Jeff Hussey et Jerrod Downey.

Les marchés des métaux évoluent rapidement. La fin de la pandémie de COVID-19 qui semble proche, et la demande accrue en technologies propres et en infrastructure ont entraîné une hausse considérable des prix des métaux, marquant l’avènement d’un nouveau supercycle pour l’industrie minière.

Pourtant, les sociétés minières pourraient ne pas être prêtes à réagir et à tirer pleinement profit de cet essor. Prenant la parole pour son discours-programme le dernier jour du congrès et salon commercial l’Expo de l’ICM (CIMVTL21), le président et directeur de l’exploitation de Métaux Osisko Jeff Hussey a démontré que la surspécialisation de l’industrie minière n’a pas préparé les sociétés à faire face à la hausse de la demande en métaux, particulièrement en métaux de base tels que le zinc et le nickel. Il faudra indéniablement faire preuve de résilience et d’innovation pour procéder aux changements nécessaires afin de répondre aux besoins.

« Dans les années 1970 et 1980, les sociétés étaient des conglomérats de plusieurs industries. C’était la norme, pour les sociétés minières, de sylviculture et de fabrication en aval, d’utiliser les matières premières qu’elles produisaient pour neutraliser les effets des cycles miniers », expliquait M. Hussey. « Dans les années 1990, les fonds communs ont exigé une restructuration des sociétés de manière à pouvoir mesurer les indicateurs financiers par industrie. Parallèlement, les grandes sociétés minières ont commencé à réduire ou à arrêter leurs activités d’exploration, et à [plutôt] se concentrer sur des projets prêts à démarrer. »

Les fonds négociés en bourse ont explosé dans les années 2010, indiquait M. Hussey, entraînant « une granularité supplémentaire des sociétés » réparties en type de matières premières ou en secteur. À ceci venaient s’ajouter des cycles baissiers de 100 ans pour les évaluations des métaux de base en raison des effondrements du marché, qui ont entraîné un investissement insuffisant dans le secteur des métaux de base.

« Si l’on me demande ce qui pourrait gêner la production de nouveaux métaux pour l’avenir, c’est à mon avis le manque de découvertes et de développement. Les fonds spécialisés disparaissent, les fonds généralistes ne s’intéressent pas aux projets en phase préliminaire, [et] la vente abusive à découvert des actions de petites sociétés minières est passée au crible », expliquait M. Hussey. « Le financement accréditif est formidable, mais peut être à double tranchant… De nos jours, les petites sociétés minières ont généralement plus de 200 millions d’actions en suspens à l’étape de l’étude de faisabilité. »

La demande en métaux de base a été remarquable, notamment en raison de la hausse des véhicules électriques à batterie, des énergies renouvelables telles que le solaire et l’éolien, et des grands investissements dans l’infrastructure comme le plan récent en faveur des infrastructures annoncé par le nouveau président des États-Unis Joe Biden, qui dépassera les 2 000 milliards de dollars américains. Cependant, toutes les matières premières n’ont pas les projets nécessaires pour faire face à la demande. D’après M. Hussey, « la hausse prévue exigera deux fois plus de cuivre et de zinc par rapport aux niveaux de l’offre de 2019, et quatre fois plus de nickel et de cobalt. Pour certains métaux, ce n’est tout simplement pas vraisemblable. L’avenir du zinc et du nickel s’annonce difficile. »

Pour le zinc particulièrement, dont la réserve de projets ne sera pas suffisante, selon M. Hussey, l’insuffisance des investissements pour ce qui est de l’offre entraînera très probablement un choc des prix qui pourrait persister des années durant. Les récupérations de minéraux et les capacités étant déjà à des niveaux élevés, une optimisation supplémentaire des procédés ne permettra pas de combler les lacunes.

La solution, suggérait M. Hussey, impliquera que les grandes sociétés minières se fassent une priorité d’investir dans l’exploration et le développement. Le groupe de sociétés Osisko, qui est composé de plusieurs sociétés individuelles spécialisées dans l’exploration, la mise en valeur des mines ainsi que les redevances minières et aurifères, a bénéficié de suffisamment de flexibilité pour investir dans l’espace des métaux de base.

D’après une évaluation économique préliminaire de juillet 2020, le projet de plomb et zinc Pine Point de Métaux Osisko, situé dans les Territoires du Nord-Ouest, a une valeur actualisée nette après impôts de 500 millions de dollars, avec un taux de rentabilité interne de 29,6 % et une ressource minérale indiquée de 12,9 millions de tonnes affichant une teneur de 4,56 % de zinc et de 1,73 % de plomb. D’après Osisko, si elle entre en phase de production, la mine Pine Point deviendrait la quatrième plus grande mine du continent américain et la neuvième plus grande mine de zinc à l’échelle mondiale.

Le développement de la mine Canadian Malartic de Minière Osisko au Québec (et son rachat ultérieur par Agnico Eagle et Yamana Gold) a mené à la création d’Osisko Redevances aurifères, de Métaux Osisko et, récemment, d’Osisko Développement. M. Hussey expliquait que ce genre de diversification avait permis au groupe de tenir bon durant la phase baissière des prix des métaux en investissant dans des métaux de base indispensables.

« Depuis son lancement, le groupe s’est axé sur l’exploration, le développement et la production », indiquait M. Hussey. « Nous avons besoin de plusieurs groupes comme Osisko pour répondre à la demande prévisionnelle en termes d’objectifs de décarbonisation, y compris des sociétés de prospection, de développement et des entrepreneurs. »

Hussey a terminé son discours en donnant des conseils quant à la stratégie à long terme de l’industrie.

« Soyez résilients ! Pour répondre à la demande en métaux, nous aurons besoin de plus d’exploration et de développement au court et au long terme. L’élaboration de projets, qui est négligée dans le secteur des métaux de base, sera désormais impérative, surtout pour le zinc et le nickel. Nous devons trouver et développer davantage de gisements miniers pour répondre à la demande future, tout en reconnaissant que l’innovation est indispensable pour assurer le succès de l’exploration et approvisionner cette réserve de projets, et également pour réduire les coûts d’extraction et de broyage et optimiser encore davantage les récupérations. »

« L’avenir s’annonce brillant, préparez-vous. »