Après une décennie de développement et de négociations, la construction a enfin commencé à Greenstone Gold Mines. Avec l’aimable autorisation de Greenstone Gold Mines

Lorsqu’il sera totalement construit et entrera en service dans le courant du premier semestre 2024, le projet d’extraction aurifère de Greenstone, situé dans le nord-ouest de l’Ontario (un partenariat à 60 % - 40 % entre Equinox Gold et Orion Mine Finance Group) deviendra l’une des plus grandes mines d’or du Canada.

Le projet est situé dans la municipalité de Greenstone, à environ 250 kilomètres au nord-est de Thunder Bay, une région qui abritait de nombreuses mines souterraines des années 1930 aux années 1970. D’une valeur estimée à 1,225 milliard de dollars américains, ce projet devrait produire en moyenne 366 000 onces (environ 10 376 kilogrammes) d’or chaque année, sur une durée de vie de 14 ans. Les coûts nécessaires au maintien de la production sont estimés à 618 dollars américains l’once, ce qui le place dans le tiers inférieur de la moyenne de l’industrie.

La construction à Greenstone a officiellement commencé en octobre 2021, mais le projet est en préparation depuis près d’une décennie.

En 2014, lorsque Premier Gold Mines, son propriétaire de l’époque, a pour la première fois évoqué ses plans, il a rencontré des difficultés complexes que ses prédécesseurs, dont les mines de Hardrock, de MacLeod-Cockshutt et de Mosher qui ont contribué à l’établissement des communautés environnantes, n’auraient jamais pu envisager dans les années 1930.

 L’ensemble des données chiffrées sont tirées de la mise à jour de l’étude de faisabilité préparée conformément au règlement NI-43-101 du 26 janvier 2021, mis à part les dépenses en immobilisations initiales, qui ont été mises à jour en octobre 2021.

L’un des problèmes évidents est que la zone potentielle du projet était pour la majeure partie déjà occupée. Sur les terres se trouvaient déjà un terrain de golf, 65 habitations, un grand site pittoresque aimé de tous qui commémore l’histoire minière de la région, une portion de 5,4 kilomètres de l’autoroute 11, et d’autres infrastructures essentielles, notamment le poste de l’Ontario Provincial Police [OPP, la police provinciale de l’Ontario], un dépôt de la patrouille du ministère des transports de l’Ontario, ainsi qu’un poste électrique et des lignes de distribution d’Hydro One.

Le lieu choisi pour la future mine se trouve sur les territoires traditionnels de quatre Premières Nations (les Animbiigoo Zaagi’igan Anishinaabek, les Aroland, les Ginoogaming et les Long Lake #58), ce qui constitue un autre problème majeur. La construction et l’exploitation de la mine affecteraient également la nation métisse de l’Ontario.

Par ailleurs, le réseau électrique existant qui alimente les habitants et les entreprises de la région ne pourrait pas répondre aux besoins futurs du projet. Greenstone devra par conséquent construire une nouvelle centrale électrique et un gazoduc de 14 kilomètres pour relier le projet au gazoduc du réseau de TC Énergie au Canada.

Son ampleur n’est pas le seul aspect qui en fait un projet notable. Tout au long de son développement, certaines des difficultés apparentes sont devenues ses forces et ses avantages.

Relocalisation

Le projet devait absolument faire l’objet de négociations concernant l’acquisition des terres et les relocalisations, expliquait Eric Lamontagne, directeur général de Greenstone, « mais cela a été difficile ». M. Lamontagne, qui a rejoint la société en 2013 (l’année où ont commencé les négociations), indiquait qu’il a fallu un peu plus de temps que prévu pour finaliser la phase de négociations (qui s’est terminée en 2018) que ce qu’il faudra pour construire la mine.

La communauté a beaucoup soutenu le projet et les avantages économiques qu’il engendrera, notamment les 500 emplois à temps complet prévus une fois que la mine ouvrira ses portes. Toutefois, Greenstone a reconnu que, pour les personnes contraintes d’abandonner leurs foyers pour laisser place à la mine, le sentiment de perte sera intense et prendra un certain temps à être accepté. La plupart des propriétaires sont des personnes âgées qui cherchent un logement plus petit, ce qui facilite les négociations avec Greenstone, mais d’autres sont de jeunes familles. « C’était un peu plus difficile pour eux », déclarait M. Lamontagne. « C’est pourquoi nous les avons rencontrés et avons pris le temps nécessaire pour nous assurer de trouver une solution satisfaisante pour les dédommager et respecter le processus. Nous n’avons ni pressé ni expulsé ces personnes, ce qui était très important. Nous avons été respectueux. »

Sur les terres se trouvaient déjà un terrain de golf, 65 habitations, et d’autres infrastructures essentielles. Avec l’aimable autorisation de Greenstone Gold Mines

Parmi les foyers, 65 faisaient partie d’un quartier de Geraldton. La ville comptait aussi un terrain de golf à 18 trous qui avait été construit en deux étapes sur 50 ans pour la main-d’œuvre de la mine désormais fermée de Little Long Lac. Cette mine avait ouvert ses portes en 1935 et c’est de là qu’est née Geraldton. Neuf des trous du terrain de golf étaient situés sur le périmètre de construction de la nouvelle portion de l’autoroute.

Le gouvernement local municipal, propriétaire du terrain de golf, a voté en faveur de la vente des neuf trous à Greenstone, ainsi que du chevalement de l’ancienne mine de MacLeod-Cockshutt qui tenait lieu de monument commémoratif de l’histoire minière de la région. Greenstone a ôté et récupéré la partie supérieure du chevalement en prévision de sa relocalisation vers un nouveau site commémoratif, lequel sera déterminé en accord avec la communauté.

Communautés autochtones

Lorsque la Première Nation de Long Lake #58, dont les revendications territoriales n’ont toujours pas été résolues, a entendu des rumeurs selon lesquelles un projet minier allait être construit sur leurs terres traditionnelles, la communauté a réagi rapidement, déclarait Judy Desmoulin, cheffe de la Première Nation. « Plutôt que de rester en marge, nous nous sommes immédiatement impliqués. »

Sa Première Nation a signé un protocole d’entente en 2014 et est parvenue à une entente finale avec Greenstone en 2018.

« Pour cette entente, nous ne voulions pas seulement la garantie classique des emplois », indiquait la cheffe Desmoulin. « Ça n'aurait pas été assez. C'est bon pour certains individus, mais nous voulions que l’ensemble de la communauté en profite. »

L’objectif de Greenstone et des communautés autochtones, qui ont toutes approuvé le projet, était d’établir une relation et un partenariat positifs sur le long terme. Historiquement, les communautés autochtones à court de ressources trouvent toujours difficile de négocier avec les sociétés minières qui ont un accès bien supérieur à l’expertise. Dans ce cas, expliquait la cheffe Desmoulin, « c’était, pour ainsi dire, une situation équitable ». Elle expliquait que Greenstone « octroyait un financement suffisant nous permettant d’être sûrs que la transaction allait être satisfaisante pour nous et que nous disposons des fonds suffisants pour embaucher nos experts et couvrir tous les imprévus. En soi, ce processus était bon et meilleur. Nous avons aussi bénéficié d’un très bon conseiller ».

D’après M. Lamontagne, la voie vers la réussite des négociations passait par l’écoute, le respect et les compromis. « J’ai participé à toutes ces négociations depuis le début. Pour les deux parties, ce sur quoi nous avons commencé et ce que nous avons fini par accepter était différent », indiquait-il. « Nous nous sommes écoutés mutuellement, nous avons avancé et avons accepté des compromis pour trouver un commun accord. »


L’ensemble des données chiffrées sont tirées de la mise à jour de l’étude de faisabilité préparée conformément au règlement NI-43-101 du 26 janvier 2021.

Les partenariats se sont traduits par un certain nombre d’initiatives qui renforcent la relation. Par exemple, un membre de chacune des Premières Nations et un de la communauté métisse locale font partie de l’équipe de techniciens, dont le travail est d’assurer la surveillance de l’environnement. Cette surveillance inclut des essais sur les eaux de surface et souterraines, l’air et les sols, ainsi que des contrôles de la santé de la vie aquatique et terrestre afin de régulièrement rendre des comptes au gouvernement et aux communautés. Une fois par semaine, l’équipe partageait ses résultats avec la communauté. « Ils sont impliqués et la procédure est totalement transparente », indiquait M. Lamontagne. « Auparavant, la mine aurait procédé à l’échantillonnage et l’autre partie aurait essayé de consulter les données, qui n’auraient pas toujours été partagées dans leur intégralité. »

Les communautés autochtones ont aussi négocié un traitement préférentiel pour les contrats. « Nous avons décroché le contrat pour construire et exploiter le camp, et le contrat pour alimenter la mine en carburant », expliquait la cheffe Desmoulin. Avec la nouvelle société d’avitaillement en carburant, « nous avons désormais notre propre infrastructure pour notre propre équipement, entreposé sur nos terres », indiquait-elle. « Nous cherchons à élargir ces services d’avitaillement afin de pouvoir les offrir à d’autres au-delà de la mine. »

Les Premières Nations élaborent un programme de formation culturelle obligatoire afin d’aider les employés tout autant que les entrepreneurs ou l’équipe de direction à comprendre l’histoire et la culture des Premières Nations, et ce qu’ils ont enduré. « Quand le gouvernement parle de réconciliation », expliquait la cheffe Desmoulin, « c’est le genre d’informations que nous sommes en mesure de transmettre avec cette entente ».

Initialement, la cheffe Desmoulin indiquait que la direction de Greenstone ne comprenait pas la raison pour laquelle les Premières Nations souhaitaient être directement impliquées dans les questions et les conflits liés aux ressources humaines. Dans le passé, expliquait-elle, quand des membres des Premières Nations étaient victimes de harcèlement ou de racisme, ils ne pouvaient souvent rien faire. « Nous apprenons à nous serrer les coudes », déclarait-elle. « Nous n’allons plus laisser ce genre de choses atroces se produire ou arriver à nos proches. »

Par ailleurs, outre les ententes, Greenstone a proposé que le nouveau poste de l’OPP soit relocalisé sur les terres des Premières Nations. Les quatre Premières Nations collaborent également avec Greenstone pour installer un nouveau panneau solaire de 10 mégawatts qui compensera certains des besoins en électricité par de l’énergie verte. Ces discussions sont en cours.

Construction

En juillet cette année, 900 travailleurs en moyenne se trouvaient sur le site pour la phase de construction du projet, qui comprend la construction d’une nouvelle infrastructure ainsi que de nouvelles installations minières et d’une mine à ciel ouvert de 1,8 kilomètre de long, 1 kilomètre de large et 600 mètres de profondeur. À l’heure où nous mettons sous presse, plus de 35 % de la construction du projet est terminée.

« La construction est partout », déclarait M. Lamontagne. « Tout le monde est très enthousiaste. »

En juillet cette année, 900 travailleurs en moyenne se trouvaient sur le site pour la phase de construction du projet. Avec l’aimable autorisation de Greenstone Gold Mines

Greenstone s’attend à ce que la majeure partie des bâtiments de la mine soient construits et clôturés avant l’hiver, ce qui permettra aux travailleurs de progresser sur les installations internes pendant les mois d’hiver. Quatre tombereaux de transport de modèle CAT 793 de 250 tonnes et une excavatrice Komatsu de modèle PC-5500 sont arrivés sur le site cet été pour l’assemblage. D’ici septembre, Greenstone espère commencer la préproduction. Avec un coefficient de recouvrement de 5:1, le projet générera une quantité considérable de stériles. Toutefois, Greenstone en utilisera certains pour construire la route d’accès et l’installation de stockage des résidus. Le minerai sera empilé pour donner à la mine en service une avance sur la production d’or en 2024.

Bertho Caron, directeur technique et de la production de Greenstone, indiquait que 98 % des aspects techniques du projet étaient terminés depuis juillet. L’étude de faisabilité est achevée. Techniquement, la plupart des concepts du projet ont été finalisés il y a environ 6 ans et ont été soumis à plusieurs évaluations, notamment par des tiers et des vérificateurs lorsque la propriété a changé de propriétaires au fil des ans. L’une des caractéristiques techniques quelque peu inhabituelles du projet est que sa mine à ciel ouvert incorporera des mines historiques souterraines. La société ne considère toutefois pas cela comme un obstacle. « Il existe de nombreuses procédures pour faire cette intégration en toute sécurité », indiquait M. Caron. « Nous n’avons pas besoin de réinventer la roue. »

Quatre tombereaux de transport de modèle CAT 793 de 250 tonnes et une excavatrice Komatsu de modèle PC-5500 sont prêts à être assemblés. Avec l’aimable autorisation de Greenstone Gold Mines

Les débris métalliques abandonnés dans les anciennes mines souterraines de Hardrock, MacLeod-Cockshutt et Mosher pourraient toutefois poser problème. De même, plutôt que d’opter pour un broyeur semi-autogène (broyeur SAG) classique, Greenstone a choisi un circuit équipé de cylindres de broyage à haute pression (HPGR, de l’anglais high pressure grinding rolls) fabriqué par le Weir Group. Or, s’ils ont un meilleur rendement énergétique que la technologie plus classique, les HPGR sont susceptibles d’endommager les débris métalliques des mines historiques. « Nous avons récemment ajouté davantage de redondance dans le système afin d’éliminer le plus tôt possible les déchets dans le circuit », indiquait M. Caron.

Des faiblesses aux forces

L’année dernière, Equinox Gold a acquis une participation de 60 % dans le projet pour la somme de 612 millions de dollars. Or, au lieu d’assister aux complications associées à la relocalisation et aux difficultés à établir un permis d’exploitation social positif, la société a vu le fruit des forces développées par Greenstone au fil des ans au travers de son travail acharné et de son écoute, de ses compromis et de son respect.

« Rares sont les occasions d’acquérir des participations dans les capitaux propres de projets de qualité dans des provinces favorables à l’exploitation minière », déclarait Peter Hardie, directeur des finances à Equinox Gold. « Greenstone est l’une des plus grandes mines d’or non développées au Canada. Une fois sa construction achevée, elle sera la quatrième plus grande mine d’or au Canada produisant de l’or à bas prix. En outre, elle a obtenu son permis et est prête à démarrer. Le projet bénéficie d’un excellent soutien de la communauté et des Autochtones, d’un partenaire financier solide avec Orion Mine Finance et d’une occasion de consolider une participation majoritaire à une valorisation intéressante, avec une équipe de premier ordre déjà existante. L’association de tous ces facteurs est plus que rare. Lorsque l’occasion de l’acquérir s’est présentée, nous n’avons pas hésité. » 

Traduit par Karen Rolland