D’après Nemaska Lithium, sa mine de Québec constituera la seconde plus grande réserve de lithium au monde, et la production devrait y commencer en 2018. Avec l’aimable autorisation de Nemaska Lithium

Le marché et l’industrie du lithium sont en pleine croissance, en raison de l’essor du marché de l’automobile électrique, selon le rapport Mine 2916 de PricewaterhouseCoopers (PwC) sur le secteur, publié au début du mois de juin.

Le lithium est l’un des deux seuls produits de base (avec l’or) dont les prix ont résisté à la crise mondiale, selon le rapport.

« Le lithium a connu une demande sans précédent au cours de la dernière année, en raison de son emploi généralisé pour la fabrication de piles et des batteries », plus particulièrement pour la fabrication de batteries destinées aux automobiles électriques, signale le rapport.

Le fabricant d’automobiles électriques Tesla Motors, qui construit actuellement une usine de batteries au Nevada, s’attend à produire en 2020 autant de batteries lithium-ion à partir de ce site que la production mondiale en 2013. Au même moment, presque tous les grands constructeurs automobiles importants ont commencé à commercialiser des voitures électriques et les ventes de ce type de véhicule ont bondi de 80 % en 2015.

Selon Tesla, il y aurait suffisamment de lithium pour fabriquer les batteries dont elle a besoin, mais certains analystes s’inquiètent et pensent que les producteurs de lithium auront du mal à fournir les quantités nécessaires.

À ce jour, toutefois, la marque Tesla est bien plus connue par ses ambitions industrielles que ses besoins en lithium. « Du point de vue de la demande en lithium, Tesla n’est pas un joueur important, du moins pour le moment. Sur la base de sa production de l’an passé, Tesla représente moins de deux pour cent de la demande sur le marché du lithium », soulignait Joe Lowry, président de la société de conseil Global Lithium.

Les batteries employées pour stocker l’énergie provenant de sources renouvelables comme l’éolien ou le solaire ajoutent également à la demande en lithium et en batteries, ajoute M. Lowry. Le lithium est aussi utilisé dans la fabrication de céramiques, de verre et de climatiseurs.

Ce n’est pas la première fois que

M. Lowry est témoin d’une si grande demande en lithium ; en effet, l’intérêt a également augmenté considérablement à la fin des années 2000, lorsque les véhicules électriques et hybrides ont fait leur apparition sur le marché. « Cette vague d’intérêt était prématurée à l’époque, dit-il, mais je vois ce regain d’intérêt comme un second souffle qui, cette fois, sera durable. »

Le prix du carbonate de lithium, l’un des minerais de lithium les plus utilisés pour fabriquer des batteries, a augmenté de 400 % au cours des deux dernières années, pour atteindre une moyenne annuelle de 6 400 $ par tonne en 2015, selon l’étude sur le lithium de 2016 de la Commission géologique américaine (U.S. Geological Survey – USGS). Pour la première fois, une entreprise consacrée à l’exploitation du lithium a fait son apparition dans le palmarès des 40 sociétés minières les plus importantes de PwC selon la capitalisation boursière. La Deutsche Bank prévoit que l’approvisionnement en lithium triplerait au cours de la prochaine décennie.

Des rapports indiquent que Tesla pourrait avoir besoin d’environ 24 000 tonnes de lithium pour fabriquer suffisamment de batteries pour une production d’un demi-million d’automobiles d’ici à 2018. Toutefois, la production mondiale n’a atteint que 32 500 tonnes en 2015, selon les données de l’USGS.

Augmentation de la production

La majorité de l’offre mondiale de lithium provient de trois minières : FMC Corp, Sociedad Quimica y Minera de Chile (SQM) et Albemarle Corporation.

Le PDG de SQM, Patricio de Solminihac, a mentionné, au cours d’une entrevue accordée à Benchmark Mineral Intelligence en 2015, que la société pourrait augmenter sa production en 12 mois, s’il y avait lieu de répondre à une demande accrue.

FMC et Albemarle ont choisi de devancer la demande sans attendre. En mai, FMC a annoncé qu’elle triplerait sa production d’hydroxyde de lithium d’ici à 2019, passant ainsi de 10 000 à 30 000 tonnes. Albemarle a également annoncé qu’elle augmenterait sa production de carbonate de lithium, passant de 24 000 à 70 000 tonnes au cours des 27 prochaines années.

Ces sociétés d’envergure ne sont pas les seules à profiter de cette ruée vers le lithium. Tesla a conclu des ententes d’achat de lithium avec quelques minières émergentes, dont les canadiennes Pure Energy Minerals et Bacanora Minerals.

Aucune d’entre elles n’a pour l’instant de mine en production, mais d’autres sociétés font leur apparition dans le secteur, surtout en Amérique du Sud. L’Argentine, la Bolivie et le Chili ont de grandes réserves de lithium. Ces trois pays possèdent la majorité des 34 millions de tonnes de réserves de lithium à l’échelle mondiale. Toutefois, le Canada (et plus particulièrement le Québec) pourrait devenir un autre producteur de lithium important.

Le Canada possède près d’un million de tonnes de réserves de lithium, selon les données de l’USGS. Un projet québécois sera bientôt prêt à passer en mode production : Nemaska Lithium, vient de clôturer un appel public de 69 M$ et a fait son entrée à la Bourse de Toronto le 8 juillet.

« Le monde a besoin de nouveaux venus sur le marché, et ce, le plus tôt possible ; nous en faisons partie », a mentionné Guy Bourassa, PDG de Nemaska. Cette dernière affirme que sa mine constituera la deuxième plus importante réserve de lithium au monde.

« Nous sommes l’un des trois projets à l’échelle mondiale intégralement autorisés et prêts à démarrer », ajoute M. Bourassa, estimant que d’autres projets semblables au Canada accusent probablement cinq à sept ans de retard comparativement à Nemaska. Il s’attend à démarrer la production en 2018. L’étude de faisabilité la plus récente du projet conclut que la mine produirait environ 213 000 tonnes de concentré par année, ce qui équivaut à environ 27 500 tonnes d’hydroxyde de lithium et 3 245 tonnes de carbonate de lithium. Les deux peuvent servir à fabriquer des cathodes, les plaques positives d’une batterie.

Perspectives

Il est possible que l’approvisionnement des autres composantes entrant dans la composition des batteries lithium-ion soit en péril, notamment le cobalt, qui provient en majorité de mines situées dans des pays dont la stabilité politique est souvent menacée.

M. Lowry ne partage pas ces préoccupations. « Je ne pense pas qu’à long terme, le cobalt soit ce qui mette fin à cette histoire », a-t-il dit, en soulignant les initiatives de recyclage du cobalt, la taille des marchés respectifs du cobalt et du nickel, ainsi que les efforts déployés pour concevoir des cathodes sans cobalt.

Il se peut tout de même que certains projets menacent l’utilisation répandue de la batterie lithium-ion à l’avenir, ce qui est également abordé dans le rapport de PwC. Cela n’inquiète cependant pas M. Bourassa.

« On ne voit aucun potentiel de substitution d’ici 15 ou 20 ans, dit-il. Ce que nous voyons actuellement est l’évolution de la batterie lithium-ion grâce à de nouvelles réactions chimiques : plus de cycles, plus grande densité de puissance, meilleure sécurité et moindre dissipation de chaleur. Et malgré cette évolution, ce seront encore des batteries lithium-ion. »