Véronique Bjorkman effectue des travaux de prospection dans le nord de l’Ontario. En plus du travail traditionnel de prospection, de nombreux prospecteurs indépendants font du jalonnement sous contrat et pour leur compte personnel. C’est notamment le cas du prospecteur Karl Bjorkman et de sa famille, qui ont créé la société Bjorkman Prospecting dans le nord de l’Ontario. Avec l'aimable autorisation de Jessica Bjorkman

Depuis le 9 janvier à minuit, les prospecteurs de l’Ontario ne peuvent plus jalonner les concessions de façon traditionnelle.

La province met en œuvre la troisième étape de sa Loi sur les mines modernisée, qui impliquera un jalonnement en ligne des concessions et un système électronique d’administration des terrains miniers.

L’objectif des mises à jour est de simplifier l’administration et la gestion des terrains miniers et de rendre les opérations d’exploration moins intrusives pour reconnaître les droits des peuples autochtones et les droits issus des traités, tout en respectant mieux les propriétaires fonciers.

Grâce au nouveau système, les sociétés minières ou les prospecteurs pourront jalonner une concession minière en sélectionnant un terrain sur une carte numérique, qui s’appuie sur un système d’enregistrement en ligne.

Il y aura un simple droit d’enregistrement pour le jalonnement d’une concession minière dans le nouveau système, mais le ministère du Développement du Nord et des Mines de l’Ontario n’a pas encore fixé définitivement le coût, a indiqué le porte-parole du ministère, Cameron Ferguson, dans un courriel au CIM Magazine. Actuellement, pour jalonner une concession minière, une personne ou une entreprise doit s’acquitter d’un droit d’enregistrement, des coûts d’acquisition des étiquettes de concession et d’autres frais supplémentaires.

« Nous essayons de nous assurer que le coût de la conformité réglementaire crée un environnement équitable et concurrentiel pour l’exploration minière en Ontario, » a conclu M. Ferguson.

Les prospecteurs indépendants ont dit que le passage au jalonnement en ligne risque de leur causer une perte importante de revenus. En plus de leurs activités traditionnelles de prospection, de nombreux prospecteurs indépendants font du jalonnement sous contrat pour des sociétés minières ou pour leur compte personnel en achetant des terrains et en les revendant aux compagnies avec profit. Avec la simplification du jalonnement, les prospecteurs avaient déjà indiqué à CIM Magazine qu’ils craignaient que les sociétés minières n’aient plus besoin d’embaucher de travailleurs indépendants pour effectuer leurs travaux de jalonnement.

« Nous perdrons 50 % de nos revenus du jour au lendemain. C’est une perte considérable pour nous », avait déclaré Karl Bjorkman en 2016. L’entreprise familiale de Karl Bjorkman, Bjorkman Prospecting, a reçu le prix pour réalisation exceptionnelle décerné par l’Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs (ACPE) en 2016. « Nous jalonnons des concessions pour nous maintenir à flot, afin de pouvoir avoir les moyens de faire de la prospection ».

Selon Garry Clark, président de l’Ontario Prospecting Association, il s’agit d’un problème pour les prospecteurs qui font un travail moins rentable comme la coupe de ligne, le marquage d’arbres et la coupe de poteaux et qui s’appuient sur l’argent gagné à jalonner des concessions minières pour faire un profit. Mais il ne pense pas que les sociétés minières cesseront d’embaucher ou d’acheter des concessions aux prospecteurs.

« On aura toujours besoin du prospecteur; il est nécessaire pour prospecter une propriété qui est prometteuse, mais pas suffisamment pour attirer une société importante sans qu’on y ait fait un peu de travail », assure-t-il. « La meilleure façon de faire des trouvailles est de mettre des gens sur le terrain. Les petites et les grosses sociétés continueront d’embaucher des prospecteurs. »

M. Ferguson a également ajouté que le nouveau système permettra aux prospecteurs individuels de jalonner des concessions minières partout dans la province, au lieu de concentrer leur travail sur une seule zone géographique afin de gérer les coûts liés au jalonnement des terrains.

Le Système d’administration des terrains miniers (SATM) « a été conçu pour que les prospecteurs et les sociétés minières utilisent le même processus d’enregistrement des concessions », a poursuivi M. Ferguson. « Le jalonnement des terrains bénéficie aux moyennes et grandes sociétés qui ont les moyens d’embaucher et de transporter les jalonneurs dans toute la province, alors que les prospecteurs ne disposent pas de telles ressources. »

Pendant une « période préconversion » de 90 jours avant le passage en ligne du jalonnement, l’enregistrement des concessions et d’autres transactions comme le dépôt des rapports de travaux d’évaluation et le transfert des concessions ne sont pas autorisés. Le dernier jour où les prospecteurs pouvaient déposer une demande d’enregistrement de concession pour un terrain jalonné était le 7 février.

Cette période d’interruption sert à convertir les concessions existantes des prospecteurs dans la nouvelle carte de cellules de la province. Chaque cellule représente une concession de 20 ha; précédemment, les concessions couvraient une surface de 16 ha. Ces dernières années, les prospecteurs relevaient les coordonnées GPS précises des concessions existantes afin de les situer correctement sur la carte. M. Clark a indiqué qu’il peut y avoir des cas de concessions chevauchant les limites de cellules, ou de deux concessions se trouvant dans la même cellule. 

La mise en place du jalonnement en ligne et du système électronique se fera en deux étapes. Lors de la première étape, le système électronique entrera en vigueur le 7 février et permettra aux titulaires de concessions de configurer un profil de compte. Le 10 avril, la seconde phase entrera en vigueur, autorisant le jalonnement de concessions en ligne, permettant aux prospecteurs d’obtenir ou de renouveler un permis en ligne et d’effectuer les transactions en ligne pour toutes les questions de gestion des terrains miniers.

M. Ferguson a déclaré que la province étudie des façons d’empêcher l’enregistrement d’un « nombre disproportionné de concessions », y compris en limitant la quantité de concessions qu’un prospecteur ou une société peut enregistrer pendant une seule transaction.

De plus, la province exige du titulaire qu’il dépose un rapport de travaux d’évaluation sur la concession dans les deux ans pour continuer à en être titulaire et qu’il soumette 400 $ de travaux d’évaluation tous les ans sur chaque concession.