Avec l'aimable Andrée St-Germain

Andrée St-Germain, directrice financière d’Integra Resources, a grandi à Gatineau, au Québec. Enfant, elle se délectait des histoires que lui racontait son oncle, géologue dans le camp de Val-d’Or ; ce n’est toutefois que lorsqu’elle a commencé à travailler comme preneuse ferme il y a dix ans qu’elle a pour la première fois envisagé une carrière dans l’industrie minière.

Mme St-Germain a suivi une formation à distance avec l’université du Québec (TÉLUQ) et a obtenu son baccalauréat en administration des affaires de Whistler, en Colombie-Britannique (C.-B.). Il aurait donc été naturel qu’elle retourne dans sa province natale pour poursuivre ses études. Pourtant, son intérêt naissant pour le domaine de l’investissement l’a poussé à rester proche des transactions de Bay Street, au cœur du quartier financier de Toronto. Dès qu’elle a obtenu sa maîtrise en administration des affaires de la Schulich School of Business (l’école de commerce Schulich) de l’université de York en 2009, Dundee Capital Markets l’a embauché dans son équipe de services bancaires d’investissement.

« Les premiers mois, j’ai été placée au sein d’une équipe où j’ai été confrontée à plusieurs secteurs. La biotechnologie ou les technologies de l’information ne m’intéressaient guère, mais je trouvais fascinant le secteur minier. Les découvertes et l’extraction de métaux et de minéraux du sol depuis des centaines d’années me passionnaient », déclarait Mme St-Germain. À 39 ans, elle recevait le prix Eira Thomas pour les jeunes professionnels du secteur minier. « De nos jours, l’industrie minière est confrontée à de grands enjeux et elle prend des mesures concrètes pour y faire face. Je suis heureuse de contribuer à ce changement, qu’il s’agisse des questions de diversité de genre, des nouvelles initiatives pour attirer, préserver et développer les talents, ou des nouvelles technologies qui améliorent l’efficacité des procédés tout en réduisant notre empreinte environnementale. »

Les semaines de travail de plus de 90 heures qu’elle a vécues à Dundee étaient certes éprouvantes, mais aussi grisantes (sur une période de plus de six mois, Mme St-Germain a travaillé sans un jour de congé). Après avoir passé quelques années à découvrir et comprendre les marchés des capitaux miniers, à conseiller les sociétés quant aux fusions et acquisitions et à aider avec les financements, elle était prête à faire le grand saut pour rejoindre son secteur de prédilection. En 2013, à l’âge de 33 ans, elle a rejoint la société Golden Queen Mining de Vancouver en tant que directrice financière, où elle a aidé à financer le développement et la construction de la mine d’or et d’argent Soledad Mountain de la société en Californie.

Forte de son expérience en matière de construction de mines et de sa connaissance parfaite de deux langues, Mme St-Germain a rejoint la société Integra Gold de Vancouver en tant que directrice financière en 2017, alors que la société se préparait à développer le projet aurifère Lamaque dans la région de l’Abitibi, au Québec, puis elle a aidé la société à faciliter la vente d’Integra à Eldorado Gold.

Une fois l’acquisition de 590 millions de dollars réalisée, l’ancien groupe de direction (qui incluait Mme St-Germain ainsi que le président et chef de la direction George Salamis) a formé Integra Resources et a acheté à Kinross Gold le projet d’or et d’argent DeLamar en Idaho.

Cette même année, dans un contexte financier difficile (la PDAC parlait d’une baisse de 60 % d’une année sur l’autre en termes de valeur des financements des acquisitions fermes pour les petites sociétés d’exploration en 2018), Integra est parvenue à recueillir 17 millions de dollars par le biais du financement sursouscrit d’une acquisition ferme et d’un placement privé sans l’entremise d’un courtier. La petite société utilise actuellement cet argent pour développer son site DeLamar et élargir son enveloppe foncière en Idaho.

Mme St-Germain est également directrice de Barkerville Gold Mines et Ascot Resources Ltd. Elle attribue son ascension rapide à sa solide éthique professionnelle, sa volonté de prendre des risques, son sens aigu des finances, ses capacités de résolution des problèmes, son initiative et son bilinguisme. « Repérez les possibilités, saisissez les occasions qui se présentent et montrez-vous à la hauteur », conseillait-elle aux jeunes professionnels commençant une carrière dans le secteur minier.

D’après Mme St-Germain, l’industrie est à l’aube de grands changements, même si elle a tendance à se cramponner au statu quo. Ainsi, les occasions sont nombreuses pour les diplômés présentant un éventail de qualifications, depuis les géologues et ingénieurs qui exploreront et développeront de nouveaux gisements jusqu’aux travailleurs sociaux qui sauront gérer les relations avec les communautés.

« Les sociétés minières vendent un produit indifférencié. Elles ne fixent pas de prix et n’ont pas besoin d’en faire la publicité. C’est sans doute la raison pour laquelle elles résistent autant aux changements et à l’innovation. Elles vendent le même produit qu’elles vendaient il y a des siècles », déclarait-elle à l’équipe du CIM Magazine durant le congrès de la Prospectors and Developers Association of Canada (PDAC, l’association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs) en mars dernier. « C’est le moment idéal pour rejoindre ce secteur. On reconnaît peu à peu le besoin de changer, d’innover, d’être plus diversifié. »

 

Mme St-Germain est née à Haïti, où son père, professeur à la faculté d’éducation de l’université d’Ottawa, supervisait et formait l’équipe du ministère de l’éducation qui gérait la programmation des projets éducatifs dans tout le pays. Bien qu’elle soit revenue sur le sol canadien alors qu’elle était encore toute petite, elle préserve toutefois des liens forts avec ce pays des Caraïbes. Elle parraine six enfants de deux villages sur l’île, et y a passé un mois pour aider à la reconstruction de l’un des villages après le passage de l’ouragan Matthew de 2016, qui a détruit l’infrastructure du pays et a entraîné la mort de milliers de personnes.

Malgré son programme chargé, elle prend toujours le temps de pratiquer une activité physique. Elle se rend au travail en course à pied ou à vélo, et souhaite chaque année prendre part à une ou deux épreuves des courses Ironman (l’homme de fer), qui comprennent une nage de 1,9 kilomètre (km), un parcours à vélo de 90 km et une course à pied de 21,1 km. Avec son partenaire, lui aussi directeur financier dans le secteur minier, ils se motivent mutuellement et font du vélo d’appartement en regardant les derniers épisodes de la série Game of Thrones.

Elle conseille à tous les jeunes professionnels d’intégrer l’activité physique à leur routine afin de préserver leur santé mentale et physique ainsi que leur énergie. Elle préconise également de réunir un cercle de personnes, internes et externes à l’organisation, qui pourront prodiguer des conseils en cas de problèmes. Pour ce qui est de travailler au sein d’une industrie où la qualité des projets et la gestion varient considérablement, elle recommande de bien chercher les sociétés ayant des équipes de direction et des projets suffisamment solides pour résister à un ralentissement économique inévitable.

« Si vous êtes passionné(e) et que vous travaillez dur, les sociétés souhaiteront vous garder », indiquait Mme St-Germain. « Vous deviendrez, en quelque sorte, une denrée rare et recherchée. »

Traduit par Karen Rolland