Bruno Oberle, président du Global Tailings Review. Avec l’aimable autorisation de Bruno Oberle
D’après Bruno Oberle, le président du Global Tailings Review (GTR, l’examen international des résidus miniers), la société dans son ensemble n’est plus disposée à accepter les catastrophes environnementales telles que les ruptures de digue à stériles provoquées par des sociétés des industries de l’extraction.
« Les conséquences sont claires pour l’industrie minière, que ce soit au niveau de la perception du public, des changements au niveau des réglementations ou de la relation avec les investisseurs et de leur perception de l’industrie », expliquait-il. « Cet examen changera inévitablement l’industrie minière. »
Étant donné sa position au sein du GTR (l’un des nombreux rôles qu’il occupe), M. Oberle fait de son mieux pour s’assurer que l’industrie minière développe et adopte le genre de pratiques qui empêcheront les catastrophes à l’avenir. Cet objectif est, pour ainsi dire, sa vocation.
Depuis les années 1970, M. Oberle a évolué dans le domaine de l’environnement. Il a obtenu son doctorat à l’institut fédéral suisse de technologie à Zurich (ETH Zurich). En 2005, il a été nommé directeur de l’office fédéral de l’environnement (OFEV) du gouvernement suisse, récemment créé, et secrétaire d’État à l’environnement. En 2016, il a rejoint l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) où il est professeur d’économie verte et où il dirigeait l’International Risk Governance Center (IRGC, le centre international de gouvernance des risques) de l’université.
« En tant que secrétaire d’État à l’environnement, j’ai dû engager un dialogue international long et intense ainsi qu’un processus de négociation structuré afin d’établir un cadre de règles permettant de faire face aux enjeux environnementaux », expliquait-il. « J’ai appris à accepter les différents points de vue, même ceux qui divergeaient beaucoup des miens, afin de trouver un équilibre entre eux. [J’ai compris] qu’il était très difficile d’avoir un débat constructif si l’on considère la partie adverse comme un ennemi et non comme un partenaire. »
Outre son travail au gouvernement, M. Oberle a contribué à plusieurs organisations et projets sur les ressources naturelles et le développement au fil des ans. Il est actuellement membre de l’International Resource Panel (IRP, le panel international pour la gestion durable des ressources) et coprésident de la Green Digital Finance Alliance (GDFA, l’alliance pour la finance numérique durable), entre autres. Il a également été conseiller en matière de gestion de l’environnement pour plusieurs sociétés du secteur privé.
Son expérience en matière de débats internationaux et de gestion des risques a attiré l’attention des autres personnes préposées au GTR. Après la catastrophe à Brumadinho en janvier 2019, le programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), l’International Council on Mining and Metals (ICMM, le conseil international des mines et métaux) et les principes pour l’investissement responsable (PRI) des Nations Unies ont créé le GTR afin d’évaluer les pratiques actuelles en matière de gestion des stériles dans l’industrie minière à l’échelle mondiale.
En juin 2019, le GTR a commencé à rencontrer régulièrement un grand groupe consultatif de parties prenantes afin d’établir une norme pour les pratiques relatives à la gestion des stériles, qui fera désormais partie des engagements des membres de l’ICMM. En septembre, un groupe d’experts pluridisciplinaire dirigé par M. Oberle a terminé la première ébauche de l’examen et a entamé les consultations dans diverses juridictions minières telles que le Kazakhstan, la Chine, le Chili et autres. M. Oberle a organisé des ateliers complets de consultation en personne afin d’écouter les personnes directement affectées.
La portée de cet examen est vaste, mais d’après le GTR, le processus consiste à inclure un examen « du système mondial et transparent de classification [des installations de stockage des résidus] fondé sur les conséquences, avec des exigences adaptées à chaque niveau de classification » ; à travailler sur un « système dédié à l’évaluation crédible et indépendante des installations de stockage des résidus » ; et à définir des « exigences pour la planification et la préparation dans des situations d’urgence ». Le GTR souhaite atteindre ces objectifs tout en consultant un large éventail de personnes représentant un groupe varié de perspectives.
« L’adoption d’une approche multipartite était essentielle à l’examen », expliquait-il. « La même attention a été accordée aux intérêts et aux inquiétudes des acteurs de l’industrie, ainsi qu’à d’autres parties prenantes exprimant leur intérêt et leur préoccupation telles que les communautés, les assurances et les investisseurs, entre autres. »
Après les premières consultations, qui ont pris fin en décembre, M. Oberle et le groupe d’experts ont commencé à élaborer en janvier des recommandations spécifiques pour la norme fondée sur des discussions entre parties prenantes. D’après M. Oberle, toutes les personnes préposées au GTR sont prêtes à mener la discussion finale sur la norme et ses documents d’accompagnement. La pandémie de COVID-19 a, certes, ralenti l’examen, mais il a bon espoir de finaliser les discussions d’ici l’automne.
Concernant l’examen en lui-même, M. Oberle indiquait qu’il avait favorablement accueilli cette occasion lorsque les trois autres personnes préposées au GTR l’avaient contacté. « J’ai accepté sans hésiter », déclarait-il. « Cet examen est indispensable, et je suis honoré d’en faire partie. »Traduit par Karen Rolland