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La mine est équipée d’un système de transport en suspension qui amène le minerai jusqu’à l’installation de traitement et alimente la mine en électricité | Avec l’aimable autorisation de Torex Gold

 

L'extraction a déjà commencé à l'une des fosses de la mine El Limón-Guajes et bientôt, on pourra exploiter le minerai d'un deuxième gisement. L'exploitation phare de Torex ne se contente pas de couler des lingots d'or ; en effet, la nouvelle approche que la société a adoptée en matière de transport du minerai et de traitement complet des résidus miniers suit son propre cours.

 

Lorsque Torex Gold Resources a annoncé la coulée de son premier lingot d'or à son projet Morelos en décembre 2015, des géologues nostalgiques de Teck Resources en ont pris note. Torex avait acheté cette propriété pour la somme de 150 millions $ US lors d'une vente aux enchères de 2009 durant une liquidation importante de Teck suite à la crise de 2008. « Cette liquidation comprenait un total dessaisissement de ses actifs aurifères », expliquait Jason Simpson, directeur de l'exploitation chez Torex, « au grand désarroi de certains des géologues qui étaient impliqués dans ce projet ».

Les principales ressources de la propriété (les gisements de type skarn d'El Limón et de la mine voisine Guajes) étaient déjà connues en 2009. Ce projet, qui affichait des ressources mesurées et indiquées de 3 millions d'onces d'or et des ressources présumées de 890 000 onces supplémentaires, constituait indéniablement un excellent investissement.

Sept années et plus de 800 millions $ plus tard, le premier lingot coulé marque un tournant important vers la production commerciale, qui devrait commencer d'ici le deuxième trimestre 2016. Entre-temps, des systèmes supplémentaires sont intégrés chaque semaine à l'usine de concentration, dont la capacité est de 14 000 tonnes par jour (t/j). Parmi ces systèmes figurent « l'une des plus grandes usines de filtration des résidus miniers au monde », indiquait Fred Stanford, président et chef de la direction de Torex.

Des défis de taille

La mine El Limón-Guajes se trouve sur 29 000 hectares montagneux dans la ceinture aurifère du Guerrero au Mexique ; la construction des bassins de décantation des résidus miniers n'a donc pas été une mince affaire pour M. Stanford. « Nous nous trouvons à l'intersection de deux rivières, aussi on ne peut se permettre de rejeter les résidus dans ces cours d'eau. » À seulement 100 kilomètres de la côte Pacifique, cette zone est « par définition » sismique, ajoutait-il. « En outre, la topographie de la zone est extrêmement escarpée, aussi il est difficile de contenir les résidus derrière une digue. Il faudrait pour ce faire constamment élever le barrage. »

Au lieu de procéder ainsi, la société a opté pour des résidus secs filtrés. Sept filtres haute pression Diemme sont reliés en parallèle pour extraire les résidus traités de la suspension. Un transporteur amène les résidus séchés jusqu'à leur lieu d'entreposage, où les opérateurs des engins procèdent à leur compactage. Un entreposage ou un compactage inappropriés pourraient se traduire par une érosion localisée, aussi Torex a fait appel aux services d'AMEC, le bureau d'études et de conseil en ingénierie qui a conçu le parc à résidus miniers, pour surveiller le site d'élimination des déchets et pour assurer le contrôle de la qualité.

La fabrication du filtre et ses contenants ont coûté près de 40 millions $, aussi ce système représente un important investissement de capitaux pour la mine. Cependant, expliquaient MM. Stanford et Simpson, cette dépense en vaut la peine, car elle élimine le risque d'une rupture de la digue à résidus miniers.

« Tout commence par le concept des valeurs », indiquait M. Simpson. « La capacité de filtrage représente certes un investissement, mais elle repose sur une connaissance de l'environnement dans lequel nous nous trouvons, et du type d'organisation que nous essayons de créer. »

Filters   Conveyor daytime
Torex a opté pour un système de gestion des résidus miniers qui assèche les résidus dans sept filtres haute pression (en haut à gauche) avant de les transporter (en haut à droite) jusqu'au site de déversement.  Avec l’aimable autorisation de Torex Gold

Éliminons les risques

C'est dans cette même optique que le système de transport en suspension RopeCon a été mis en œuvre pour le transport du minerai de la fosse d'El Limón jusqu'au concentrateur, le long d'une face verticale de 400 mètres. Ce système devrait commencer à transporter le minerai du concasseur situé en haut de la montagne jusqu'à l'usine au printemps, bien avant sa date initiale de démarrage prévue pour la fin 2016.

« C'est un autre exemple de la façon dont les valeurs influencent la prise de décisions très importantes », faisait remarquer M. Simpson. « Cet équipement a une valeur de 18 millions $, et même de 22 millions $ une fois installé, mais ses avantages en termes de sécurité sur toute la durée de vie de la mine sont inestimables. » L'autre option traditionnelle aurait consisté à acquérir une flotte d'environ 15 camions de transport effectuant sans cesse le transport sur ces 400 mètres de dénivelé par la route, durant la saison des pluies et la nuit, à pleine charge jusqu'au pied de la montagne. « Cette solution n'aurait fait qu'augmenter la probabilité d'[un accident] », indiquait M. Simpson. « En éliminant le risque dès la conception, nous prenons une décision réellement fondée sur les valeurs. » 

Le système RopeCon, qui est installé dans une dizaine de mines dans le monde entier, n'est pas encore très utilisé aux Amériques ; cependant, il a gagné la confiance des dirigeants de Torex. Le système repose sur une série de câbles haute résistance et une charpente métallique montée entre deux tours, un peu comme les télésièges débrayables pour lesquels le fabricant Doppelmayr est plus réputé. Des roues ferroviaires sont montées sur deux câbles parallèles. L'axe de chaque essieu est relié par des boulons à une courroie de 66 centimètres (cm) de large. Les câbles sont attachés tous les cinq mètres à un support métallique. Le transporteur de la mine El Limón-Guajes (ELG) mesure 1 300 mètres de long, et couvre un peu plus d'un kilomètre entre les tours.

Two men and a drill
La durée de vie de la mine est actuellement estimée à 10 ans, mais les résultats de forage sur le site voisin Media Luna de la société affichent des réserves d'or intéressantes.  Avec l’aimable autorisation de Torex Gold

Le minerai brut est broyé par des concasseurs giratoires identiques de 42 pieds par 65 (environ 13 mètres sur 20) de Metso dans les fosses de Guajes et d'El Limón. La fosse de Guajes actuellement exploitée est facile d'accès par la route servant au transport du minerai. Le minerai du gisement El Limón sera broyé dans la fosse, puis transporté à l'aide du système RopeCon jusqu'à l'usine de traitement. Le minerai est tout d'abord envoyé dans un broyeur semi-autogène (SAG) de Metso (de 9,15 mètres de diamètre sur 4,15 mètres de longueur effective de broyage), puis dans un broyeur à boulets de Metso (de 7,32 mètres de diamètre par 12,8 mètres de long). Ces deux machines broient le minerai à 80 % en-deçà de 60 microns, menant à une récupération de 86 % à l'aide du procédé de lixiviation par cyanuration/du charbon en pulpe.

Chargé de minerai broyé avant la descente, le système RopeCon génère un mégawatt d'électricité pour la mine et permet de contourner les problèmes les plus courants que rencontrent les exploitants avec les transporteurs. Les roues ferroviaires évitent les problèmes de trajectoire, et les axes, reliés par des boulons au niveau supérieur de la courroie, permettent de dégager tous matériaux qui pourraient bloquer l'une des extrémités et percer la courroie. Les galets de roulement ne sont pas en contact avec la courroie, ce qui élimine ainsi une autre source d'usure. « Cette technologie a éliminé toutes les autres éventualités de déchirer la courroie », indiquait M. Stanford.

En outre, ajoutait M. Simpson, RopeCon est si solide que la durée de vie de ce système devrait même dépasser celle de la mine. L'entretien porte principalement sur les pièces reliées à la courroie, et sera effectué à un poste de maintenance spécifiquement installé à l'une des extrémités du transporteur. « Il suffit de faire avancer la courroie de manière à ce que l'essieu spécifique se retrouve du côté du poste de maintenance, de débrancher, de changer les pièces défectueuses, de remettre en marche et de retourner la courroie. La maintenance préventive peut se faire extrêmement rapidement », déclarait M. Stanford.

First gold pour
Torex a coulé son premier lingot d'or en décembre l'an dernier. Avec l’aimable autorisation de Torex Gold

Formation pour l'avenir

À la mine ELG, la première vague de mineurs et de dirigeants venait du reste du Mexique, notamment du nord du pays où se trouvent de nombreuses mines bien établies. Cependant, indiquait M. Simpson, une grande partie du personnel (à l'heure actuelle, plus de 45 % des quelque 200 employés travaillant sur le site) est originaire de la région de Guerrero, et environ 95 % du personnel de la mine est d'origine mexicaine. La société ne dispose pas d'objectif spécifique en matière d'embauche au niveau local, mais elle est bien consciente que l'optimisation de la main-d'œuvre locale est dans son intérêt. « Au fil du temps, nous devons nous sentir responsables des collectivités locales et nous assurer qu'elles sont correctement formées et ont suffisamment d'expérience pour pouvoir prendre le relais », indiquait M. Simpson. 

Depuis 2013, la société a instauré un programme de formation pour commencer à assurer la qualification de ses employés. Mis en œuvre par Performance Associates International, ce programme a porté ses fruits pour M. Simpson lorsqu'il travaillait à la mine de nickel Voisey’s Bay de Vale, dans la province du Labrador, ainsi que sur d'autres sites dans le monde entier tels que le projet de mine d'argent Escobal de Tahoe Resources, au Guatemala. À mesure qu'ELG augmente sa capacité, les habitants de la région commencent à combler les divers postes à la mine, bénéficiant de l'encadrement de mineurs expérimentés avec lesquels Torex avait commencé l'exploitation. « La majorité des exploitants de l'usine sont également originaires des collectivités locales et ont suivi ce programme de formation », ajoutait M. Simpson.

Édification de la communauté

Former et embaucher les habitants de la région fait partie des efforts de Torex visant à favoriser les collectivités locales, et ce n'est que le début. Au cours des premières négociations avec les ejidos de la région (des fermes communautaires au Mexique disposant de droits agricoles sur l'exploitation des terres environnantes), deux villages à proximité ont exprimé leur intérêt pour être déplacés car ils s'inquiétaient de la disponibilité en eau. Des générations durant, les localités de La Fundición et de Real De Limón ont évolué en situation précaire sur le flanc de la montagne pour tirer profit des ressources naturelles. Elles manquaient cependant des commodités d'usage de la vie moderne telles que l'eau potable, les égouts et un approvisionnement fiable en électricité.

Le déplacement des villages s'est également révélé être dans l'intérêt des mineurs étant donné que le lieu de construction le plus approprié pour le terril aurait recouvert La Fundición, et aurait fini par s'approcher des confins de Real De Limón. Les négociations ont donc commencé.

Kids in classroom
Ce projet comprenait la relocalisation de deux villages, qui s'élevait à 30 millions $. Avec l’aimable autorisation de Torex Gold

Trois sites adéquats ont été proposés aux habitants. Des architectes ont construit trois modèles de logements pour que chacune des 172 familles (environ 600 villageois) puissent choisir celui qui lui convenait. La construction du nouveau village de La Fundición a commencé en 2013, à environ huit kilomètres de la mine. La réimplantation de la localité entière s'est achevée en 2015. La construction voisine de Real De Limón devrait s'achever au cours des premiers mois de 2016, et l'installation des habitants suivra. Le coût total de la réimplantation des deux villages s'élèvera à environ 30 millions $, ce qui inclut le prix de l'installation d'une usine de traitement de l'eau et d'un poste électrique pour alimenter les communautés en électricité.

« Dans l'ensemble, la procédure a été relativement simple et transparente », indiquait Gabriela Sanchez, vice-présidente des relations avec les investisseurs chez Torex. « Notre équipe de relations avec les communautés a dû déployer des efforts supplémentaires en vue de familiariser les propriétaires des nouveaux logements avec les nouvelles installations qu'offraient leurs logements modernisés », par exemple des cuisinières à gaz et non plus des fours à bois, l'eau potable ainsi que des infrastructures pour les égouts et la collecte des déchets.

« Le déplacement de ces deux villages a donné lieu à de meilleures écoles et a offert aux habitants l'accès à l'eau potable, aux égouts, à un terrain de jeux et ainsi de suite », ajoutait M. Stanford. « Nous avons fait notre possible pour que ces solutions conviennent aux habitants.  Notre objectif est qu'ils soient satisfaits de cette réinstallation et qu'ils vivent heureux dans leur nouveau village. »

Lentement mais sûrement

D'après l'étude de faisabilité, la durée de vie de la mine ELG devrait être de 10 ans. L'exploitation minière pourrait cependant se poursuivre sur des décennies à Morelos. En 2012, alors que la société terminait son étude de faisabilité, une seconde ressource a été découverte. Le projet Media Luna qui, d'après la légende de la société, a été découvert « dans le premier ou le deuxième trou de forage », pourrait venir ajouter 7,4 millions d'onces présumées d'équivalent d'or, dont près de 4 millions d'onces d'or.  

« Lorsque ces [deux] projets seront opérationnels, nous disposerons d'un actif très intéressant », se réjouissait M. Stanford.

La société tente d'obtenir le permis nécessaire pour commencer à creuser un tunnel d'exploration. Cependant, indiquait M. Stanford, la phase de production commence à peine à la mine ELG, aussi il n'est pas pressé d'investir dans l'immédiat les 450 millions $ requis pour développer le projet Media Luna. « Nous allons sans doute exploiter ces mines pendant de très longues années. »

Traduit par Karen Rolland