Le dispositif ECORE d’Elemission permet d’effectuer le dosage sans préparation d’aucun échantillon. Avec l’aimable autorisation d’Elemission

Les résultats des dosages des éléments minéraux ont connu des retards importants en 2021. Les délais d’exécution classiques, généralement de deux à six semaines, ont atteint de huit à douze semaines. L’activité de forage a considérablement augmenté dans toute l’industrie après plusieurs années de baisse de la demande et de l’investissement dans le dosage. Ainsi, les laboratoires ont dû rattraper leur retard tout en jonglant avec des pénuries de main-d’œuvre et les mesures de sécurité mises en œuvre dans le cadre de la pandémie. Les retards qui ont suivi ont entraîné la frustration de nombreuses sociétés minières, qui aspiraient à trouver des moyens plus efficaces de déterminer les ressources minérales que renfermaient leurs sites de forage.

« Prenons un exemple. Vous menez une campagne de forage sur un mois. Vous forez la carotte, l’envoyez au laboratoire, attendez deux ou trois mois pour obtenir les résultats. Vous avez retiré les foreuses du site, mais vous vous rendez compte que vous n’avez peut-être pas assez foré, ou pas suffisamment profond. Vous ne le saviez pas, et maintenant il faut ramener les foreuses », déclarait François Doucet, directeur général d’Elemission. « Si vous aviez obtenu les résultats en temps réel, vous auriez pu reprogrammer le forage sur le site sans avoir à déplacer les foreuses. Cela revêt une grande importance en termes d’émissions de gaz à effet de serre. »

Sans même parler du plus évident, à savoir des possibilités logistiques qui accompagnent l’ajustement des plans de forage grâce à un délai d’exécution raccourci. Pour les petites sociétés minières qui dépendent de la capacité à communiquer un flux constant d’informations aux investisseurs afin de préserver leur intérêt, les implications financières sont tout particulièrement importantes.

Au-delà des avantages en termes de délais, les nouvelles technologies de dosage permettent également de réduire les coûts et d’améliorer les facteurs de santé et de sécurité pour les employés de laboratoires. En plus d’éliminer les intrants du dosage traditionnel, tel que le plomb dans les essais pyrognostiques ou les acides perchlorique et hydrofluorique dans les dosages chimiques par voie humide, les technologies plus efficaces éliminent les coûts récurrents et réduisent aussi l’exposition humaine aux substances dangereuses tout en modérant leur impact sur l’environnement.

Rayons X automatisés

Lorsqu’il est question d’or, le dosage est particulièrement complexe. D’après James Tickner, directeur technique et cofondateur de Chrysos Corporation, l’or a toujours été difficile à mesurer en raison de sa présence à une très faible concentration dans les carottes. Ainsi, son dosage requiert des méthodes suffisamment sensibles pour le détecter.

L’essai pyrognostique est depuis longtemps la norme de l’industrie pour le dosage de l’or, car cette méthode offre des résultats précis. Toutefois, les essais pyrognostiques peuvent prendre des heures à mener du début à la fin. Ils requièrent du plomb et des fours pour affiner l’échantillon afin d’en faire une perle d’argent pouvant être analysée.

Contrairement aux méthodes d’essai pyrognostique traditionnelles qui requièrent normalement des heures, la technologie PhotonAssay de Chrysos peut effectuer une analyse en quelques minutes. Avec l’aimable autorisation de Chrysos Corporation

La technologie PhotonAssay de Chrysos utilise des rayons X pour analyser des échantillons de roches pulvérisés. Les rayons X pénètrent l’échantillon pendant 15 secondes, excitent les noyaux atomiques des éléments contenus tels que l’or, l’argent ou le cuivre. L’échantillon activé est ensuite placé devant un détecteur très sensible. Les atomes activés dégagent des rayons gamma caractéristiques. Ainsi, le détecteur peut comptabiliser les rayons gamma pour mesurer la quantité d’un élément donné présent dans l’échantillon.

« L’intégralité du processus prend moins de deux minutes et est entièrement robotisé et automatisé », indiquait M. Tickner. « Grossièrement, on place l’échantillon dans l’espace prévu à cet usage, il ressort de l’autre côté et le résultat vous est transmis. »

Les principaux avantages de PhotonAssay résident dans sa simplicité par rapport aux moyens traditionnels tels que l’essai pyrognostique. L’utilisation des rayons X élimine les préoccupations relatives à la minéralogie de l’échantillon. S’il y a de l’or dans l’échantillon, peu importe l’élément avec lequel il est mélangé, expliquait M. Tickner. Il n’est donc plus nécessaire de manipuler les échantillons comme c’est le cas avec les essais pyrognostiques, l’analyse est plus rapide, et la quantité de travail ainsi que les dangers en termes de sécurité inhérents à la manipulation du plomb sont réduits.

« D’après notre expérience, un seul opérateur suffit pour actionner la machine PhotonAssay, qui effectuera environ 70 essais par heure. Ceci équivaut à plus de 500 essais dans un quart de travail de huit heures », indiquait M. Tickner. « Pour un laboratoire classique, plusieurs opérateurs doivent mener l’essai pyrognostique pour obtenir le même nombre d’échantillons. »

La capacité à mesurer de larges échantillons (l’essai pyrognostique mesure généralement entre 30 et 50 grammes de matériau, par rapport à PhotonAssay qui mesure jusqu’à 500 grammes) renforce aussi la probabilité d’obtenir des résultats qui sont vraiment représentatifs d’une carotte de forage. « Ce que montre [l’analyse répétée] est qu’assez régulièrement, cette taille supérieure d’échantillons implique simplement que l’on obtient un résultat plus précis », expliquait M. Tickner.

Le laser, au cœur de la technologie

La spectroscopie par claquage induit par éclair laser (LIBS, de l’anglais Laser-induced breakdown spectroscopy) est une technologie éprouvée utilisée dans tout un éventail d’applications. Les capteurs des astromobiles Curiosity et Perseverance l’ont même utilisé dans le cadre de leur mission sur Mars. Dans l’optique de créer une alternative aux essais traditionnels, Elemission applique la LIBS à la minéralogie et la géochimie dans l’exploitation minière.

La première incursion de la société dans l’industrie minière a eu lieu en 2016 avec son appareil d’imagerie hyperspectrale CORIOSITY. L’appareil CORIOSITY en est maintenant à sa sixième génération et est considéré par Elemission comme le « grand frère » de son nouvel appareil de balayage à laser ECORE, dévoilé en 2021. ECORE permet de mener des essais sans préparer les échantillons. Il traite des carottes de forage intactes par l’intermédiaire de la LIBS et de capteurs supplémentaires.

La technologie LIBS d’Elemission envoie un laser au travers d’un objectif et le dirige sur une carotte de forage d’un mètre de long pour créer une lumière blanche. Cette lumière émise par le plasma est ensuite séparée par la longueur d’onde à l’aide d’un spectromètre qui détermine quelles raies d’émission sont présentes. Chaque élément du tableau périodique a sa propre raie d’émission mesurée en nanomètres, qui permet d’identifier les minéraux présents dans les échantillons. L’intensité de leurs raies d’émission est proportionnelle à leur concentration dans l’échantillon.

Les appareils CORIOSITY et ECORE prennent les mesures et transmettent les résultats aux opérateurs. Ils ne demandent pas plus de mesures de sécurité qu’une imprimante laser classique. L’appareil ECORE peut être utilisé sur le site de forage dans un laboratoire mobile (appartenant à la société ou à Elemission). Dans ce cas, les résultats peuvent être obtenus en seulement cinq minutes après que la carotte a été retirée de la foreuse et placée dans l’ECORE.

« Nous pouvons effectuer 1 300 mesures par seconde », expliquait M. Doucet. « Nous pouvons cartographier une surface en très peu de temps, avec une empreinte multi-élémentaire qui inclut des éléments légers. »

C’est cette spécification qui démarque la LIBS des autres technologies telles que la microscopie électronique à balayage et la spectroscopie à rayons X à dispersion d’énergie. D’après M. Doucet, ces techniques sont actuellement reconnues comme la norme par excellence pour la caractérisation de la minéralogie. Leur détection indirecte attribue toutefois souvent à tort des minéraux à éléments légers, comme le lithium et le béryllium, ou confond le spodumène et la pétalite, un problème que la LIBS ne rencontre pas.

« On n’extrait pas l’élément, on extrait les minéraux », faisait remarquer M. Doucet. « C’est important de connaître la saturation moyenne de l’élément dans un mètre de carotte. Mais pour l’extraire, il est plus important de connaître le minéral dans lequel on peut le trouver. Par exemple, dans certains procédés, on peut extraire le lithium présent dans le spodumène. Mais s’il s’agit de la pétalite, on ne peut pas procéder ainsi car le processus pourrait ne pas être adapté pour extraire de la pétalite et du spodumène. Cela change tout. »

Digestion par refroidissement

Pour les minéraux qui ne requièrent pas la précision des essais pyrognostiques, une alternative populaire consiste à mener des essais chimiques par voie humide. Cela implique de dissoudre les carottes de sondage dans une solution à analyser. La digestion, un processus d’analyse chimique par voie humide, associe des réactifs acides et de l’énergie pour décomposer les échantillons sous forme liquide.

L’essai classique par digestion implique un bloc chauffant ou un module hyperfréquences pour fournir l’énergie, ce qui prend plus d’une heure. Les blocs chauffants utilisent de la chaleur et les modules hyperfréquences utilisent les micro-ondes. ColdBlock Technologies a, quant à elle, introduit les ondes à infrarouges comme option de substitution, ce qui accélère considérablement le processus.

« Les ondes à infrarouges traversent le tube à essai et l’acide, et sont absorbées par l’échantillon », expliquait Craig West, directeur général de ColdBlock Technologies. « C’est la raison pour laquelle cette technologie est si efficace. De fait, la majeure partie de l’énergie infrarouge est absorbée par l’échantillon directement, et c’est ce qui permet au processus de digestion de se faire. »

ColdBlock utilise les ondes infrarouges pour considérablement accélérer le processus de digestion. Avec l’aimable autorisation de ColdBlock Technologies

Un module ColdBlock, qui peut être placé sous une hotte de ventilation existante, permet généralement de parvenir à la digestion en moins de 20 minutes. Un processus aussi rapide provoquerait normalement une vaporisation suffisante pour menacer le volume restant de l’échantillon. Toutefois, une zone de refroidissement à l’extrémité du tube à essai prend soin de recondenser la vapeur. C’est de cette zone de refroidissement que la digestion par ColdBlock a tiré son nom. Ce processus produit une quantité suffisante d’échantillons restant à tester, le présentant dans un tube à essai relativement froid qui ne requiert pas de temps de refroidissement supplémentaire.

M. West évoquait les trois priorités en termes d’essai au cœur de ce que ColdBlock cherche à accomplir lorsqu’elle conçoit ses technologies, à savoir la rapidité, la précision et la sécurité des employés.

« L’un de nos clients avait besoin de l’essai pyrognostique et d’une méthode distincte de digestion, car il testait à la fois de l’or et du cuivre. Ainsi, il menait deux processus différents pour deux éléments distincts », se remémorait M. West. « ColdBlock lui a proposé un processus unique qui lui permettait d’obtenir des résultats pour l’or et le cuivre simultanément. En éliminant l’essai pyrognostique, le client n’avait plus besoin de se soucier de l’exposition de ses employés au plomb. »

ColdBlock facilite également la digestion d’éléments qui sont généralement difficiles à tester avec cette technique, notamment des éléments volatils tels que le mercure, et d’éléments réfractaires tels que le chrome. La société lancera bientôt officiellement sa série ColdBlock Pro Series, la troisième génération de son digesteur. Visant à améliorer la modularité, la Pro Series pourra gérer jusqu’à quatre digesteurs ensemble et digérer jusqu’à 80 échantillons simultanément.

« L’exploitation minière est le secteur dans lequel nous avons commencé et sur lequel nous nous sommes concentrés ces huit dernières années », indiquait M. West. « Nous constatons un réel besoin dans le secteur minier de rationaliser et d’améliorer le processus d’essai, et de réduire les délais d’attente. »

Traduit par Karen Rolland