Patterson Lake South est considérée comme la plus importante découverte d'uranium dans le bassin d'Athabasca ces dernières années | Avec l’aimable authorisation de Fission Uranium
Une invention baptisée « System and Method for Aerial Surveying or Mapping of Radioactive Deposits » (système et méthode de cartographie ou de levés topographiques aériens des gisements radioactifs) a clairement défini un champ de roches riches en uranium sur le site du projet Patterson Lake South (PLS) en octobre 2009. Mise au point par Fission Uranium et son partenaire Special Projects Inc. (SPI), cette technologie est une adaptation des techniques classiques de radiométrie aérienne et permet d'identifier les blocs rocheux radioactifs. Cette anomalie a fini par mener les partenaires de l'entreprise commune Fission (à l'époque Fission Energy) et Alpha Minerals (à l'époque ESO Uranium) à une source de substrats rocheux à haute teneur considérée comme la plus grande découverte d'uranium de ces dernières années dans le bassin d'Athabasca, en Saskatchewan.
« Nous avons déjà utilisé cette technologie pour détecter des blocs rocheux connus sur nos autres propriétés dans la région est du bassin et avons pu observer chaque anomalie avec une grande précision », déclarait Ross McElroy, président et directeur de l'exploitation Fission, de Hong Kong, où il participait à la conférence Mines and Money. « Ainsi, nous avons pensé que cette technique pouvait constituer une bonne approche à PLS car le modèle de minéralisation indiquait que tous les minéraux présents sur le site devraient être remontés à la surface. »
Les sociétés Fission et SPI, basée à Calgary, ont déposé une demande de brevet pour la technique qui, selon M. McElroy, fournit des observations bien plus nettes que celles effectuées avec des systèmes similaires.
Les techniques aériennes traditionnellement utilisées pour l'exploration de minéraux radioactifs impliquent généralement de faire voler à des altitudes et des vitesses relativement élevées un aéronef à voilure fixe équipé de grands détecteurs. Elles ne permettent pas de détecter les occurrences discrètes localisées telles que les blocs rocheux car la zone de couverture des mesures est trop vaste et les capteurs ne sont pas assez performants pour les distinguer de l'arrière-plan. Les systèmes les plus anciens ne disposent par ailleurs pas des outils de navigation et d'acquisition de données nécessaires pour détecter la radioactivité.
Bien qu'elle soit limitée à l'exploration proche de la surface, l'invention de Fission et SPI est plus sensible car l'aéronef se déplace à une altitude et une vitesse optimales pour détecter une radioactivité localisée. Des capacités puissantes de traitement des données intégrées dans le fuselage cartographient les données collectées, et identifient et signalent les points de haute priorité en temps réel.
« On associe ici les sciences nucléaires à la physique, l'électronique et au développement de logiciels », expliquait Kaj Hedin, fondateur et président de SPI. « C'est une méthode complexe », qu'il préfère ne pas décrire dans les détails car le brevet est en attente.
Une philosophie rétro
Mis à part cette nouvelle technologie, le programme d'exploration développé par les anciens partenaires de cette entreprise commune (Fission a racheté Alpha pour la somme de 185 millions $ l'année dernière) était d'une certaine manière un retour en arrière à une époque où la prospection jouait un rôle prépondérant dans la découverte de nouveaux gisements.
Au moment de la découverte, le dogme dominant dans le camp d'Athabasca était que tous les gisements proches de la surface avaient été découverts. On pensait que la plupart du potentiel restant se trouvait à l'est et que toutes les nouvelles découvertes concernaient des gisements profonds et dans les limites du bassin, à savoir dans une zone de 100 000 kilomètres carrés recouverte de grès qui fournit environ 20 % de l'uranium au niveau mondial.
Pourtant, M. McElroy et son équipe savaient que la géologie favorable du socle s'étendait au-delà des limites du bassin, et ils refusaient d'admettre qu'il n'y avait rien à trouver simplement parce qu'aucune grande société minière ne prospectait. Ils se sont donc de plus en plus intéressés à une zone située à la limite sud-ouest du bassin, laquelle longeait un couloir structural de failles et de conducteurs associés aux mines d'uranium de Cluff Lake et Shea Creek. À Patterson Lake, la tendance coïncidait avec le domaine Clearwater, un élément important identifié géophysiquement qui pourrait signaler la présence d'uranium dans le bassin.
Suivant son intuition selon laquelle la zone pourrait contenir une minéralisation d'uranium proche de la surface, Fission a jalonné quelques concessions au sud de la limite du bassin, en partie en raison de la géologie prometteuse mais aussi car la route traversant la propriété donnait un accès facile à l'exploration.
Parallèlement, Alpha Minerals se focalisait sur la région, et procédait au jalonnement de concessions après avoir trouvé un rapport de CanOXY (aujourd'hui Nexen) des années 1970 dans les fichiers sur l'évaluation de la Saskatchewan qui révélait des anomalies radioactives près de Patterson Lake. En 2008, les deux sociétés regroupaient leurs concessions au titre d'une entreprise commune à 50/50.
D'Ekati à Athabasca
Après avoir fusionné leurs concessions, les partenaires devaient identifier leurs cibles de forage. M. McElroy et Ray Ashley, vice-président de Fission à l'exploration, avaient rencontré M. Hedin lorsqu'ils travaillaient dans les campements d'exploration de diamants des Territoires du Nord-ouest. MM. McElroy et Ashley travaillaient pour BHP Billiton à la mine d'Ekati, et M. Hedin comme conseiller développant des levés magnétiques à haute résolution pour l'exploration de la kimberlite. « Il semblait toujours avoir une longueur d'avance sur les autres dans la création de nouveaux outils », se rappelait McElroy.
MM. McElroy et Ashley se sont alors tournés vers M. Hedin qui, à l'aide d'un financement attribué par Stewart Blusson (la légende qui avait découvert la mine de diamants d'Ekati), avait conçu un système radiométrique aérien pour la cartographie géologique du bassin de Thelon dans le Nunavut. Ces trois hommes ont travaillé main dans la main pour perfectionner un système qui pourrait être applicable à PLS, dont l'affleurement minéralisé n'était pas important mais qui devait disposer d'un certain modelé sur la base de la géologie et de la structure connues. « Les premiers gisements autour des bords du bassin ont été trouvés en commençant nos prospections près des blocs rocheux à haute teneur découverts par le biais de levés radiométriques jusqu'à un emplacement source », expliquait M. McElroy, qui a récemment reçu le prix Bill Dennis de la Prospectors and Developers Association of Canada (PDAC, l'association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs) pour la découverte de PLS.
« Les travaux réalisés dans le bassin de Thelon nous ont procuré le financement nécessaire pour améliorer le système, mais avant de commencer les vols avec Fission, nous ne disposions d'aucune méthode nous permettant de collecter suffisamment de données pour comprendre ce dont nous avions besoin pour trouver de l'uranium », déclarait M. Hedin, qui expliquait que les levés qu'il avait menés au dessus du bassin d'Athabasca étaient indispensables au perfectionnement de la méthodologie pour trouver des blocs rocheux contenant de l'uranium.
Après avoir analysé les résultats du levé radiométrique de 2009, lancé en conjonction avec le levé magnétique, la priorité pour les partenaires était de se procurer toute la zone comportant des anomalies. Ceci s'est avéré complexe étant donné que cette zone était réservée au développement de charbon et se trouvait en dehors des limites de jalonnement pour l'exploration minérale, aussi fallait-il demander au gouvernement provincial de déroger à la règle.
La cartographie ultérieure et l'échantillonnage de surface suivant les anomalies détectées par radiométrie aérienne ont finalement permis de localiser le champ de roches enfouies en juin 2011 sur le terrain récemment jalonné. Des levés géophysiques détaillés au sol, une analyse de la direction de l'écoulement glaciaire et le forage ont aidé les partenaires à repérer la source de substrats rocheux, et en novembre 2012, le trou de forage 22 a révélé une minéralisation titrant plus de 1 % d'U3O8 (octaoxyde de triuranium) sur 8,5 mètres, à seulement 3,8 kilomètres des origines glaciaires du champ de roches.
Les panaches de radon : un autre indice
Les partenaires se sont ensuite intéressés à l'est, où les levés géophysiques montraient que la zone de faille se poursuivait au-dessous de Patterson Lake. Ils ont déterminé que le meilleur moyen de détecter les zones chaudes le long de la faille consisterait à échantillonner le radon qui émanait du bassin lacustre en hiver, période à laquelle la turbulence de l'eau est moins forte. Effectivement, ils ont découvert plusieurs panaches de radon bouillonnant à des endroits discrets sur deux kilomètres, offrant des cibles de forage peu profondes qui assuraient la présence d'autres sources d'uranium à haute teneur.
À la fin du mois de mars, Fission annonçait son meilleur recoupement : une zone de 53,5 mètres de radioactivité hors échelle au sein de 146 mètres de minéralisation. La société a aussi foré dans un écart entre deux amas minéralisés, les fusionnant en un seul grand gisement et confirmant ainsi la continuité de la minéralisation.
Le programme de forage d'au moins 85 trous de cet hiver, qui visait à démontrer la continuité entre différents amas et à étendre le gisement à l'est, s'est terminé mi-avril. Fission espère réunir suffisamment de résultats de forage cette année pour produire une estimation des ressources conforme à la norme canadienne NI 43-101 tout en continuant à tester le reste des conducteurs électromagnétiques discrets sur la propriété, qui dépassent la centaine.
M. McElroy déclare être très fier de son équipe, dont font partie Paul Ramaekers et Roger Thomas. Ils sont tous deux spécialistes de la géologie du terrain glaciaire et du bassin d'Athabasca, et ont énormément contribué à déterminer la direction de l'écoulement glaciaire à PLS.
« Personne ne prêtait attention à cette zone ou ne pensait qu'elle pouvait présenter un potentiel », déclare M. McElroy. « PLS n'est pas une simple découverte ; il s'agit d'un nouveau style de découverte dans une nouvelle région, une découverte si remarquable qu'elle a bouleversé les modèles d'exploration dans le bassin d'Athabasca. »
Traduit par Karen Rolland