mine Giant Nickel, le seul producteur de nickel de Colombie-Britannique, a fermé ses portes en 1974. Avec l’aimable autorisation de Barrick/Allison Brown

Lors de sa fusion avec la société minière américaine Homestake Mining en 2001, Barrick Gold Corporation a hérité de Giant Nickel, une mine fermée du sud-ouest de la Colombie-Britannique (C.-B.). Son heure de gloire déjà lointaine, le site constituait davantage un problème qu’un atout pour le vaste portefeuille d’actifs répartis aux quatre coins du monde de la société. À l’époque, la mine était inactive depuis 27 ans, et le site renfermait encore quelque cinq millions de tonnes de résidus miniers sur plus de 22 hectares. L’activité à la mine a cependant repris en 2016 lorsque Barrick a lancé un projet de 20 millions de dollars visant à remodeler et à assainir le site.

À l’automne dernier, Barrick a été récompensée pour ses efforts. Le BC Technical and Research Committee on Reclamation (BC TRCR, le comité technique et de recherche de la C.-B. sur la remise en état) lui a remis le Jake McDonald Annual Mine Reclamation Award (le prix annuel Jake McDonald de remise en état des sites miniers) pour ses activités d’assainissement de sites miniers anciennement pollués par des activités minières.

« Nous sommes tout simplement très fiers de ce que nous avons accompli », déclarait Allison Brown, directrice des sites canadiens fermés de Barrick et responsable du projet depuis 2016. « Il était tout particulièrement gratifiant de voir nos pairs de l’industrie et certaines de nos autorités réglementaires reconnaître tous les efforts que nous avons déployés. »

Fermée ou pas, là est la question

Barrick a commencé les examens internes de ses installations de stockage des résidus en 2015 pour s’assurer qu’elles étaient conformes aux normes internes de la société en matière de gestion des résidus et de lixiviation en tas. Ces normes s’alignent sur des exigences locales, nationales et internationales, et notamment sur celles publiées par l’International Council on Mining and Metals (ICMM, le conseil international des mines et métaux) et l’association canadienne des barrages (ACB).

« Cette procédure d’examen a permis à Barrick de se rendre compte que l’installation de Giant Nickel, bien qu’en phase de fermeture passive, n’était pas totalement conforme aux normes actuelles de la société », indiquait Mme Brown. « Cette non-conformité était simplement relative à son âge. »

Le gisement Giant Nickel, initialement baptisé Pride of Emory, se trouve à environ 10 kilomètres au nord de la municipalité de Hope et a été jalonné pour la première fois il y a près d’un siècle, en 1923. Le développement souterrain a commencé en 1926 mais a été interrompu en 1938 en raison de la conjoncture défavorable. Le développement de la mine et du concentrateur a repris en 1952, et la production commerciale a commencé en 1958.

L’installation de stockage des résidus de Giant Nickel avant sa remise en état. Avec l’aimable autorisation de Barrick/Allison Brown

Durant ses 40 ans de développement et d’exploitation sporadiques, la mine Giant Nickel (également connue sous le nom de Giant Mascot) a produit 4,3 millions de tonnes de minerai, générant 26 000 tonnes de nickel et 13 000 tonnes de cuivre. D’après les rapports d’évaluation, le minerai affichait une teneur de 0,77 % de nickel et de 0,34 % de cuivre, avec du cobalt, du platine, de l’or et de l’argent en tant que produits dérivés. Il s’agit de la seule mine de Colombie-Britannique qui produit du nickel.

Les données du BC Geological Survey (le service géologique de la C.-B.) concluaient que « l’éparpillement des zones minéralisées et le fait que certaines étaient des zones aveugles ont entraîné la fermeture de la mine » en 1974.

Une seule mine, plusieurs propriétaires

Durant son histoire s’étalant sur plusieurs décennies, Giant Nickel est passée entre les mains de plusieurs propriétaires. La dernière cession est intervenue en décembre 2001, lorsque Barrick a fusionné avec Homestake pour créer ce qui était, à l’époque, le plus gros producteur d’or du Canada et la seconde plus grande société d’exploitation aurifère au monde. Les principales cibles de Barrick en 2001 étaient le gisement d’Eskay Creek de Homestake dans le nord de la C.-B. et des parts des mines Williams et David Bell dans le district Hemlo, en Ontario. En Australie, Barrick est devenue propriétaire, grâce à la fusion, de la moitié de Super Pit, une mine d’or à ciel ouvert située près de Kalgoorlie, et de quelques exploitations aurifères de la région de Yilgarn, en Australie-Occidentale.

La mine Giant Nickel n’était qu’un à-côté. Homestake avait commencé la mise hors service de l’infrastructure de la mine et du concentrateur en 1993, puis avait entrepris des travaux de valorisation des résidus. Pendant l’exploitation, les résidus avaient été déposés dans une vallée à la topographie relativement plane à l’ouest, à environ 300 mètres en aval de la mine. Ils avaient été répartis entre deux installations de stockage des résidus (ISR), l’ISR supérieure et l’ISR inférieure.

L’ISR supérieure était conçue de manière à permettre l’écoulement de l’eau, et était recouverte d’un remblai de pierre et d’une couche arable, favorisant la végétalisation à l’aide d’espèces végétales indigènes. Cependant, Barrick a constaté une infiltration des résidus provenant de la base de la digue sud de l’ISR supérieure. Des parties de l’ISR inférieure ont aussi été recouvertes au début des années 1990, mais une grande zone ne l’a pas été et un bassin permanent d’eau s’est développé derrière la digue principale.

Après l’examen de 2015, Barrick a fait appel aux sociétés d’ingénierie Knight Piésold et JDS Energy & Mining ainsi qu’à des entrepreneurs locaux pour commencer des travaux dédiés à l’amélioration de la stabilité géotechnique et de l’infrastructure de gestion de l’eau dans les ISR, puis pour l’organisation et la végétalisation des zones perturbées.

Nouvelle formule de remise en état

« Au début du projet de remise en état, nous disposions de très peu d’informations concernant les propriétés géochimiques des résidus », expliquait Mme Brown. Barrick a entrepris un vaste projet de forage afin d’échantillonner et de caractériser les résidus, une exigence du Ministry of Energy, Mines and Petroleum Resources (MEMPR, le ministère de l’énergie, des mines et des ressources pétrolières) de la C.-B., et a constaté à cette étape qu’ils étaient « relativement inoffensifs », indiquait-elle. Si les deux ISR avaient été exposées aux éléments pendant 50 ans et étaient extrêmement oxydées, « de manière générale, elles n’étaient pas acidogènes ».

L’équipe a creusé un canal de dérivation autour de l’installation, et a installé trois évacuateurs de crues d’urgence ainsi qu’un système de drain de sortie pour les digues de l’ISR supérieure. Une partie de l’eau s’écoulant du site affichait des teneurs en fer supérieures aux taux acceptables, aussi l’équipe a créé un canal de traitement passif afin d’éliminer le fer excédentaire dans l’eau d’infiltration qui s’écoulait de l’ISR supérieure.

Et l’installation de stockage des résidus de Giant Nickel après sa remise en état. Avec l’aimable autorisation de Barrick/Allison Brown

« Il s’agit en fait d’une jolie rigole méandreuse remplie de roches qui recueille l’eau s’écoulant du parc à résidus miniers et la filtre, et qui élimine le fer avant de se déverser dans le milieu récepteur », expliquait Mme Brown.

En 2018 et 2019, des précipitations bien supérieures à la moyenne sur le site ont mis à l’épreuve le canal de traitement. Depuis janvier 2020, ce dernier tient et fonctionne bien, et l’eau s’écoulant du site est de bonne qualité. Comme tout le reste sur le site, mis à part quelques filtres granulaires spécialisés et des tuyaux perforés en polyéthylène à haute densité, le canal de traitement a été construit à l’aide de matériaux naturels provenant du site ou de la zone l’avoisinant.


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« La roche, le sable, l’argile, nous avons trouvé tout ce dont nous avions besoin pour construire les différentes structures dans un rayon de cinq kilomètres du parc à résidus miniers », expliquait Mme Brown. Durant le projet, environ 480 000 mètres cubes de matériaux rocheux ont été déplacés.

Globalement, le projet visait à caractériser les matériaux sur le site, puis à stabiliser l’installation de 50 ans ainsi qu’à garantir sa conformité aux normes contemporaines de stabilité en cas de séisme. La nouvelle infrastructure de gestion de l’eau a permis de réduire la libération de polluants dans l’environnement en drainant, remodelant et construisant de nouveaux canaux d’écoulement de l’eau hors du site. Barrick a planté environ 4 000 semis d’arbres sur les zones d’emprunt et a créé un nouvel espace dédié aux utilisateurs à des fins récréatives qui leur permet d’accéder en toute sécurité au vaste réseau de sentiers entourant le site.

Renforcer les capacités de la communauté

La moitié du budget dédié au projet était destinée aux entrepreneurs locaux et aux prestataires de services basés à Hope, notamment aux membres de la Première Nation de Yale. Les exploitants locaux connaissaient bien le site et les enjeux relatifs à l’accès et aux conditions climatiques, expliquait Mme Brown. Certains avaient personnellement travaillé à la mine ou des membres de leur famille y avaient travaillé.

« L’un de nos principaux objectifs pour ce projet était de collaborer avec les Premières Nations afin d’identifier les nouvelles possibilités d’emploi pour les membres des Premières Nations de la région, mais aussi de les aider à développer de nouveaux débouchés commerciaux ou de soutenir les entreprises existantes », indiquait Mme Brown.

Dans le respect de cet objectif et pour privilégier l’utilisation des matériaux de la région, un entrepreneur local a créé une nouvelle société qui fournissait au site une découpeuse à bois et réalisait un paillage avec les végétaux enlevés, lequel servira à la végétalisation à la fin du projet.

« Les habitants de Hope nous ont beaucoup soutenus pendant tout le processus », indiquait Mme Brown.

Difficultés surmontées

Les deux plus grandes difficultés du projet étaient de faire face aux conditions imprévues sur le site et de communiquer, dans le cas d’une utilisation parallèle des terres, avec les personnes s’intéressant à cette zone et aux environs du parc à résidus miniers. Pour faire face au premier problème, la société a adopté une association pragmatique d’études sur le site et de techniques « adaptées au terrain » fondées sur des conversations entre les membres de l’équipe. Le second était plus complexe.

Barrick possède un titre minier dans cette zone, mais des exploitants forestiers mènent leurs activités dans la forêt voisine et des véhicules récréatifs (VR) et des groupes de cyclistes la visitent fréquemment et viennent régulièrement y camper. Malgré les rumeurs publiées par divers organes de presse, Barrick n’a aucunement l’intention de transformer cette zone en station de ski.

« Il a été réellement difficile d’identifier les besoins et attentes de tous, et de les aligner sur nos objectifs de remise en état », expliquait Mme Brown. « Invariablement, en plein milieu du projet, un groupe d’utilisateurs des terres se présentait et nous déclarait son intérêt pour cette zone, alors que nous n’en avions absolument pas conscience. »

« Nous sommes très fiers de ce que nous avons accompli », déclarait Allison Brown, directrice des sites canadiens fermés de Barrick, qui pose ici sur le site aux côtés de son père. Avec l’aimable autorisation de Barrick/Allison Brown

Au final, les contributions de tous les groupes nous ont permis de parvenir à de meilleurs résultats. Des options pour le camping et un nouveau site de divertissement ont été inclus sur des terres suffisamment à l’écart de l’empreinte laissée par les ISR afin d’aider l’association locale de motos tout-terrain à atteindre une partie de ses objectifs futurs. Barrick continue par ailleurs d’échanger avec des groupes forestiers provinciaux afin de s’assurer que la végétalisation est bien conforme à leurs objectifs de gestion.

Si le prix attribué par le BC TRCR était une source de fierté, le plus grand tournant du projet pour Mme Brown a été atteint en novembre 2018, lorsque les travaux de terrassement ont pris fin et que la plupart des travailleurs et des machines ont quitté le site.

Aujourd’hui, ce site est « agréablement silencieux », se réjouissait-elle. La végétalisation est réussie, les structures résistent et la surveillance géotechnique et de l’eau se poursuit.

« Le véritable objectif pour Barrick est de progressivement se libérer, dans la mesure du possible, de ses obligations sur ce site », concluait Mme Brown. « Il s’agit d’un parc à résidus miniers, aussi il nous sera difficile de tout simplement disparaître, mais nous espérons réduire les risques à un point tel que l’abandon ou la cession en vue d’un développement futur deviendront plus probables. »

Traduit par Karen Rolland