La plateforme logicielle Ada de réalité augmentée créée par BGC Engineering transforme les données techniques et les plans d’ingénierie complexes en modèles 3D, que l’on peut découvrir en revêtant les lunettes HoloLens de Microsoft. Avec l’aimable autorisation de BGC Engineering
En mars 2016, Microsoft lançait ses lunettes HoloLens, le premier ordinateur holographique de réalité mixée commercialisé. Moins d’une année plus tard, la société BGC Engineering de Vancouver avait déjà développé une plateforme logicielle dédiée aux sciences de la Terre appliquées pour les lunettes HoloLens. Baptisée Ada, cette plateforme transforme les données techniques et les plans d’ingénierie complexes en modèles 3D. Comme l’expliquait Matthew Lato, ingénieur géotechnique chez BGC, à l’équipe du CIM Magazine en septembre 2017, les lunettes HoloLens permettent de vivre des expériences de réalités virtuelle (RV) et augmentée (RA), et les personnes qui les découvrent en deviennent d’incontestables partisans. Il suffit de revêtir HoloLens et de se laisser guider pour être convaincu(e) de son potentiel, expliquait-il. À l’époque, M. Lato expliquait que selon lui, les lunettes HoloLens fonctionnant sur Ada pouvaient devenir un outil de communication puissant pour l’engagement envers les communautés et la consultation communautaire. Une année plus tard, les prévisions de M. Lato se vérifiaient.
BGC a utilisé Ada pour aider plus d’une vingtaine de clients dans les domaines des transports, des services publics et de l’exploitation minière. L’un de ses plus récents clients est le ministère des relations Couronne-Autochtones et affaires du Nord Canada (RCAANC), qui se sert des lunettes HoloLens pour ses consultations communautaires dans le cadre du projet d’assainissement de la mine Giant à Yellowknife, projet d’une valeur de 900 millions de dollars. L’ordinateur HoloLens, semble-t-il, est un interprète exceptionnel des plans d’ingénierie. Il contribue à éliminer les problèmes de communication entre les ingénieurs et les communautés affectées par ces plans qui ne connaissent ni le jargon des ingénieurs, ni les supports qu’ils utilisent.
Malgré l’importance de consulter les communautés et de leur demander leur opinion afin de gagner leur confiance et d’obtenir leur assentiment, et malgré les efforts des ingénieurs et des experts pour communiquer leurs plans et données dans toutes les langues, la plupart des gens ne sont pas formés pour lire des cartes en 2D ou des dessins techniques. Contrairement aux ingénieurs et aux experts techniques, tout le monde n’est pas capable de regarder une carte topographique sur des surfaces planes et des écrans numériques en l’imaginant dans un contexte réel.
Il faut donc appréhender les lunettes HoloLens équipées de la plateforme Ada comme un outil donnant les moyens à quiconque les revêt de développer les processus de visualisation propres à un cerveau d’ingénieur(e). De fait, à BGC, le traitement et l’interprétation des données et des plans en modèles 3D commencent par la collaboration entre ingénieurs et spécialistes en sciences de la Terre. « Notre équipe pluridisciplinaire d’ingénieurs, de géoscientifiques et d’experts en géomatique travaille main dans la main avec les développeurs afin d’élaborer les modèles », déclarait Cassandra Koenig, hydrogéologue à BGC, qui a contribué à l’élaboration de la proposition du projet d’assainissement de la mine Giant.
Il faut le voir pour le croire
L’engagement de BGC envers le projet d’assainissement de la mine Giant a commencé l’année dernière lorsque Chris MacInnis, alors directeur de projet technique au RCAANC pour la stabilisation souterraine de la mine, et désormais directeur par intérim du projet d’assainissement de la mine Giant, s’est rendu à une présentation aux bureaux du ministère à Ottawa. « Il s’agissait de l’un de nos autres projets, l’assainissement de la mine Faro dans le Yukon », indiquait-il. « BGC contribuait à ce projet et l’équipe a invité certains des gestionnaires et directeurs à aller voir ce qu’elle faisait. J’ai été impressionné par la démonstration de HoloLens, qui est selon moi un excellent outil. J’y ai trouvé de nombreux avantages et applications. » Spécifiquement, il envisageait les avantages d’une utilisation de la plateforme Ada et de l’ordinateur HoloLens pour les consultations communautaires dans le cadre du projet d’assainissement de la mine Giant, une exploitation aurifère abandonnée dans les limites frontalières de la ville de Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest, située à quelques kilomètres de zones résidentielles. En 1999, le gouvernement fédéral est devenu le gardien de la mine et a pris en charge la gestion des responsabilités environnementales y afférentes. La plus grosse difficulté qu’il a rencontrée était de s’assurer que les 237 000 tonnes de trioxyde de diarsenic, stockées depuis des décennies par les exploitants de la mine dans 14 salles et chambres souterraines hermétiquement fermées à une profondeur de 80 à 250 pieds (entre 24 et 76 mètres) sous terre à la mine Giant, ne soient pas libérées dans les eaux souterraines et posent alors des risques élevés pour les hommes, les animaux et les végétaux.
Après avoir évalué toutes les options, les responsables du projet d’assainissement de la mine Giant du RCAANC ont mis au point un plan techniquement complexe qui implique la congélation à sec d’un bloc autour des chambres et des salles contenant l’arsenic pour s’assurer qu’il reste enfermé, rendant ainsi possible l’assainissement de la mine Giant.
« Nous avons toujours fait notre possible pour transmettre les informations aux intervenants communautaires d’une façon que tout le monde peut comprendre », expliquait M. MacInnis, « mais ce n’est jamais simple ».
Une façon d’y parvenir pourrait consister à amener les membres de la communauté sous terre, mais « c’est un endroit dangereux qui requiert de nombreux protocoles en termes de santé et de sécurité ainsi qu’une protection personnelle », déclarait M. MacInnis.
« L’ordinateur HoloLens est un moyen de transposer l’environnement souterrain sur un support visuel que l’on peut utiliser dans un bureau, où quelqu’un pourra vous expliquer toutes les zones sous terre dans le monde virtuel et ce, en toute sécurité », indiquait-il. « Lorsqu’on parle du complexe de chambres C5-09 par exemple, personne n’a vraiment idée d’où se trouve cette salle en regardant les diapositives les unes après les autres. C’est ce que leur permettent les lunettes HoloLens. Elles présentent une situation en des termes simples de manière à ce que ces personnes comprennent ce que l’on essaie de faire et la voie que nous prenons. »
Consultations communautaires
En septembre, le projet d’assainissement de la mine Giant a organisé une série d’ateliers à Yellowknife à l’intention des intervenants communautaires ; les HoloLens dotées des modèles 3D d’Ada ont été remises aux participants. Ces rencontres font partie des consultations réglementaires nécessaires avant que le projet n’envoie sa demande de permis d’utilisation des eaux « de type A ». Comme l’expliquait M. MacInnis, « c’est le moteur qui nous aidera à déclencher la mise en œuvre de l’assainissement final à la fin de l’année 2020 ou au début de l’année 2021. Si les participants avaient des questions qu’ils ne parvenaient pas vraiment à formuler, ou s’ils ne savaient pas vraiment de quelle partie du site on parlait, ils pouvaient enfiler les lunettes et cerner exactement ce dont il était question. Plusieurs personnes sont venues me dire qu’il est vraiment intéressant de visualiser ce dont on parle avec exactitude, que cela aide à se projeter. C’est un point très positif pour nous ».
Jusqu’ici, les modèles 3D qu’a développés BGC pour le projet d’assainissement de la mine Giant sont tous relatifs à la réalité augmentée, qui permet aux gens de voir les modèles 3D sans obstruer l’environnement dans lequel ils se trouvent ; toutefois, BGC développe également un modèle de réalité virtuelle pour les consultations communautaires dans le cadre du projet d’assainissement de la mine Giant, lesquelles consultations sont prévues pour le mois de mars, indiquait M. Lato. « Les participants pourront revêtir leurs HoloLens et se retrouver au milieu du site en cours d’assainissement ; ils y découvriront le paysage tel qu’il sera dans 30 ans et écouteront les oiseaux gazouiller », ajoutait-il.
Comme c’est le cas avec la plupart des plateformes logicielles, Ada est un voyage plus qu’une destination, dont les capacités continuent d’évoluer et de s’améliorer en vue d’inclure d’autres fonctions telles que l’animation. « Nous avons développé un autre prototype pour un projet différent qui anime le parcours et la vitesse de l’écoulement des eaux souterraines en subsurface, telles qu’elles se déplaceraient en fonction de la perméabilité de la géologie du site », indiquait Mme Koenig.
Les rencontres dans le cadre du projet d’assainissement de la mine Giant n’étaient pas seulement une étude de cas pour la consultation communautaire s’appuyant sur la technologie, mais également une confirmation supplémentaire de la valeur de cette technologie. « Lorsque nos ingénieurs d’études ont enfilé [les lunettes], ils ont disparu dans un coin pendant un quart d’heure ou 20 minutes », indiquait M. MacInnis du RCAANC. « Ils discutaient de la conception, qu’ils trouvaient fabuleuse car ils découvraient des choses que des plans ou des dessins sur leur bureau ne leur permettent pas de voir. Je suis convaincu que ce type de technologie jouera un rôle important dans l’engagement envers les communautés, mais également dans la conception en tant que telle. J’ai dans l’esprit des applications extraordinaires. »
Traduit par Karen Rolland