La priorité actuelle pour les deux Premières Nations les plus affectées par la catastrophe de Mount Polley est d'assurer la réhabilitation du ruisseau Hazeltine, en photo ci-dessus, et de suivre de près l'aboutissement sur le long terme de la surveillance de l'environnement | Avec l'aimable autorisation d'Imperial Metals
Deux années après la rupture de la digue de retenue des résidus miniers durant l'été 2014 à la mine Mount Polley d'Imperial Metals, le bassin de retenue défectueux et les règles gouvernant ce genre de structures ont subi des modifications structurelles. D'après les professionnels de l'industrie, ces changements contribuent grandement à répondre aux besoins de réformes et à éviter qu'un tel accident se reproduise, bien qu'une grande partie du public reste insatisfaite.
Au site minier Mount Polley, la production a repris son cours après que le ministère de l'énergie et des mines (MEM) de la Colombie-Britannique (C.-B.) ait donné son aval pour que l'intégralité des activités recommencent en juin. Imperial Metals est parvenue à maîtriser l'érosion du sol et à reconstruire son bassin de retenue des résidus miniers sous les conseils avisés d'une commission indépendante d'examen des résidus (CIER).
« Nous avons non seulement réparé la zone qui a rompu et l'avons intégré à l'installation existante, mais nous avons également consolidé le périmètre entier et les principales digues du parc à résidus miniers », déclarait Steve Robertson, vice-président chargé des affaires générales d'Imperial Metals. « Ceci nous a permis de bénéficier d'un facteur de sécurité bien plus élevé ; en outre, nous avons entière confiance en notre parc à résidus miniers et en sa résistance pour les années à venir. »
Pour recevoir ses permis et élaborer un plan de surveillance de l'environnement sur le long terme, la société a dû établir une communication intensive avec les Premières Nations de la région. Brian Olding, expert-conseil dans le domaine de l'environnement auprès des Premières Nations Xats'ull (Soda Creek) et de Williams Lake, déclarait que les deux années qu'il a passées à étudier les modifications apportées aux permis et l'écologie ont permis aux communautés de mieux gérer les situations complexes résultant de ces modifications. « [Mount Polley dispose] des meilleurs experts-conseils travaillant sur ce cas », expliquait-il. « Ainsi, pour se mettre à leur niveau, nous avons dû développer notre propre expertise et apprendre à la gérer. » Les directeurs des ressources des Premières Nations et les deux communautés ont suivi une formation intensive consacrée à l'expertise en matière d'évaluation de l'environnement associée à l'exploitation minière.
Aujourd'hui, déclarait M. Olding, la grande priorité est d'assurer la réhabilitation du ruisseau Hazeltine et de suivre de près l'aboutissement sur le long terme de la surveillance de l'environnement. Malgré les grands progrès réalisés, suggérait-il, seuls des résultats supplémentaires permettraient de calmer l'anxiété et la frustration des communautés. « Certains membres des deux communautés remettent tout en doute, tout simplement en raison de l'ampleur de l'accident qui a eu lieu », indiquait-il.
Révisions cohérentes du code
Les dispositions qu'exigent les enquêteurs ont émergé des directives provinciales et professionnelles. Au mois de juillet, un comité provincial d'examen du code minier a modifié le code de santé, de sécurité et de restauration des mines pour aborder 20 des 43 recommandations établies par le comité d'examen technique indépendant, l'inspecteur en chef des mines et le vérificateur général de C.-B.
Les nouvelles exigences comprennent notamment un examen des meilleures technologies disponibles en matière de stockage des résidus miniers et la mise en œuvre d'une CIER financée par la société pour dispenser des conseils d'experts et non exécutoires. Peter Williams, premier vice-président chargé des services techniques chez Seabridge Gold, déclarait être très favorable à ces mesures. La CIER dédiée à la proposition de projet d'or et de cuivre KSM de Seabridge a fourni plus de 90 points d'intervention dans son premier rapport du mois d'avril ; elle recommandait notamment d'améliorer le système de drains souterrains de la digue ainsi que de déterminer l'équilibre entre les matériaux de construction nécessaires et disponibles. « Les problèmes apparaissent généralement dès le début dans beaucoup de digues », déclarait M. Williams. « On veut construire la digue si vite que l'on ne dispose souvent pas des matériaux de construction nécessaires, et c'est là qu'elle commence à se remplir trop vite. »
Fair Mining Collaborative, une organisation à caractère éducatif dont l'objectif est de renforcer la capacité d'engagement informé des communautés et des Premières Nations de Colombie-Britannique auprès de l'industrie minière, a publié sa propre série de recommandations, que les révisions au code de la C.-B. ont remplies, voire même surpassées. « Nous devons rendre à César ce qui lui appartient », déclarait Glenn Grande, chercheur confirmé. Cependant, parmi les demandes faites au comité d'examen qui n'ont pas été prises en compte figuraient une CIER provinciale (« les membres étaient intéressés mais ne pouvaient la financer »), l'attribution de permis sur la base de la performance antérieure d'une société minière, la protection des divulgateurs pour les employés de mines dénonçant des irrégularités ainsi qu'une demande de subordination des travaux d'exploration et d'exploitation minière à tout accord requis par les Premières Nations affectées.
Réponse professionnelle
Des comités ayant des intérêts communs ont mis à jour les directives relatives à la gestion des résidus miniers publiées par l'association minière du Canada (AMC), l'association canadienne des barrages (ACB) et l'Association of Professional Engineers and Geoscientists of British Columbia (APEGBC, l'association des ingénieurs et géoscientifiques professionnels de la Colombie-Britannique). D'après Ben Chalmers, vice-président du développement durable pour l'AMC, plusieurs associations professionnelles coopèrent pour apporter des réponses cohérentes et maintenir une norme mondiale unique.
Le comité de direction de l'AMC a approuvé en juin dernier la première série de modifications apportées à son protocole de gestion des résidus Vers le développement minier durable (VDMD). « L'une des modifications les plus importantes, à notre avis, concerne la substitution des exigences en matière de vérification », déclarait M. Chalmers. Les membres de l'AMC sont actuellement tenus de mener des vérifications internes pour atteindre le second plus haut niveau de pratique, le AA. Ce changement repousse l'exigence en matière de vérification interne au troisième plus haut niveau de pratique, à savoir le A. L'AMC exigera également de tous ses membres qu'ils développent des plans pour atteindre le niveau A et qu'ils les mettent en œuvre dans les trois ans.
Peter Mitchell, directeur de l'exercice professionnel, des normes et du développement auprès de l'APEGBC, indiquait que son comité a défini les rôles et responsabilités de l'« ingénieur d'études » et de l'« ingénieur ayant apposé son sceau sur un document » dans les nouvelles directives relatives à l'exercice professionnel pour la caractérisation sur le site des fondations des digues et des directives modifiées pour les examens légiférés en matière de sécurité des digues.
Malgré l'utilisation fréquente de ce terme après la catastrophe, jusqu'à présent, l'« ingénieur ayant apposé son sceau sur un document » n'intervenait pas dans la construction des digues. Il n'existait d'ailleurs pas non plus de directive claire stipulant qu'un nouvel ingénieur devrait assumer les responsabilités du précédent. Le premier ingénieur d'études de Mount Polley a été remplacé en 2011, et après la catastrophe, des différends ont émergé quant au degré de responsabilité de chaque bureau d'études techniques dans l'identification et la résolution des problèmes.
Ces modifications, ainsi que le nouveau code minier de la Colombie-Britannique, donnent également des instructions pour signaler les dangers, expliquait M. Mitchell. « L'obligation contractuelle des ingénieurs envers la société minière, leur connaissance du problème, leur responsabilité envers la société minière avec laquelle ils ont un contrat et leur responsabilité envers les autorités réglementaires manquaient de clarté. »
Perception du public
D'après Calvin Sandborn, directeur juridique de l'Environmental Law Centre (le centre de droit de l'environnement) de l'université de Victoria, les réponses de l'industrie ne satisferont pas un public récemment mis au courant des dangers de l'exploitation minière.
« Selon moi, le changement le plus notable est que le public n'a plus confiance en la capacité du gouvernement à réglementer l'industrie minière », déclarait-il. « En 2011, nous avions préconisé des changements radicaux à la réglementation minière. La réponse du gouvernement a été claire ; il prétendait disposer du meilleur système réglementaire au monde et nous enjoignait de nous effacer. Tous ces arguments se sont effondrés. »
Les protestations et les poursuites continuent deux ans après la catastrophe, ce qui montre bien que le public n'est pas encore prêt à pardonner et à oublier. Deux protestations à deux jours d'intervalle visaient le site minier et le siège de la société à Vancouver. En août, la Première Nation Tsilhqot'in a engagé des poursuites civiles contre le gouvernement de la C.-B., Imperial Metals et les anciens bureaux d'études techniques de Mount Polley, Knight Piésold et Amec Foster Wheeler (tous deux également poursuivis par Imperial pour négligence en juillet). Deux entreprises touristiques de la région du lac Quesnel ont également engagé des poursuites contre ces deux accusés en juillet.
Comme de nombreuses personnes qui déplorent la façon dont est gérée la situation, David Chambers, président du Center for Science in Public Participation (CSP2, le centre des sciences pour la participation du public), est particulièrement inquiet du peu d'importance accordé au problème des bassins de retenue recouverts par les eaux. « D'un [point de vue] pratique, on constate que rien n'a changé à ce niveau-là », déplorait-il, citant en exemple les plans de gestion des résidus des mines KSM de Seabridge et Red Chris d'Imperial.
Dirk van Zyl de l'université de la Colombie-Britannique (UBC), lequel est à l'origine de la campagne pour l'élimination du stockage de l'eau, a été chargé par Seabridge d'examiner les options possibles à l'aménagement du bassin de retenue recouvert d'eau prévu pour la mine KSM. Son examen d'août 2016 vient appuyer la conception originale.
Traduit par Karen Rolland