Christine Healy de Northland Power a inauguré le programme de mardi à CIM CONNECT 2025. Photo : Jon Benjamin Photography
Christine Healy, présidente et directrice générale de Northland Power Inc., a prononcé le 6 mai son discours-programme au congrès et salon commercial CIM CONNECT sur le thème Energy Transition and the Evolving Energy Sector (La transition énergétique et le secteur énergétique en pleine évolution), qui explorait l’avenir de l’énergie et les moteurs de la transition énergétique.
« Nous vivons aujourd’hui l’une des transformations les plus indirectes de l’histoire contemporaine », déclarait-elle. « Nous transformons la manière dont le monde s’alimente en énergie. C’est une situation complexe et urgente, qui se produit en temps réel. Le simple fait de ne pas prendre de décision génère une décision, et cela a des conséquences. »
Mme Healy faisait remarquer que le Canada a le potentiel d’occuper une place de choix dans le paysage énergétique mondial. Son réseau électrique est le quatrième le plus écologique au monde. « Plus de 80 % de notre énergie provient de sources n’émettant pas de gaz à effet de serre », indiquait-elle. « C’est un accomplissement incroyable, mais nous nous trouvons dans les deux pour cent des pays en tête de liste dans le monde. »
À titre de comparaison, les combustibles fossiles représentent environ 80 % de la consommation principale d’énergie à l’échelle mondiale. Toutefois, l’investissement dans l’énergie renouvelable ne cesse de croître.
Mme Healy mettait aussi en avant les ressources naturelles phénoménales et les autres avantages du Canada. « Nous avons de l’expertise en génie, de l’expertise opérationnelle [et] un engagement fort vis-à-vis de l’état de droit », indiquait-elle. « Ceci en fait un partenaire fiable et nécessaire pour les 98 % du monde qui se trouvent derrière le Canada sur leur parcours vers des réseaux électriques plus écologiques. »
Toutefois, Mme Healy reconnaissait que plusieurs facteurs retiennent le Canada, notamment de longs délais d’approbation pour les grands projets. « Nous devons développer notre infrastructure sur le territoire. D’après la plupart des estimations, nous devrons doubler, voire tripler notre production d’électricité d’ici 2050 », indiquait-elle. « Malgré les possibilités, les ressources, le talent et l’urgence, le progrès au Canada reste lent, et cela s’explique majoritairement par la manière dont nous accordons des permis et approuvons les grands projets d’infrastructure. Je serais franche — si nous n’améliorons pas nos processus de réglementation, nous n’atteindrons pas nos objectifs, point final. »
Fondamentalement, les longs délais d’attribution de permis ne sont intéressants ni pour les investisseurs, ni pour les promoteurs, indiquait Mme Healy. « Ce n’est certainement pas une politique sensée pour un pays qui doit doubler ou tripler sa production d’électricité d’ici 2050 », indiquait-elle. « Nous avons besoin de processus clairs et apolitiques [et] d’un engagement massif pour être performants et efficaces dans nos procédures d’attribution de permis. »
Sans délais d’exécution concurrentiels et parcours clairement tracés, ajoutait Mme Healy, le capital partira ailleurs. « Les projets se font rares et ce sont les communautés qui en font les frais. Nous sommes perdants en termes d’emplois, d’infrastructure, et notre avenir est incertain », déplorait-elle. « La transition énergétique est une course contre la montre. À l’heure actuelle, ce sont les formalités administratives qui l’emportent. Si le Canada souhaite être un chef de file, et nous avons toutes les cartes en main pour l’être, nous avons besoin de processus de réglementation rapides, efficaces et transparents. »
Mme Healy concluait en rappelant que, si la transition énergétique requiert un effort collectif phénoménal et des actions concrètes des gouvernements, des sociétés et des communautés, les possibilités sont immenses.
Après le discours, un groupe d’experts et d’expertes ont débattu des enjeux et des possibilités qu’offrait la transition énergétique. Présidé par Sherry Iskander, directrice principale du centre d’excellence, de traitement et de technologie à Rio Tinto, le groupe incluait Sonia St-Arnaud, présidente et directrice générale d’EVLO, Scott MacKenzie, directeur des affaires de l’entreprise et extérieures à Toyota Motor Manufacturing Canada, Terry Smith, directeur de l’exploitation à Lundin Gold et Maxime Lanctôt, directeur général du développement énergétique au Canada à Rio Tinto.
M. MacKenzie indiquait que le réseau énergétique propre du Canada constitue l’un de ses avantages. « Par rapport à d’autres pays où Toyota est implanté, notre énergie est, soyons honnêtes, ridiculement bon marché. Qu’il s’agisse d’électricité ou de gaz naturel, nous disposons de ces ressources [au Canada] », indiquait-il. « Nous avons de nombreuses possibilités, la technologie existe ici, l’innovation aussi, [et] notre main-d’œuvre est hautement qualifiée. Tous les ingrédients du succès sont réunis. »
Le débat a abordé le rôle des minéraux critiques dans la transition énergétique, et la manière dont le gouvernement pouvait renforcer la chaîne d’approvisionnement nationale. M. MacKenzie admettait que la situation géopolitique actuelle, notamment entre le Canada et les États-Unis, avait engendré de nombreuses incertitudes. « Pour une société qui essaie de prévoir des investissements sur les années à venir, c’est une période extrêmement difficile », ajoutait-il. « Les gouvernements pourraient essayer d’apporter des certitudes. »
M. MacKenzie suggérait par exemple que les gouvernements s’investissent dans l’acquisition de produits pour les fabricants, ou offrent une certitude relative quant aux coûts des minéraux critiques. « Si l’on prévoit de construire une usine de production de batteries, les matières premières représentent 45 % ou 50 % de ce produit, et les prix de ces matières premières sont, franchement, tous azimuts », ajoutait-il. « Ceci crée une grande incertitude pour la société, mais aussi pour les consommateurs et consommatrices. »
M. Lanctôt était d’accord avec les commentaires de Mme Healy concernant les longs délais d’attribution de permis pour les grands projets de production d’énergie, et faisait remarquer que l’amélioration de ce processus permettrait d’attirer davantage de capitaux de placement. « Une vision à long terme est nécessaire pour pouvoir faire ce genre d’investissements considérables », indiquait-il. « Pour moi, une réglementation simple et recevable conférera une visibilité à long terme sur la situation en matière d’investissement. »
Traduit par Karen Rolland