La mine Menchen de Maracás est située dans l'État brésilien de Bahia, au nord-est du pays | Avec l'aimable autorisation de Largo
Avec un faible taux d’impuretés et des teneurs avoisinant le double de la moyenne mondiale à 1,34 %, la mine Maracás occupe une place de choix au sein même de son marché spécialisé ; en effet, le pentoxyde de vanadium (V2O5) qu’elle produit répond aux exigences des applications imposant un degré élevé de pureté, que ce soit pour des ailes d’avion, des turbines ou des batteries.
« Deux entreprises sidérurgiques nous ont récemment félicité », indiquait Mark Smith, président et directeur général de Largo depuis avril. Ces entreprises, qui représentent les utilisateurs finaux, confirment d’ailleurs que le pentoxyde de vanadium produit par sa société est l’un des plus purs au monde. Les producteurs primaires de vanadium sont rares ; ce métal est généralement un sous-produit ou un coproduit d’une autre matière première, communément du fer. L’équipe de Largo espère pouvoir couvrir près d’un dixième de l’offre au niveau mondial aux stades ultérieurs de son projet et diversifier du point de vue géographique un secteur dominé par la Chine, l’Afrique du Sud et la Russie.
L'équipe des opérations comprend un certain nombre de vétérans des exploitations de vanadium, don Les Ford qua a à son actif des décennies d'expérience dans des projets similaires en Afrique du Sud. Avec l`autorisation de Largo Resources
La mise en service de la mine date du mois d’août dernier, et durant les trois premières années, la société prévoit de générer au moins 9 600 tonnes de pentoxyde de vanadium par an à partir du puits principal Gulçari A. Ses réserves prouvées et probables sont de 13,1 millions de tonnes de minerai, avec une teneur en V2O5 de 1,34 %, et ses ressources mesurées et indiquées de 24,6 millions de tonnes de minerai, avec une teneur en V2O5 de 1,11 %. Largo a l’intention d’intensifier sa production pour atteindre 14 000 tonnes la troisième année puis, après huit ans, de passer à des fosses satellites présentant des ressources présumées de 30,4 millions de tonnes de minerai pour une teneur en V2O5 de 0,83 %. Si tout se passe comme prévu, la production moyenne de la mine au cours de son cycle de vie total de 29 ans sera de 11 400 tonnes par an. À titre indicatif, la production mondiale de vanadium en 2014 était de 97 000 tonnes.
Un budget de construction serré
La conception même est spécifique à ce minerai, bien qu’elle n’ait rien d’exceptionnel pour le vanadium. Collectivement, les membres de l’équipe de la mine Maracás ont travaillé dans toutes les mines de vanadium d’Afrique du Sud, et la méthode d’extraction ainsi que le schéma de traitement sont conformes à des techniques précédentes qui ont fait leurs preuves dans les gisements de magnétite titanifère. Le minerai est extrait d’un puits à ciel ouvert selon des méthodes de forage et de dynamitage conventionnelles par l’entrepreneur Fagundes Construção e Mineração, puis transporté par camion jusqu’à l’usine de traitement. Au total, la flotte de production de surface comprend un engin de forage, deux excavatrices, sept camions de 40 tonnes et un bulldozer.
Le minerai subit tout d’abord trois cycles de concassage. Le plan initial prévoyait l’acheminement direct immédiat vers le concentrateur, mais au moment de la mise en service, la direction de la mine a décidé d’ajouter deux séparateurs magnétiques à sec qui extraient le minerai riche en vanadium de la gangue. « Pendant la mise en service, nous nous sommes rendus compte qu’il était possible de tirer un bien meilleur parti du minerai du corps minéralisé en ajoutant des séparateurs magnétiques à sec », expliquait Casper Groenewald, directeur technique à la mine Maracás. Le minerai doit atteindre une teneur magnétique d’au moins 44 % avant l’étape de broyage ; la valorisation par séparation magnétique à sec nous permet d’extraire un minerai dont la teneur magnétique n’est que de 35 % et de l’envoyer au concasseur.
Selon Michael Mutchler, directeur de l’exploitation, la séparation magnétique à sec pourrait réduire la teneur de coupure du gisement, qui est actuellement de 0,6 % de vanadium dans le minerai. « La première teneur de coupure dépend toujours du prix, et actuellement, les prix sont bas, aussi nous pourrions trouver un compromis », soulignait-il. « Mais un jour, en évaluant davantage en fonction de la teneur en vanadium du minerai magnétique, nous parviendrons à abaisser cette teneur de coupure. »
Après la séparation magnétique à sec, le minerai passe par un broyeur culbuteur, puis par un stade de séparation magnétique par voie humide qui isole encore davantage le minerai de vanadium. Les résidus obtenus à ce stade contiennent de petites quantités d’ilménite et de métaux du groupe des platineux qui pourraient théoriquement être récupérés si la mine disposait d’un capital suffisant pour installer les circuits nécessaires ; pour le moment cependant, le seul produit vendable du minerai est un concentré magnétique dont la teneur en V2O5 est d’environ 3,4 %.
Ce concentré est grillé dans un four avec du carbonate de sodium et du sulfate de sodium pour produire un composé hydrosoluble, le vanadate de sodium. Le matériau chauffé est alors refroidi à 450 °C, trempé, puis passé dans un broyeur à décharge par grille où il est réduit en particules de 6 mm de diamètre, voire moins. Ce produit subit une lixiviation par agitation pendant 45 minutes dans des réservoirs remplis d’eau tiède, suivie d’un cycle dans l’épaississeur de lixiviat.
L’étape suivante est la désilicification. À ce stade, on ajoute du sulfate d’aluminium afin de précipiter l’aluminium et les silicates simultanément ainsi que toute trace de phosphore et d’arsenic.
On ajoute du sulfate d’ammonium pour précipiter le vanadium sous forme de vanadate d’ammonium (NH4VO3). Ce processus génère du sulfate de sodium, que l’on recycle en le renvoyant dans le four. On extrait l’ammonium du NH4VO3, lequel se transforme en V2O5 sous la forme d’une poudre de couleur brun-rougeâtre.
Enfin, la poudre est chauffée à 800 °C dans un incinérateur. À cette température, elle fond et s’écoule sur une meule d’écaillage refroidie à l’eau. Les paillettes sont éliminées par raclage et transférées dans un concasseur de paillettes qui décompose les plus grosses, puis transportées dans un silo où elles sont chargées dans des sacs de stockage en vrac d’une tonne prêts pour l’expédition. Le client de la mine Maracás, le courtier en métaux Glencore, récupère directement la marchandise à la plateforme de chargement de la mine Maracás.
Le vanadium est généralement ajouté à l’acier sous forme de ferrovanadium (FeV), un alliage de V2O5, d’aluminium et de fer. Plus tard, si les marchés s’y prêtent, Largo pourrait aménager une USine supplémentaire pour convertir le V2O5 en FeV, ce qui permettrait d’économiser les coûts d’expédition associés à l’exportation du V2O5 pour la conversion et, éventuellement, à son retour au Brésil. Mais pour l’heure, la conjoncture économique n’est pas favorable à la mise en oeuvre de ce plan.
D’après M. Mutchler, les résidus de l’extraction du vanadium sont relativement inoffensifs. Ils ne sont pas faciles à manipuler du point de vue opérationnel (un projet d’empilage de résidus secs a été abandonné car le filtre était constamment bouché), mais ils ne génèrent pas d’acide non plus. Le revêtement du bassin de décantation des stériles est conforme aux exigences du gouvernement brésilien, mais les exploitants espèrent être en mesure de l’enlever d’ici quelques années, lorsque les autorités de réglementation se seront familiarisées avec le minerai de vanadium.
Les dirigeants de la mine Maracás ont déclaré qu’ils atteindraient leurs objectifs en termes de capacité pour 2015 avec l’équipement existant, mais Largo s’affaire à réunir des fonds en vue d’une expansion. Construites en période de récession avec un budget en immobilisations restreint, les installations qui ont commencé à produire en août dernier atteignent déjà leurs limites.
« Comme pour tous les projets de construction, les exigences ont été réduites au strict minimum et les coûts maintenus au plus bas afin de pouvoir les financer et de mener à bien la construction d’un projet », expliquait M. Mutchler. « Nous constatons maintenant que nous avons sans doute sous-évalué les exigences de certains équipements, lesquels sont devenus problématiques et requièrent une reconstruction ou des améliorations plus tôt que prévu. »
La première série de dépenses en capital s’est achevée en mai 2014 à 241 millions $ US. Largo cherche maintenant à recueillir 50 millions $ US supplémentaires en 2015 et 2016 pour pouvoir couvrir certaines des réparations ou améliorations à apporter aux équipements. Le four peut sans problème supporter une expansion du côté de l’extraction, mais une grande partie des autres équipements devront être mis à niveau pour dépasser leur capacité nominale.
Perspectives
L’accord d’écoulement à 100 % conclu entre Largo et Glencore remonte à 2008. « Quand nous avons établi notre montage financier pour la construction, les banques exigeaient notamment que nous disposions d’un accord d’écoulement de la production à long terme », se rappelait M. Mutchler. Largo avait quelques arguments commerciaux à faire valoir à Glencore ; le matériau fourni par la mine Maracás dépasse les exigences, les tonnages de production sont importants pour du vanadium et on ne trouve aucune autre mine de vanadium sur le territoire américain. Largo était également disposée à céder son vanadium au prix du marché en appliquant un abattement, ce qui, aux prix actuels, signifie que Glencore obtient un très bon produit à faible coût.
Glencore s'est engageé à acheter l'intégralité du pentoxyde de vanadium produit par la mine pendant au moins six ans. Avec l'autorisation de Largo Resources
La qualité initiale du minerai de la mine Maracás en fait une exploitation peu coûteuse. En mars 2015, les coûts d’exploitation mensuels ont chuté à 3,91 $ US la livre, ce qui est satisfaisant par rapport au coût moyen observé chez les producteurs primaires de 4,50 $ US. En revanche, depuis l’an dernier, le marché du vanadium est en baisse ; pendant tout le printemps, il a stagné en dessous des 5 $ US la livre de V2O5. Il y a cinq ans, les prévisions à long terme étaient plus optimistes, mais le déclin de la demande en acier s’est accompagné d’une baisse de la demande des adjuvants pour l’acier. Selon le Roskill Consulting Group, l’offre relative au vanadium est excédentaire et susceptible de le demeurer.
D’après Mark Smith, le prix du vanadium ne restera pas à un niveau excessivement bas. « En examinant le cours du vanadium depuis 10 ans, on constate que le V2O5 ne s’est pas vendu sous la barre des 5 $ US la livre pendant plus de 30 jours consécutifs », expliquait-il, « et cette tendance dépend principalement de la structure de coûts des fournisseurs de vanadium. » Selon lui, beaucoup de producteurs renoncent rapidement lorsque les prix chutent.
À plus long terme, M. Smith entrevoit d’éventuelles répercussions des problèmes que connaissent les mines chinoises de minerai de fer. La Chine produit plus de la moitié de l’approvisionnement mondial en vanadium, la majeure partie provenant des laitiers sidérurgiques issus de son minerai de fer. Si la chute des prix du minerai de fer entraîne la fermeture forcée de mines chinoises dont les coûts d’exploitation sont élevés, l’équilibre de l’offre et de la demande pourrait alors devenir beaucoup plus favorable à des mines telles que celle de Maracás.
Ancien dirigeant de Molycorp, M. Smith est parvenu à recueillir plus de 2 milliards $ pour sa mine de terres rares Mountain Pass ; ainsi, il excelle dans l’art de convaincre les investisseurs qu’il a en main une proposition gagnante. À Maracás, déclarait-il, « nous disposons d’une ressource absolue de calibre mondial, une production au coût le plus bas parmi tous les producteurs primaires du monde, et pour ce qui est des connaissances sur le vanadium, je ne pense pas que l’on puisse trouver des personnes plus brillantes et expérimentées que nos spécialistes. »
Réflexions sur l’avenir
Si l’acier domine la destinée actuelle du vanadium, ce métal renferme également un marché potentiel dans le secteur des sources d’énergie propres. En effet, la recherche sur les batteries redox au vanadium laisse supposer qu’elles se prêteraient bien au stockage de la production d’énergie des éoliennes et des panneaux solaires.
« C’est un marché émergent, qui représente actuellement 1 % [de la demande] », indiquait Darcie Ladd, vice-présidente chargée des relations investisseurs chez Largo. « De toute évidence, s’il prend son envol, ce marché a un potentiel énorme. » Mme Ladd soulignait que si la mine Maracás dispose de la haute teneur requise par les applications dans le domaine des batteries, ce n’est pas le cas de tous les producteurs de vanadium.
Pour le moment, Largo n’a pas particulièrement besoin de trouver des débouchés pour son produit et se concentre sur le remboursement de ses dettes et sur l’augmentation de la production à la mine Maracás.
« Bien entendu, nous subissons les problèmes associés au démarrage d’une toute nouvelle installation, mais nous les gérons plutôt bien », déclarait M. Smith. « Nous commençons à observer une production constante tous les jours, ce qui est très important. Nos opérateurs savent ce qu’ils font, assument leurs responsabilités et sont fiers de la production, ce qui se reflète sur l’installation, et ce, après neuf mois de production seulement. Nous sommes donc relativement confiants en ce qui concerne nos coûts de production, l’augmentation des niveaux de production et l’assainissement de nos finances, ce qui permettra à Largo de devenir un important fournisseur de vanadium sur une longue période. »
Traduit par CNW et Karen Rolland