’institut pour le travail et la santé) pour lancer une campagne visant à renforcer les pratiques de contrôle de l’hygiène et à réduire les risques d’exposition aux dangers au travail. Au titre de cette initiative, STN crée des ressources de formation spécialisée et collaborera étroitement avec des employeurs et des travailleurs, hommes et femmes, en Ontario. Il propose un accompagnement pratique et un soutien en temps réel en fournissant du matériel de contrôle de l’hygiène dans le but de permettre aux équipes de première ligne de mieux reconnaître et gérer les risques d’exposition.
Menaces invisibles
D’après le Workplace Health and Safety Snapshot for Ontario’s mining sector (L’instantané de la santé et la sécurité au travail pour le secteur minier de l’Ontario) de STN, un total de 1 196 blessures a été déclaré par les 26 931 travailleurs et travailleuses à plein temps.
Cindy Schiewek, directrice des services de santé et sécurité à STN, écrivait dans un courriel à CIM Magazine que nombre des risques professionnels dans le secteur minier, tels que les matières particulaires diesel (MPD), la silice cristalline inhalable, les vapeurs métalliques et le bruit professionnel, ne sont pas visibles à l’œil nu.
« Contrairement aux dangers physiques, les travailleurs et travailleuses ne reconnaîtront pas immédiatement leur présence ou sévérité, mais les conséquences sur la santé peuvent être graves et à long terme », écrivait-elle. « Ces substances et les expositions sont souvent aériennes et microscopiques. Elles s’accumulent dans les poumons ou ont une incidence sur l’ouïe au fil du temps, sans signes précurseurs. »
Mme Schiewek ajoutait que ces risques ont des effets irréversibles sur la santé des travailleurs et des travailleuses. De fait, nombre de symptômes apparaissent seulement après des années d’exposition, ce qui met en avant l’importance des mesures précoces de contrôle et de prévention.
L’exposition aux MPD et à la poussière de silice, qui sont classées comme des substances cancérigènes, peut mener à des maladies respiratoires graves telles que la bronchopneumopathie chronique obstructive et la silicose. L’exposition aux vapeurs métalliques fait également partie des risques invisibles, lesquels peuvent entraîner la fièvre des fondeurs ou des problèmes systémiques plus graves. En outre, Mme Schiewek indiquait que l’exposition prolongée aux nuisances sonores est l’une des principales causes de surdité professionnelle, qui peut avoir une incidence considérable sur la qualité de vie et la communication dans des situations où la sécurité est critique.
Elle expliquait que le personnel travaillant dans des environnements souterrains, les opérateurs et opératrices d’équipement mobile, ainsi que le personnel préposé au forage, à l’abattage et à la maintenance, sont tout particulièrement vulnérables à ces menaces en raison d’une exposition étroite et continue aux particules fines, aux vapeurs toxiques, à la poussière aéroportée et aux niveaux sonores élevés.
Sans fondement solide en matière d’identification des risques, d’évaluation des risques, de sélection des contrôles et d’évaluation de l’efficacité, Mme Schiewek indiquait que l’industrie minière risque une protection inefficace ou incohérente pour ses travailleurs et travailleuses. Ceci aboutira à des cas de maladies professionnelles, des demandes d’indemnisation plus élevées auprès de la WSIB et des décès potentiellement évitables.
Cette nouvelle initiative vise à directement aborder ces risques et à renforcer la protection du personnel dans l’intégralité du secteur minier.
Renforcer le bassin de main-d’œuvre qualifiée
Au titre de l’initiative, STN développera des documents d’orientation sectorielle pour les secteurs des ressources de base de l’Ontario. Ils contiendront des modules de formation d’apprentissage en distanciel et en présentiel pour le personnel, ainsi qu’une application des compétences pratiques soutenue par un mentorat de STN adapté à des risques et des environnements de travail spécifiques, tels que les inspections et les échantillonnages.
« Cette approche vise à créer une auto-efficacité et à renforcer le bassin de main-d’œuvre qualifiée dans le domaine de l’identification, de l’évaluation et du contrôle des risques professionnels à la santé », indiquait Mme Schiewek. « Lorsqu’il est question de contrôle, on axera les efforts sur l’application de la hiérarchie des contrôles, qui reconnaît ceux qui ne sont pas efficaces et encourage l’engagement conjoint du comité de la santé et la sécurité dans l’évaluation des contrôles. »
L’initiative inclura deux éléments clés : un cadre de développement des compétences pour les participantes et les participants du site sélectionnés pour le perfectionnement des compétences, et une évaluation plus générale de la culture de la santé et la sécurité du site. Le perfectionnement des compétences comprendra une formation fondée sur les connaissances et les compétences, visant à améliorer les capacités du personnel à gérer plus efficacement les risques pour la santé au travail, soutenus par un accompagnement et un mentorat professionnels. Une évaluation de la culture plus vaste avant et après le projet sera également menée par l’IWH afin de déterminer l’incidence des risques sur la santé au travail, sur la culture globale de la santé et de la sécurité dans une exploitation.
Le développement de matériel didactique a déjà commencé en janvier, et STN a lancé la première partie de son initiative sur le site en mai. Au cours de cette initiative de cinq ans, 25 sociétés minières devraient participer, ainsi que 25 sociétés du secteur forestier.
Si cette initiative se révèle être un succès, STN commencera à tester le cadre et à travailler avec l’IWH pour déterminer l’efficacité, l’aspect pratique et les ajustements nécessaires sur la base des retours des participants et participantes, et des résultats.
Interrogée quant aux défaillances ou difficultés majeures rencontrées dans les pratiques de surveillance de l’hygiène, Mme Schiewek indiquait une association de problèmes, notamment le manque de personnel qualifié et, même lorsque le personnel était présent, une certaine confusion entourant les bonnes procédures et la manière de les mettre en pratique convenablement.
Elle citait comme exemple de pratique la collecte d’échantillons d’air, de poussière et environnementaux au travail pour détecter des substances dangereuses. Si elle peut paraître simple, cette pratique peut être menée de manière incorrecte si des facteurs tels que la durée d’exposition pendant l’échantillonnage et l’utilisation de l’équipement nécessaire ne sont pas correctement gérées.
« Ce n’est pas que [ces pratiques] sont complexes, c’est simplement qu’il y a beaucoup de choses dont il faut tenir compte pour s’assurer que l’on obtient les bonnes informations, afin de prendre les bonnes décisions », indiquait-elle dans un entretien de suivi avec CIM Magazine.
Le bien-être mental est tout aussi important
Si cette initiative porte majoritairement sur la sécurité physique, elle prend aussi toute la mesure de l’importance du bien-être émotionnel et mental des travailleurs et travailleuses. « Imaginez-vous dans ce genre d’environnement de [travail]. Vous êtes en poste 10 ou 12 heures d’affilée, durant lesquelles vous êtes soumis à un bruit de 100 décibels pendant des heures. Vous imaginez donc l’impact que cela peut avoir sur l’audition d’autrui, mais également sur le [bien-être] mental », expliquait Mme Schiewek. « Si vous travaillez dans une zone où sont utilisés des équipements lourds, les nuisances sonores sont élevées, il fait chaud. Ces facteurs s’accumulent [et ont] une incidence exponentielle. »
Une fois les données recueillies sur une période de cinq ans, STN et l’IWH espèrent réunir des informations précieuses et tirer des enseignements de la situation, ce qui permettra de mieux comprendre les risques au travail. L’IWH se servira de son expertise en matière de recherche pour évaluer de manière indépendante la manière dont les programmes de formation améliorent la sécurité du personnel et réduisent les expositions dangereuses. Ceci permettra d’étendre ces connaissances à d’autres secteurs à haut risque.
« En fin de compte, c’est une grande opportunité de faire ce qu’il faut au-delà de nos murs. J’ai véritablement espoir que nous puissions avoir un impact et œuvrer pour la réalisation de notre mission, qui consiste à s’assurer que tout le monde rentre chez soi en bonne santé et en toute sécurité », concluait Mme Schiewek.
Traduit par Karen Rolland