Avec l’aimable autorisation de Nathan Skubovius

Nathan Skubovius n’avait pas prévu de poursuivre une carrière dans l’exploitation minière. De fait, il a décroché son premier diplôme à l’université Thompson Rivers en architecture et techniques industrielles. C’est après avoir remporté un concours de conception et passé l’été en tant que dessinateur à la mine de New Afton de New Gold, où il dessinait les bâtiments du site minier, qu’il a envisagé de se tourner vers ce secteur. « À la mine, beaucoup m’ont encouragé à retourner à l’université pour étudier le génie », expliquait M. Skubovius.

Après cette expérience, il a décidé de s’inscrire au programme de génie minier de l’université de la Colombie-Britannique (UBC). Chaque été pendant ses études de génie minier, M. Skubovius s’efforçait de travailler dans toute la palette du procédé minier plutôt que de se cantonner à un seul domaine trop prématurément. Il a été assistant géologue dans le cadre du projet Schaft Creek de Teck Resources, ingénieur en aérage et ingénieur de la route des glaciers à la mine Brucejack de Pretium Resources, coordonnateur de l’aménagement du territoire au gouvernement central de la nation des Tahltans, et enfin adjoint à l’ingénieur en géotechnique à Kutcho Copper.

En 2019, M. Skubovius est devenu le premier membre de la Première Nation des Tahltans (dont le territoire couvre 11 % du nord de la Colombie-Britannique, notamment les communautés de Telegraph Creek, Dease Lake et Iskut) à obtenir son diplôme du Norman B. Keevil Institute of Mining Engineering (l’institut Norman B. Keevil de génie minier) de l’UBC. Après avoir obtenu son diplôme, il a décroché un emploi dans le département de géotechnique appliquée à la mine de cuivre de Highland Valley de Teck et, en juillet, a endossé le rôle d’ingénieur préposé au forage et au dynamitage.

L’ICM : Vous êtes le premier diplômé tahltan du programme de génie minier de l’UBC. Quelle importance cela revêt-il pour vous ?

M. Skubovius : Ma réussite, je l’espère, ouvrira la voie à d’autres ingénieurs miniers tahltans à l’avenir. Je ne suis pas le premier ingénieur de ma communauté, et c’est l’exemple des précédents qui m’a incité à me lancer dans des études de génie. J’étais conscient des possibilités qui s’ouvraient à moi. Mon souhait est que d’autres voient en ma réussite une motivation pour poursuivre leurs études.

L’ICM : Avez-vous proposé un mentorat professionnel aux jeunes de la nation des Tahltans ?

M. Skubovius : Grâce au programme que j’ai suivi à l’UBC, j’ai eu l’idée de fonder un programme de secondaire axé sur l’aventure qui associerait l’aventure, la culture et la formation pour la communauté étudiante des Tahltans. L’objectif premier de ce programme était de leur transmettre la passion nécessaire pour se lancer dans des études postsecondaires. J’ai contribué à la gestion et la mise en route du programme au cours des trois dernières années, mais je suis devenu responsable des commandites lorsque j’ai décroché un emploi à temps plein après l’université.

L’ICM : Quelle a été l’importance de cette expérience, et comment vous a-t-elle aidé à anticiper votre carrière ?

M. Skubovius : Cette expérience a été extrêmement valorisante. J’étais guide du programme chaque année et pouvais former la prochaine génération d’étudiantes et étudiants tahltans. D’après moi, ce programme sera une source d’inspiration pour la communauté étudiante et les incitera à poursuivre leurs études. Je suis très heureux de pouvoir en faire partie. La mise en œuvre de ce programme m’a appris comment travailler avec les autres, lancer une activité à but non lucratif et collaborer avec un conseil d’administration pour prendre des décisions. Cela n’a pas été de tout repos, et il reste encore beaucoup à faire, mais la vision de ce programme et la façon dont il évolue me satisfait. Cette année, en raison de la pandémie de COVID-19, c’est notre formateur principal qui organise la formation des guides de manière à en former davantage pour l’année prochaine.

L’ICM : Quelles sont vos ambitions professionnelles ?

M. Skubovius : Je suis très enthousiaste à l’idée de faire partie du processus décisionnel d’une organisation pour l’élaboration d’un nouveau projet. À l’avenir, je pense m’orienter davantage sur la conception de projet. De fait, ma formation en architecture et génie minier favorise un état d’esprit moins traditionnel.

L’ICM : Vous avez occupé différentes fonctions depuis le début de votre carrière. Quel est le fil conducteur ?

M. Skubovius : Tous mes postes étaient très différents. Lorsque je travaillais à New Afton, j’ai créé des liens amicaux avec tout le monde. À l’époque, on me conseillait « de varier autant que possible mes expériences de manière à ce que, dès l’obtention de mon diplôme, je sache quelle direction prendre ». Je gardais ces conseils dans ma poche avant même de commencer à déposer ma candidature pour divers postes, et c’est la raison pour laquelle je ne suis pas retourné travailler pour une société en particulier pendant mes études.

L’ICM : Avez-vous eu du mal à vous vendre et à présenter sous un bon jour vos compétences lors d’un entretien d’embauche ?

M. Skubovius : J’étais peu conventionnel dans ma manière de recevoir des propositions d’emploi. De fait, je répondais peu aux offres d’emploi. Tout s’est fait par mes connaissances, en rencontrant des personnes et en assurant un suivi par courriel.


À DÉCOUVRIR: Larry Clark, ancien dirigeant chevronné du secteur minier, conseille les jeunes professionnels de l’industrie


L’ICM : Quel genre de mise en réseau pratiquiez-vous ?

M. Skubovius : À l’UBC à Vancouver, un groupe important de sociétés se trouve à proximité. Beaucoup participent à des événements. Ce qui m’a beaucoup aidé, c’est d’être sociable, de parler aux personnes présentes, de leur demander où elles travaillaient et ce qu’elles faisaient. Certains événements de l’ICM et l’AME BC Roundup (le tour d’horizon sur l’exploration minière de l’association minière du Canada) ont également lieu à Vancouver. J’ai participé à ces événements, conservé précieusement des cartes de visite en consignant à l’arrière des cartes ce dont on avait parlé ensemble, de manière à pouvoir m’y retrouver et reprendre contact ultérieurement par courriel avec ces personnes en leur rappelant notre conversation. C’est ainsi que j’ai procédé, en parlant avec ces personnes et en leur demandant si certains postes allaient devenir vacants au cours de l’été qui suivait.

L’ICM : Comment préconisez-vous d’aborder les personnes participant à un événement de mise en réseau ?

M. Skubovius : Présentez-vous si vous en avez l’occasion, c’est un excellent moyen. Engagez la conversation avec une personne en lui demandant où elle travaille, où elle a grandi peut-être, si ce n’est pas trop personnel, quel genre d’expériences elle a vécu, ou même si elle a des recommandations à faire à quelqu’un qui arrive à peine dans ce secteur. Ensuite, laissez-la éventuellement vous raconter une histoire mais faites preuve de discrétion et de calme, et ne soyez pas agressif dans votre approche.

Quand j’étais étudiant, on nous recommandait de faire faire des cartes de visite. C’est ainsi que je me suis retrouvé avec une pile de cartes de visite avec le logo de l’UBC, mes nom et prénom, et quand on me donnait une carte de visite, je tendais la mienne. C’était un élément important de la mise en réseau.

L’ICM : Quelle a été votre expérience la plus précieuse à l’université ?

M. Skubovius : Je pense véritablement à deux cours qui ne faisaient pas partie du cursus traditionnel des études de génie, « Anthropologie 101 » et « Esprit d’entreprise 101 ». Ils avaient lieu à l’autre bout du campus et je devais parfois en rater certains car j’étais souvent en retard. Pourtant, c’est dans ces cours que j’ai développé ma connaissance du monde. Le cours d’anthropologie portait sur l’apprentissage de différentes cultures dans le monde entier ; le cours sur l’esprit d’entreprise, quant à lui, a bouleversé mon état d’esprit quant à la façon de s’emparer d’une idée, de la satisfaire et de la mettre en pratique.

L’ICM : Quel conseil donneriez-vous à un étudiant ou une étudiante de première année en génie minier ?

M. Skubovius : Soyez sociable. Participez à un maximum d’activités organisées par votre département. Lorsque vous commencez à envoyer votre candidature pour un emploi, sachez que vos collègues de cours ou des étudiantes et étudiants des années supérieures travaillent généralement dans l’une des sociétés qui recrutent, et ils vous recommanderont auprès de la société. S’ils vous connaissent, vous obtiendrez une bonne recommandation. Un autre conseil serait de vous acheter une jolie tenue, de faire faire des cartes de visite et de commencer à vous rendre aux dîners des anciens élèves, aux nuits étudiantes de l’ICM et à un maximum de réceptions de l’industrie dont celles de la société canadienne du traitement des minerais (SCTM), de la PDAC, de la SME et à MINExpo. Enfin, n’ayez pas peur de sortir de votre zone de confort. Nombre d’emplois sont proposés dans différentes régions du monde ; ouvrez-vous à une nouvelle expérience.

L’ICM : Si vous aviez été à la recherche d’un emploi en pleine pandémie de COVID-19, quelle aurait été votre stratégie de recherche ?

M. Skubovius : Assurez-vous que votre curriculum vitæ est à jour, tout comme votre profil sur LinkedIn, puis commencez à envoyer un maximum de candidatures. LinkedIn est une plateforme qui peut être utilisée de manière très intelligente. N’hésitez pas à suivre plusieurs sociétés minières qui vous intéressent. Si vous le pouvez, cherchez qui travaille dans le département des ressources humaines dans les différentes exploitations minières et entrez en contact avec ces personnes, car ce sont généralement elles qui publieront une offre d’emploi sur leur profil LinkedIn personnel, et pas forcément sur la page de la société.

Dans un climat aussi austère, si vous obtenez un poste qui ne correspond pas exactement à ce que vous recherchez, n’hésitez pas trop avant d’accepter le poste. L’industrie connaît actuellement un changement spectaculaire avec le départ à la retraite de nombreuses personnes, aussi on observe un mouvement non négligeable au sein des bureaux d’études techniques. Vous n’aurez pas à attendre des siècles pour trouver un poste vacant ; dans l’idéal, vous êtes peut-être déjà en poste et il n’est pas trop contraignant de changer de bureaux.

Pour revenir à la partie mise en réseau, j’ai conservé la plupart des cartes de visite qu’on m’a données. Les notes que j’ai prises sur ces cartes me sont encore utiles. N’hésitez pas à recontacter ces personnes et demandez-leur si un poste vacant se profile dans leur société dans un proche avenir ou si elles connaissent quelqu’un ou une société en recherche, et tenez-vous prêt(e). Mettez tout en œuvre pour décrocher ce travail et ne reculez devant rien.